Une centaine de chercheurs demandent aux gouvernements de ne pas oublier les Autochtones

La ministre responsable des Affaires autochtones, Sylvie D’Amours
Photo: Jacques Boissinot Archives La Presse canadienne La ministre responsable des Affaires autochtones, Sylvie D’Amours

Près d’une centaine de chercheurs et de médecins canadiens en santé autochtone signent jeudi une lettre ouverte dans laquelle ils pressent les gouvernements de « fournir un soutien alimentaire et des soins médicaux » aux peuples autochtones du pays.


« Nous devons reconnaître qu’il existe toujours un racisme systémique au sein de la société canadienne qui refait rapidement surface dans de tels événements », écrivent-ils.

Ils rappellent notamment que deux Innus d’Uashat mak Mani-utenam se sont fait refuser des tests de détection de la COVID-19 aux hôpitaux de Sept-Îles et de Port-Cartier, sous le prétexte qu’il n’y avait pas de cas sur la Côte-Nord. L’une de ces personnes s’est plus tard retrouvée intubée et sous sédation, tandis que l’autre a finalement reçu un diagnostic positif, selon un reportage de Radio-Canada.

Les 89 signataires de la lettre écrivent aussi que les gouvernements « [doivent] être conscients de l’importante insécurité alimentaire et de la vulnérabilité des communautés autochtones aux maladies infectieuses ».

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En entrevue au Devoir à la fin mars, la ministre responsable des Affaires autochtones, Sylvie D’Amours, a plutôt dit voir « un avantage [au fait] de demeurer dans une communauté [autochtone], au sens où on contrôle l’entrée et la sortie ». Elle a en outre déclaré que la bonne organisation des communautés pourrait les placer dans une situation enviable par rapport à « une grande ville comme Montréal ».

Le ministre fédéral des Services aux Autochtones, Marc Miller, a plutôt dit s’attendre à ce que les répercussions de la COVID-19 soient « disproportionnées » dans les communautés autochtones.

Des conditions de vie « extrêmes »

Les signataires de la lettre ouverte avancent des propos qui vont dans le même sens. « Alors que les autorités de santé publique recommandent aux personnes de rester à la maison, il convient de rappeler que les peuples autochtones vivent dans certaines des conditions de logement les plus extrêmes du pays », écrivent-ils.

Un Autochtone sur cinq vit dans un logement qui est surpeuplé, et la même proportion habite dans un logement nécessitant des réparations majeures, rappellent les médecins et chercheurs.

 

« La prévalence de surpeuplement et de logements mal entretenus est encore plus élevée dans les communautés inuites et des Premières Nations isolées, où l’occupation moyenne est de six personnes par maison », notent-ils.

Encore : la crise de la COVID-19 « [met] en péril l’accès des communautés à une alimentation saine qui est essentielle au maintien d’un système immunitaire sain », s’inquiètent les signataires. De nombreuses communautés isolées doivent compter sur le transport — par voie terrestre ou par avion — d’aliments en provenance des grands centres urbains. Or « les restrictions actuelles des déplacements limiteront probablement considérablement leur accès à des aliments du marché importés frais et nutritifs », est-il écrit dans la lettre.

La prévalence de l’insécurité alimentaire est « quatre fois supérieure à la moyenne nationale canadienne » dans les communautés autochtones, soulignent aussi les chercheurs. La malnutrition et l’exposition aux contaminants environnementaux remarquée dans plusieurs communautés du pays ont également « des implications importantes pour l’efficacité de la réponse immunitaire ».

S’ils saluent l’aide de 100 millions de dollars annoncée par Ottawa pour subvenir aux besoins alimentaires des plus vulnérables, dont les Autochtones, les signataires demandent néanmoins qu’un « soutien logistique » soit fourni « pour assurer un approvisionnement régulier en aliments de bonne qualité et en aliments traditionnels pour les communautés autochtones ».

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