Legault mise sur l’«immunité naturelle» des Québécois
Un confinement prolongé jusqu’en septembre « serait la pire chose » à faire, selon le premier ministre François Legault, qui compte sur le développement d’une « immunité naturelle » à la COVID-19 dans la population âgée de moins de 60 ans pour faire diminuer le taux de transmission. Il veut éviter une deuxième vague de contagion à l’automne qui serait pire que la première « pour éviter de perdre le contrôle dans le réseau de la santé ».
« On se retrouve dans une situation où on doit attendre le vaccin, qui va arriver peut-être dans un an, peut-être deux ans, a dit M. Legault jeudi. On ne peut pas demander aux gens de rester chez eux pendant deux ans. Donc, l’idée, c’est d’y aller très graduellement pour que les personnes qui sont moins à risque, bien, puissent développer des anticorps, là, être capables de devenir immunisées. »
Le premier ministre a toutefois voulu rassurer les citoyens inquiets par la perspective d’un déconfinement. « Quand on dit qu’on va annoncer un plan la semaine prochaine, il n’y a rien qui va rouvrir la semaine prochaine, a-t-il tenu à souligner. Ça va juste être un calendrier pour les semaines suivantes. »
Ce calendrier sera adapté au fur et à mesure que la situation évolue par le directeur national de la santé publique, le Dr Horacio Arruda. « On n’ouvrira rien avant d’avoir le OK du Dr Arruda et de son équipe, a précisé le premier ministre. Donc, je veux juste qu’on soit très clairs. » Les parents qui ne souhaitent pas envoyer leurs enfants à l’école d’ici la fin de l’année scolaire n’auront pas à le faire.
Pas question, donc, « de prendre les enfants comme des cobayes », a précisé le premier ministre. Sa position a reçu l’appui de l’Association des pédiatres du Québec, qui fait valoir que le confinement a également des effets négatifs sur les jeunes.
Par exemple, 240 000 enfants vivant dans la pauvreté ne bénéficient plus du programme de petits-déjeuners de leur école, d’autres qui vivent de la violence à la maison ne reçoivent pas d’aide, le dépistage d’autres maladies infectieuses ou des problèmes de développement fonctionne au ralenti et le confinement génère beaucoup d’anxiété.
Y aura-t-il une enquête publique sur la gestion des CHSLD?
« Moi, je n’exclus rien », a répondu M. Legault. Le gouvernement fera un bilan pour déterminer ce qui a mené à la crise dans ces centres d’hébergement de soins de longue durée, mais le premier ministre a déjà laissé entendre que les nombreuses absences du personnel dans le réseau avaient rendu la « situation très tendue ».« Un retour progressif à la vraie vie pour nos enfants n’est pas seulement souhaitable, il est nécessaire, écrit l’Association dans une lettre envoyée au premier ministre. Il faudra bien entendu que ce retour soit graduel et prudent. Les grands-parents de ces enfants demeurent extrêmement vulnérables, tout comme le personnel plus âgé des écoles et CPE. »
La Santé publique estime que moins de 10 % des Québécois sont immunisés à la COVID-19, alors qu’il faudrait qu’entre 60 % et 80 % le soient pour obtenir une immunité de masse. Le port du masque sera fortement recommandé, particulièrement dans les transports en commun, où il sera difficile de respecter la distanciation de 2 mètres.
« On ne peut pas le rendre obligatoire, compte tenu de son niveau d’efficacité, a expliqué le Dr Arruda. En termes juridiques, ça serait [extrêmement] contestable. Donc, ça va être une forte recommandation. »
873 nouveaux cas d’infection au coronavirus ont été recensés au Québec jeudi, pour un total de 21 838 cas confirmés. Pas moins de 109 nouveaux décès se sont ajoutés au bilan, ce qui porte le total à 1243. De ce nombre, 93 décès concernent des personnes qui vivaient dans des résidences pour aînés.
Déconfinement précipité ?
Plusieurs provinces canadiennes se préparent à entamer un déconfinement sur leur territoire.
Le premier ministre de la Saskatchewan, Scott Moe, a dévoilé jeudi son propre plan pour relancer l’économie de sa province et y rouvrir certaines entreprises et des services publics au mois de mai. Son plan se décline en cinq étapes et commence par la réouverture de certains services médicaux, des terrains de golf, des parcs et des terrains de camping. Le commerce au détail et les salons de soins esthétiques pourront reprendre leurs activités durant la deuxième phase, tandis que les restaurants, les bars, les centres de conditionnement physique et les garderies devront attendre la troisième phase.
Le Manitoba souhaite également faire partie des premières provinces à reprendre leurs activités et présentera son plan de match la semaine prochaine. Le Nouveau-Brunswick a aussi bon espoir de pouvoir relancer son économie au mois de mai.
Le premier ministre Justin Trudeau ne s’y est pas opposé. « Différentes provinces sont à différentes étapes dans leur lutte contre la COVID-19 et vont prendre des décisions appropriées », a-t-il dit, en précisant que le gouvernement fédéral tente d’assurer qu’il y a une approche commune.
La pandémie de COVID-19 fait beaucoup moins de victimes dans ces provinces qu’au Québec et en Ontario, et leur courbe épidémiologique a déjà commencé à s’aplatir.
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EN RÉSUMÉ
François Legault souligne l’apport de dix manufacturiers québécois
Si le Québec dispose de suffisamment de masques de procédure, de masques N95 et de gants pour les prochaines semaines, il en va tout autrement en ce qui concerne les blouses pour le personnel médical. Il en reste pour environ une semaine, a fait savoir M. Legault. « Heureusement, on a travaillé très fort au cours des dernières semaines à convaincre des entreprises ici, au Québec, d’en fabriquer. Il y a des entreprises qui commencent actuellement à nous livrer des blouses, a-t-il ajouté. Puis, on pense qu’avec ces volumes-là qu’on commence à recevoir, ça va nous permettre d’en avoir assez pour passer au travers. » Il a adressé ses remerciements du jour à ces dix entreprises : Delfab, Georges Courey, MIP, Le Château, Logistik Unicorp, Samuelsohn, Second Clothing, Shan, Tricots Liesse et Vêtements SP.