Les manifestations antivaccins interdites près des écoles et des hôpitaux

L’Assemblée nationale a adopté à toute vapeur jeudi un projet de loi visant à interdire les manifestations antivaccins à moins de 50 mètres des écoles, des garderies et des hôpitaux du Québec.
Le projet de loi 105, présenté en matinée par la ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, a été adopté à l’unanimité après seulement quelques heures de débat.
Il interdit toute manifestation « en lien » avec la pandémie à moins de 50 mètres des écoles, des garderies et des établissements de santé et de services sociaux, y compris les cliniques de dépistage et de vaccination. À la suggestion de la libérale Marwah Rizqy, le projet de loi couvre aussi les centres de formation professionnelle et générale pour adultes et les cégeps.
Le gouvernement est aussi venu préciser à l’aide d’un amendement que le projet de loi ne s’applique pas aux travailleurs qui souhaitent manifester, par exemple, pour de meilleures conditions de travail.
Par contre, les parents qui voudront manifester notamment pour une meilleure ventilation à l’école de leurs enfants ne pourront le faire, puisque le sujet est lié à la COVID-19, a dû reconnaître Mme Guilbault. Ils devront exercer leur droit à l’extérieur du périmètre, a-t-elle mentionné.
Il sera en outre interdit à quiconque « d’organiser ou d’inciter à organiser une manifestation » antimesures sanitaires. Le projet de loi prévoit des amendes allant de 1000 $ à 6000 $ pour les manifestants. Ces montants passent de 2000 $ à 12 000 $ pour quiconque « menace ou intimide une personne qui se rend [dans les lieux visés], tente d’y accéder ou en sort ». Ces amendes doubleront en cas de récidive.
À noter que la ministre Guilbault a rejeté la demande de Mme Rizqy d’imposer aux contrevenants des peines d’emprisonnement allant jusqu’à six mois.
Le projet de loi 105 prévoit aussi que les juges de la Cour supérieure pourront prononcer des injonctions pour empêcher « tout acte contraire » aux dispositions du texte législatif.
Les mesures du projet de loi viendront à échéance dans 30 jours, comme l’exigeait le Parti conservateur du Québec (PCQ). Le gouvernement se réserve le droit de les prolonger de 30 jours, et ce, même avant l’échéance. Il pourra ainsi effectuer « toute autre prolongation » d’ici la fin de l’état d’urgence sanitaire.
« Franchement, il y a des limites »
Plus tôt, le chef du PCQ, Éric Duhaime, avait prévenu contre les dangers d’adopter prestement un projet de loi qui s’attaque au droit fondamental de manifester.
La députée indépendante Claire Samson, qui a rejoint le PCQ, a renchéri en disant être d’avis que le gouvernement tentait ainsi de « limiter la liberté d’expression de certains citoyens ». « C’est pas une p’tite affaire, là, s’est-elle exclamée. Est-ce qu’on va avoir un projet de loi spécial toutes les semaines pour cibler un groupe de manifestants ? »
Malgré ses réticences, Mme Samson a donné son consentement au gouvernement à toutes les étapes du processus.
Dans un message publié sur sa page Facebook, M. Legault a dit comprendre qu’il est délicat de restreindre le droit de manifester, mais que, « franchement, il y a des limites ».
Il affirme vouloir épargner les enfants, les personnes malades et les travailleurs du réseau de la santé. « Ce qui est peut-être le plus choquant pour moi, c’est d’imaginer ce que nos infirmières doivent ressentir en voyant ça. Ces femmes et ces hommes-là se donnent corps et âme depuis des mois pour soigner les malades de la COVID-19 malgré des conditions de travail très difficiles », écrit M. Legault.
Il souligne que des malades se trouvant à l’hôpital ont refusé le vaccin et que des infirmières doivent maintenant voir, en sortant de leur lieu de travail, des manifestants leur crier que le vaccin ne fonctionne pas. « Ce n’est pas vrai qu’on va accepter ça. Au moment où on manque cruellement d’infirmières dans notre réseau de la santé, on ne peut pas laisser une poignée de radicaux leur rendre la vie encore plus difficile », a-t-il dit.
La nouvelle loi votée jeudi est à l’image de celle adoptée en 2016 par l’Assemblée nationale pour empêcher les manifestants antiavortement de s’approcher des cliniques où avaient lieu des interruptions de grossesse.