Les conservateurs se posent en alliés du Québec

Les remontrances inattendues du premier ministre du Québec, François Legault, contre le Parti libéral et le NPD jeudi ont donné une occasion en or aux conservateurs d’Erin O’Toole de se décrire comme le seul parti pouvant à la fois prendre le pouvoir et répondre aux demandes de Québec.
Les stratèges conservateurs ont très rapidement publié sur Twitter un montage photo aux airs d’affiche électorale sur lequel on voit Erin O’Toole et François Legault, sur les tons de bleu de leur parti respectif.
En haut, on peut lire les propos du premier ministre du Québec, tenus le matin même, selon lesquels « il y a deux partis qui sont plus centralisateurs : le Parti libéral et le NPD ». Plus bas, la prétention d’Erin O’Toole selon laquelle le Parti conservateur est le seul « qui respecte le Québec et qui peut remplacer Justin Trudeau ».
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Les partis fédéraux doivent donner priorité aux transferts en santé, martèle François LegaultPourtant, en point de presse jeudi matin, M. O’Toole a refusé à deux reprises de s’engager à honorer l’importante entente de 6 milliards conclue entre MM. Legault et Trudeau en guise de compensation sans condition pour le programme libéral pancanadien de garderies. Tous les autres partis sont d’accord pour maintenir cette entente.
« Avec notre plan, on va aider toutes les familles québécoises […] En même temps, on doit respecter les champs de compétence des provinces », s’est-il contenté de répondre.
Cela n’a rien pour plaire au premier ministre du Québec, François Legault, qui a spécifié que « la signature d’un gouvernement, ça compte. Donc, je m’attends à ce que la signature du gouvernement fédéral soit respectée, peu importe qui sera au pouvoir le 20 septembre ».
Promesse de partenariat
Enorgueilli par la conférence de presse de François Legault, le chef Erin O’Toole lui a même écrit une lettre pour lui rappeler sa proposition de « contrat » avec les Québécois pour un « fédéralisme qui [leur] tend la main » et qui n’est « pas paternaliste ». Il a rappelé divers engagements qui correspondent aux demandes du gouvernement Legault, comme appliquer la loi 101 aux entreprises à charte fédérale ou donner plus d’autonomie au Québec en matière d’immigration par regroupement familial, sans toutefois préciser comment. Il a aussi promis de bonifier les transferts en santé de 6 % par an, ce qui est en deçà de la demande des premiers ministres provinciaux, qui réclament une augmentation immédiate de 28 milliards.
« Je n’ai pas entendu M. Legault saluer la position des conservateurs en matière de garderies [ni] en matière de santé », a lancé Yves-François Blanchet. Le chef du Bloc québécois soutient que la liste des demandes de François Legault correspond déjà au programme de son parti.
Le chef du NPD n’a pas rejeté le qualificatif de « centralisateur » qui lui a été accolé par François Legault. « On vit dans un pays fédéraliste, et c’est normal qu’on travaille ensemble. Mais ce qui n’est pas normal, c’est que, quand on fait face à un problème, si quelqu’un a vu la perte d’un proche dans un centre de soins de longue durée, ce qui n’est pas normal, c’est de dire : “Oh, ce n’est pas de notre compétence, ce n’est pas de notre juridiction.” Pour moi, ça montre un manque de leadership. »
Ouvertement attaqué par François Legault, qui a qualifié son parti de « centralisateur », Justin Trudeau a refusé de répliquer lors de son passage à Trois-Rivières jeudi. Malgré les demandes des journalistes à bord de son autobus de campagne, il n’a organisé aucune mêlée de presse après la sortie de son homologue provincial et ne s’est par conséquent toujours pas prononcé sur sa liste de demandes.
Avant leur publication, M. Trudeau a toutefois vanté son « partenariat » avec le premier ministre Legault qui, dit-il, a permis des investissements en santé. « On reconnaît qu’ici, au Québec, la pandémie s’est mieux passée qu’ailleurs à cause du leadership de M. Legault et de notre partenariat. » Il vante notamment l’accord en matière de garderies, dont François Legault exige le respect par tout gouvernement, qui doit créer 37 000 places au Québec.
Avec Marie-Michèle Sioui et La Presse canadienne