Québec paierait un cycle de fécondation «in vitro»

L’avancement de ce dossier a été compromis par la COVID-19, qui a (entre autres) entraîné la suspension des travaux parlementaires de l’Assemblée nationale.
Photo: Ivan Couronne Agence France-Presse L’avancement de ce dossier a été compromis par la COVID-19, qui a (entre autres) entraîné la suspension des travaux parlementaires de l’Assemblée nationale.

Malgré les impacts financiers de la COVID-19, Québec garde le cap sur sa promesse de rétablir la gratuité des traitements de fécondation in vitro (FIV), a appris Le Devoir. 

Selon nos informations, le gouvernement Legault déposera cet automne un projet de loi visant à donner l’accès gratuit à un cycle de FIV par « projet parental ». Québec estime que cela lui permettrait de rembourser 3500 cycles de FIV par année.

La volonté d’aller de l’avant avec cette promesse électorale est bien présente au sein de la Coalition avenir Québec. « C’est sûr qu’on veut déposer le projet de loi cet automne », a insisté une source gouvernementale.

Une première version de la pièce législative, qui devait être déposée au printemps par l’ex-ministre de la Santé, Danielle McCann, a été légèrement remaniée.

Le dossier est désormais entre les mains du ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux, Lionel Carmant. Au-delà de la gratuité du premier cycle de FIV, ses équipes envisagent la possibilité de conserver le crédit d’impôt actuel afin de réduire les coûts des cycles suivants.

Cette question est cependant « encore à l’étude », confie une source qui s’intéresse au dossier. La première mouture du projet de loi, qui devait être déposée en mars ou en avril, prévoyait le maintien d’une forme de crédit d’impôt.

Le crédit d’impôt en vigueur, qualifié d’« inefficace » et « injuste » par le premier ministre François Legault, a coûté 6,1 millions de dollars à l’État québécois en 2019. Quant à la gratuité du premier cycle de FIV, elle a été chiffrée à 50 millions de dollars par la CAQ, qui en a fait une promesse électorale en 2018.

La définition de ce qui constitue un « premier cycle » de FIV continue de susciter des débats, et elle risque d’alimenter les discussions au sujet de ce projet de loi. Le processus comprend, entre autres, la stimulation, le prélèvement et la fécondation des ovules, puis le transfert d’un embryon. L’ensemble des traitements peut coûter jusqu’à 15 000 $.

50M$
C’est le coût estimé du projet par la CAQ.

Dès son arrivée en poste, la ministre McCann avait partagé sa volonté de restaurer la couverture publique de la FIV. C’est dans cet esprit qu’elle avait annoncé, en mai 2019, la création d’un groupe d’experts en procréation médicalement assistée. La ministre avait alors dit qu’elle estimait avoir « le devoir » de soutenir les personnes qui souhaitent avoir un enfant et elle s’était engagée à le faire, « mais de manière concertée et structurée ».

Dans le budget qu’il a présenté en mars, le ministre des Finances, Eric Girard, a d’ailleurs réservé un montant destiné au rétablissement de la gratuité de la FIV. Les sommes qu’il y a inscrites pourront être libérées si le projet de loi du ministre Carmant est adopté.

Projet retardé

 

L’avancement de ce dossier a été compromis par la COVID-19, qui a (entre autres) entraîné la suspension des travaux parlementaires de l’Assemblée nationale. Or, la volonté du gouvernement est toujours là ; « tout à fait », a attesté une source.

Québec ne souhaite cependant pas revenir au « bar ouvert » qu’était le programme de procréation assistée instauré par le gouvernement Charest en 2010. Cette expression a été utilisée par l’ex-ministre de la Santé Gaétan Barrette lorsqu’il a mis fin à la gratuité du programme, en 2015. L’élu libéral avait notamment dénoncé les dérives éthiques associées à la sélection d’embryons.

Le premier programme de gratuité pour la FIV a été annoncé il y a dix ans par le ministre Yves Bolduc. Il prévoyait le remboursement de trois cycles de fécondation. En 2014-2015, il avait coûté environ 70 millions à l’État.

Depuis son abolition, Québec a mis sur pied le crédit d’impôt pour le traitement de l’infertilité. L’État rembourse également neuf cycles d’insémination.

En entrevue au Devoir en février, l’un des membres du groupe d’experts mis sur pied par la ministre McCann avait souligné l’importance de tenir compte du « coût cumulatif » de ce deuxième exercice. Les frais associés aux multiples tentatives d’insémination peuvent se révéler plus élevés qu’une tentative de FIV, avait alors fait valoir le Dr William Buckett, du Centre de la reproduction du Centre universitaire de santé McGill.

Dans une discussion au sujet des meilleures pratiques en matière de FIV, il avait déclaré que « l’idéal serait [de rembourser] deux ou trois » cycles. Le Dr Buckett n’avait cependant pas souhaité dévoiler la teneur des discussions ayant eu lieu au sein du comité d’experts.

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