Maternelles 4 ans: «il va vraiment falloir réexpliquer le programme»

Les classes de maternelle 4 ans visent notamment à faire en sorte que l’enfant «croit en ses capacités et découvre le plaisir d’apprendre», selon le site Internet du ministère de l’Éducation.
Photo: Jacques Nadeau Le Devoir Les classes de maternelle 4 ans visent notamment à faire en sorte que l’enfant «croit en ses capacités et découvre le plaisir d’apprendre», selon le site Internet du ministère de l’Éducation.

Le débat entourant les maternelles 4 ans bat son plein à l’intérieur et à l’extérieur de l’Assemblée nationale. Et il nuit au développement du programme d’éducation préscolaire 4 ans, s’inquiète la présidente de la Commission scolaire des Grandes Seigneuries (CSDGS), Marie-Louise Kerneïs.

« Hier encore, j’entendais que l’objectif était de “diagnostiquer [des enfants]”. Bien non, ce n’est pas ça. Ce n’est pas une clinique », raconte-t-elle dans un entretien téléphonique avec Le Devoir.

Malgré l’attention médiatique, qui s’est accrue depuis le dépôt du projet de loi 5 à l’Assemblée nationale le 14 février dernier, le programme des maternelles 4 ans n’est toujours « pas bien compris », constate Mme Kerneïs.

La dirigeante de la commission scolaire située sur la Rive-Sud de Montréal trouve cela « très dommage ».

Des parents craignent que leur enfant porte une « étiquette » d’élève éprouvant des difficultés d’apprentissage pendant tout son parcours scolaire s’il fréquente la maternelle 4 ans, rapporte-t-elle.

Réexpliquer le programme

 

Le programme d’éducation préscolaire 4 ans vise à favoriser le développement global de l’enfant.

« Le mandat de la maternelle 4 ans est triple : offrir des chances égales à tous les enfants ; s’assurer que chaque enfant se développe dans tous les domaines ; et faire en sorte qu’il croie en ses capacités et découvre le plaisir d’apprendre », peut-on lire sur le site Web du ministère de l’Éducation.

Hier encore, j’entendais que l’objectif était de “diagnostiquer [des enfants]”. Bien non, ce n’est pas ça. Ce n’est pas une clinique.

« Il va falloir, vraiment, vraiment le réexpliquer » le programme, soutient Mme Kerneïs, qui se décrit comme une « pro-maternelles 4 ans… pour les enfants qui en ont besoin ». « Veut, veut pas, il y a tellement eu de pression, de corporatisme dans tout cela… »

En Montérégie, la proportion des enfants qui éprouvent des « lacunes » à leur arrivée en maternelle — chez qui « au moins une zone de vulnérabilité » — a été constatée s’est accrue, passant de 23 % à 28 % en 10 ans.

« Il y a un malaise quelque part », souligne Mme Kerneïs à l’autre bout du fil. « Un enfant qui n’a que 100 mots de vocabulaire est vulnérable et il faut le mettre en contact avec des gens qui vont le faire progresser. »

Le territoire de la CSDGS regroupe les circonscriptions de Huntingdon, Châteauguay, La Prairie et Sanguinet. Elle connaît une croissance démographique « majeure ».

Cette année, la commission scolaire a ouvert 35 nouvelles classes : 24 classes au primaire, 8 classes en maternelle 5 ans et 3 classes en maternelle 4 ans : 2 à Châteauguay et 1 à Sherrington.

Deux groupes sur trois affichaient complet à la fin de la semaine, ce qui a contraint la commission scolaire à accepter en priorité les enfants n’étant pas inscrits dans un service de garde éducatif à l’enfance.

Au total, il y a 80 classes de maternelles 4 ans sur le territoire de la CSDGS. « Ce n’est vraiment pas beaucoup. On a quand même 28 000 élèves », mentionne Mme Kerneïs.

Contrairement à d’autres, la CSDGS ne se sent pas bousculée par le gouvernement caquiste pour ouvrir des classes de maternelle 4 ans. « C’est nous qui les demandons, les maternelles 4 ans. Ce n’est pas le ministère qui nous dit de les faire », explique Mme Kerneïs, précisant que « la priorité » de l’administration consiste à combler « les besoins d’espace criants dans le régulier ».

Elle précise qu’avant d’implanter une classe de maternelle 4 ans, la CSDGS doit avoir « l’assurance de la conserver pendant trois ans ». « De dire que c’est “populaire”, c’est un bien grand mot. »

La commission scolaire élabore actuellement les plans et devis d’une nouvelle école. « C’est sûr que le ministère nous a suggéré : « On construit aussi la maternelle [4 ans] dans ce nouveau projet. »

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