Legault prend encore la défense de Fitzgibbon

Ni les quatre enquêtes de la commissaire à l’éthique le visant ni les dernières révélations entourant sa participation dans un fonds basé dans un paradis fiscal n’ont ébranlé la confiance du premier ministre envers son ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon.
En point de presse mercredi, François Legault a répété que son ministre était « un atout » pour son gouvernement, balayant du revers de la main les critiques le présentant comme un boulet au sein de son équipe.
Le Journal de Montréal a révélé en matinée que M. Fitzgibbon possède des intérêts dans le fonds White Star Capital, établi dans le paradis fiscal de Guernesey. Deux hauts dirigeants de ce fonds ont été inscrits en 2020 comme lobbyistes auprès de M. Fitzgibbon, puisqu’ils cherchent « un appui politique ou financier » pour un investissement public potentiel de 20 millions de dollars.
Je pense que j’aide la CAQ. [...] Si le gouvernement pense que je nuis, je vais quitter [la politique].
Le média a aussi publié une photo d’une rencontre organisée en 2019 à Paris entre le ministre Fitzgibbon, le premier ministre François Legault et le cofondateur de White Star Capital, Éric Martineau-Fortin.
« Une très belle photo, d’ailleurs », a souligné M. Fitzgibbon devant les journalistes de l’Assemblée nationale, puis au Salon bleu. Il a par la suite dénoncé « l’acharnement » dont Le Journal de Montréal fait preuve, à son avis. À quelques reprises, il a déclaré qu’il y avait « zéro conflit d’intérêts ».Puis il a ajouté qu’il y aurait « apparence, peut-être », de conflit d’intérêts. « Si le gouvernement pense que je nuis, je vais quitter [la politique] », a-t-il ensuite affirmé.
Quelques heures plus tard, M. Legault a déclaré qu’il n’y avait rien de plus dans cette histoire qu’une simple photo. « Des photos, dans un voyage, j’en prends beaucoup avec des gens d’affaires qui veulent se faire photographier avec moi », a-t-il dit.
La commissaire à l’éthique et à la déontologie de l’Assemblée nationale, Ariane Mignolet, a récemment annoncé qu’elle s’apprête à déclencher une quatrième enquête au sujet de M. Fitzgibbon, dont la situation financière entre en contravention avec le code imposé aux élus. Le ministre a déjà fait l’objet de deux réprimandes. Un autre élu caquiste, Louis-Charles Thouin, a quitté le caucus de la CAQ mardi en raison d’enquêtes de la commissaire à l’éthique et de l’Unité permanente anticorruption.
Une rencontre « par hasard »
Devant les journalistes, le ministre Fitzgibbon a dit avoir averti le premier ministre de ses intérêts dans White Star Capital avant la rencontre de 2019 à Paris. Or M. Legault a dit ne pas avoir été informé de cette situation, qui a pourtant été inscrite dans la déclaration d’intérêts de M. Fitzgibbon dès 2017-2018.
La rencontre à Paris a eu lieu « par hasard », a dit M. Fitzgibbon, ajoutant qu’elle n’avait duré que « trois ou quatre minutes ». Puis, toute cette histoire n’est que « du bruit sur la ligne », a-t-il fait valoir, en évoquant un « petit » investissement se situant entre 10 000 et 3 millions de dollars. Les fonds qu’il a investis ont été gagnés au Québec et seront imposables, a-t-il aussi précisé.
Ses explications n’ont pas rassuré les partis d’opposition. « Tolérance zéro, c’est-tu zéro ou c’est pas zéro ? » a demandé le député libéral Gaétan Barrette, en rappelant l’intransigeance de François Legault au sujet de l’éthique lorsqu’il était dans l’opposition. Il a invité M. Fitzgibbon à se retirer de ses fonctions.
Le député solidaire Vincent Marissal a une fois de plus réclamé la suspension de M. Fitzgibbon d’ici à ce qu’il se conforme aux règles de l’Assemblée nationale. À son avis, la tolérance dont fait preuve M. Legault illustre l’« arrogance de plus en plus évidente de ce gouvernement-là ».
« Moi, si je suis M. Fitzgibbon, je n’attends pas que le premier ministre me démissionne, je fais la chose honorable et je me retire », a aussi déclaré Martin Ouellet, du Parti québécois. Il a ensuite annoncé son intention de communiquer avec la commissaire à l’éthique — qui pourrait ainsi entamer une cinquième enquête sur Pierre Fitzgibbon.