Recul exigé sur le remboursement de la prime des infirmières

Le ministre de la Santé, Christian Dubé, a tenté de détourner l’attention en s’en prenant aux syndicats.
Photo: Paul Chiasson Archives La Presse canadienne Le ministre de la Santé, Christian Dubé, a tenté de détourner l’attention en s’en prenant aux syndicats.

Les infirmières ne devraient pas avoir à rembourser leurs primes au moindre congé sans solde, selon les partis d’opposition, qui ont demandé au gouvernement de faire marche arrière jeudi. Le ministre de la Santé, Christian Dubé, a plutôt tenté de détourner l’attention en s’en prenant aux syndicats.

« J’ai dit qu’un changement de culture, ça prend de mettre de côté ce climat de confrontation là qu’il y a eu depuis longtemps avec les syndicats, puis de s’en aller vers une collaboration », a-t-il affirmé en mêlée de presse. Il les a accusés d’avoir remis un document contenant des faussetés aux journalistes.

Or, Le Devoir révélait jeudi le contenu du guide d’application des primes pour « l’attraction et la rétention des professionnelles en soins infirmiers et cardiorespiratoires » du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS). Selon ce guide transmis au réseau de la santé mardi, les infirmières devront rembourser en totalité leurs primes si elles prennent une seule journée sans solde au cours de l’année. Le montant sera aussi coupé au prorata des absences pour maladie ou maternité, notamment.

« Je trouve que le syndicat comme le ministère doivent faire un effort. Les deux ! » s’est exclamé le ministre, visiblement fâché. Il a indiqué qu’une journée d’absence ne devrait pas faire de différence sur le montant total de la prime d’une infirmière, contrairement à un congé de maladie de deux semaines qui serait retranché en « proportion de son année de travail ».

Le ministère a par la suite tenté de corriger le tir en spécifiant que « [l]es absences maladie court ou long terme, les congés de maternité et les absences pour visite de grossesse » n’affecteraient pas l’admissibilité aux montants et que, par conséquent, la prime ne serait pas révoquée. Il a toutefois précisé qu’elle ne serait pas calculée sur les congés sans solde, qui ne constituent pas des heures travaillées.

Les primes de 12 000 $ à 18 000 $ avaient été annoncées en septembre pour inciter des infirmières à retourner travailler dans le système public et pour garder celles qui y travaillent déjà. Le détail n’avait toutefois pas été donné avant la présentation du guide d’application du MSSS.

Contestation à venir ?

La Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) n’exclut pas de demander l’annulation de l’arrêté ministériel qui instaure ces primes. « Ça passe auprès de nos membres comme un affront, a affirmé la présidente du syndicat, Nathalie Lévesque. Ils veulent être entendus, donc toutes les voies de passage possibles vont être considérées pour la contestation de cet arrêté ministériel. » Elle aurait préféré que le gouvernement prenne le temps de consulter les infirmières avant de faire son annonce.

Les trois partis d’opposition ont dénoncé jeudi le remboursement des primes par les infirmières au moindre congé sans solde. Le porte-parole en matière de santé de Québec solidaire, Vincent Marissal, a accusé le gouvernement d’utiliser « le bâton et la matraque ».

« Le gouvernement ne réussira jamais à rétablir le lien de confiance avec les infirmières avec de telles mesures, et le fardeau de la transparence repose sur les épaules du ministre de la Santé », a-t-il dénoncé. Sa motion demandant au gouvernement de faire marche arrière n’a pas obtenu le consentement des élus caquistes.

« Le gouvernement a besoin de revoir cette politique-là, a affirmé le porte-parole libéral en matière de santé, André Fortin. Tous les employeurs au Québec ont une obligation de traiter les employés avec respect, tous les employeurs au Québec ont une obligation d’offrir des congés sans solde pour des raisons qui sont tout à fait valables comme une absence pour un décès familial, comme des suivis de grossesse. »

Le guide d’application des primes envoie le mauvais signal, selon le chef du Parti québécois, Paul Saint-Pierre Plamondon. « On vient de dépenser un milliard en primes pour attirer des infirmières et ensuite on dit : “Si vous avez un test de grossesse ou si vous avez un test médical, bien là, ce bonus-là ne s’applique pas.” Il me semble que c’est discriminatoire à sa face même. »

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