Québec veut exiger des tests négatifs avant et après le retour des voyageurs
Les Québécois de retour de l’étranger peuvent désormais s’attendre à recevoir une visite des autorités sur leur lieu de quarantaine. Le gouvernement Legault souhaite serrer la vis aux voyageurs, dont 3000 reviennent dans la province mercredi seulement, en exigeant un test négatif à la COVID-19 avant leur vol et en les dépistant une seconde fois directement à l’aéroport.
S’il n’en tenait qu’au ministre de la Santé, Christian Dubé, les Québécois n’auraient tout simplement pas le droit de quitter le pays en pleine pandémie mondiale. « La première chose qu’on aurait aimée, c’est qu’il n’y ait pas de voyages à l’étranger. On l’avait demandé, mais le fédéral n’est pas allé là », a laissé tombé le ministre, lors d’une conférence de presse, mardi.
Préoccupé par les images de voyageurs québécois à l’étranger diffusées par les médias et sur les réseaux sociaux, le ministre a annoncé que son gouvernement s’est entendu avec le fédéral pour que des mesures de contrôle supplémentaires, associées à la menace d’amendes, soient imposées à ceux et celles qui ne peuvent contenir leur envie de se prélasser au soleil. Le moment de l’entrée en vigueur de ces nouvelles mesures est toutefois le sujet de discussions avec Ottawa.
« On veut éviter de reproduire ce qui s’est passé après la semaine de relâche au printemps. Les images qu’on a vues des vacanciers dans le Sud sont choquantes pour tout le monde, surtout pour ceux qui respectent les règles et pour les travailleurs de la santé », a précisé le ministre.
La mairesse de Montréal, Valérie Plante, a aussi exhorté ses concitoyens à ne pas quitter le pays. « Ce n’est pas la chose à faire en ce moment. Évitons un scénario comme au printemps dernier. […] Le personnel de la santé doit pouvoir compter sur nous », a-t-elle tweeté mardi.
Les images qu’on a vues des vacanciers dans le Sud sont choquantes pour tout le monde, surtout pour ceux qui respectent les règles et pour les travailleurs de la santé
Au moment où les autorités ont détecté, mardi, une première infection au nouveau variant du coronavirus responsable de la COVID-19 au Québec chez un membre de la famille d’une personne qui serait revenue du Royaume-Uni avec le virus, Québec juge que la surveillance des voyageurs ne peut plus se limiter à des appels téléphoniques. Le gouvernement Legault souhaite intensifier les visites à domicile chez les personnes en quarantaine.
« Ça se fait en ce moment avec un échantillonnage très petit, mais on veut s’entendre avec le fédéral pour que l’échantillonnage soit augmenté pour être sûrs que les gens soient chez eux, insiste M. Dubé. Il va falloir s’assurer que ces gens-là comprennent très bien que la quarantaine est importante. Sans quoi, il y aura des amendes. »
Plus de ressources du fédéral
Si le fédéral ne met pas les ressources suffisantes, la province assurera elle-même cette surveillance, précise le ministre de la Santé. « À compter de demain […] environ 3000 touristes vont rentrer à Montréal et à Québec. Donc, vous pouvez vous imaginer la tâche de suivre ces personnes-là chez elles. »
De sévères pénalités sont prévues pour le non-respect des consignes de quarantaine. Les contrevenants s’exposent à une amende de 800 à 750 000 $ et à une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à six mois.
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À ce chapitre, les autorités fédérales ont adopté l’approche de la tolérance, en particulier durant les premiers mois de la pandémie, préférant les avertissements aux amendes. La police est intervenue 41 103 fois pour faire respecter la quarantaine de voyageurs, ce qui est resté sans suite dans 98,8 % des cas. Seulement 130 constats ont été dressés depuis l’entrée en vigueur de la Loi sur la mise en quarantaine, il y a 9 mois, et 8 accusations criminelles ont été portées. De plus, les policiers ont dû donner des avertissements verbaux ou écrits à 205 reprises, selon les données compilées par l’Agence de la Santé publique du Canada.
Double dépistage
En plus, le gouvernement Legault souhaite que les touristes québécois, y compris ceux qui sont présentement à l’étranger, obtiennent un test de dépistage de la COVID-19 négatif avant de monter dans l’avion.
« Qu’ils soient en Floride, au Mexique, peu importe, dans les tout-inclus, c’est maintenant une exigence qu’on va demander. Ceux qui sont déjà partis vont devoir se conformer. Et j’avertis ceux qui s’attendent à partir dans les prochains jours, cette demande-là va être faite », a averti le ministre Dubé, tout en soutenant que le gouvernement fédéral est d’accord avec le principe.
Ensuite, les autorités prévoient l’obligation pour les voyageurs aériens de subir un second test, celui-là à l’arrivée aux aéroports de Québec ou de Montréal. Le ministre a rappelé qu’il était de la responsabilité du gouvernement fédéral d’instaurer ces tests rapides aux points d’entrée au pays, et que celui-ci devrait y déployer son propre personnel. « On ne veut pas prendre nos tests et faire le travail du fédéral », a précisé le ministre.
Or, les deux gouvernements ne s’entendent pas quant au moment où ces différentes mesures entreront en vigueur. Ottawa prévoit qu’elles seront appliquées début janvier alors que Québec souhaite que ces exigences soient mises en place plus tôt. « Si c’était juste de moi, ce serait à compter de demain matin, mais on est en discussions [avec le gouvernement fédéral] », a déclaré M. Dubé.
Le gouvernement Trudeau n’a pas voulu confirmer son adhésion aux différentes requêtes de Québec. Dans un communiqué, le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Bill Blair, dit « [continuer] d’évaluer les mesures en place et de faire l’essai de nouvelles méthodes pour protéger les Canadiens selon l’évolution mondiale de la situation », notamment par un projet pilote aux frontières dans diverses provinces, dont le Québec.
Les autorités fédérales rappellent qu’il est déconseillé d’effectuer tout voyage non essentiel, et avertissent les voyageurs qu’ils pourraient être contraints de rester à l’extérieur du Canada plus longtemps que prévu.
Des infections à la COVID-19 dans 25 vols à Montréal
Au moins 25 vols en provenance ou à destination de Montréal avaient à bord une personne atteinte de la COVID-19 en un peu plus d’une semaine, à la mi-décembre. En moyenne, ce sont donc trois vols montréalais par jour qui ont été mis sous le coup d’un avertissement spécial pour les voyageurs, entre le 14 et le 22 décembre.
L’analyse du Devoir des données rendues publiques par le gouvernement du Canada montre qu’au moins une personne porteuse du virus a été répertoriée dans 12 vols internationaux à destination de Montréal et dans 14 vols intérieurs qui ont décollé ou atterri dans cette ville depuis le 14 décembre. À cela s’ajoute un vol Québec–Sept-Îles et un train Via Rail entre Dorval et Ottawa.
Ces données, préliminaires, ne listent qu’un vol montréalais touché par le virus après le 22 décembre. Or, cette liste risque d’être mise à jour à mesure que de nouveaux cas seront répertoriés, ce qui peut prendre plusieurs jours. Le délai d’incubation de la maladie à coronavirus est estimé de quatre à sept jours.
Boris Proulx