PQ: Lisée ne prévoit pas beaucoup plus de départs

À huit mois et demi des élections générales, des figures de premier plan du Parti québécois se bousculent vers la sortie. Alexandre Cloutier, Nicole Léger et Agnès Maltais ont tour à tour annoncé mardi leur départ de la scène politique québécoise le 1er octobre prochain.
François Gendron (Abitibi-Ouest) et Claude Cousineau (Bertrand) leur emboîteront le pas.

Le chef du PQ, Jean-François Lisée, s’attend à ce que les quelques autres élus, qui ont amorcé une réflexion sur leur avenir politique, clarifient leurs intentions d’un jour à l’autre. « Chacun sait qu’il y a des élections qui s’en viennent, que le moment de le dire, c’est le début de l’année, dans les premières semaines de l’année », a-t-il souligné.
Il n’appréhende pas beaucoup plus de départs. « L’immense majorité des députés du Parti québécois vont continuer […] alors que les sondages sont ce qu’ils sont », a-t-il mentionné.
En décembre, le PQ se voyait créditer de 19 % des intentions de vote, selon un coup de sonde Léger-Le Devoir. Un tel score le 1er octobre prochain constituerait un scénario catastrophe pour le PQ puisque, avec moins de 20 % des voix et moins de 12 députés, le PQ ne serait pas reconnu comme un groupe parlementaire par l’Assemblée nationale. « Être les outsiders de cette campagne, ça nous va », a lancé M. Lisée avec aplomb.

M. Cloutier ainsi que Mme Léger et Mme Maltais — qui ont toutes deux appuyé l’élu de Lac-Saint-Jean dans l’ultime course à la direction du PQ — ont juré la main sur le coeur que leur départ prochain n’a rien à voir avec la popularité du PQ ou encore la direction de M. Lisée. « Mon départ n’est d’aucune manière lié au leadership de Jean-François Lisée. Certes, la course [à la direction du PQ de 2016] a été rude, mais, depuis son élection, je dois dire que Jean-François a toujours agi en gentleman à mon égard. Il a toujours été réceptif à mes points de vue », a affirmé M. Cloutier lors d’une conférence de presse à Alma.
L’avocat montre plutôt du doigt la « partisanerie » dans laquelle est tombée la classe politique québécoise, qui « tue l’esprit d’initiative » et « divise inutilement ». Le bleuet n’a plus le « feu sacré ». « Malheureusement, cette motivation qui a toujours été inébranlable m’a quitté progressivement récemment. [La politique] ne doit pas être un moyen de juste payer l’hypothèque. C’est un engagement qui doit être entier, qui doit être sincère, qui doit être enthousiaste », a-t-il insisté.

Pour l’instant, l’ex-ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes et candidat malheureux à la direction du PQ compte relever de nouveaux défis à distance de la joute partisane… pendant un moment. « Mes premiers chapitres en politique sont donc écrits. En toute sincérité, à 40 ans, je suis incapable d’exclure qu’il y en aura d’autres », a-t-il conclu lundi.
À bout de souffle après des années politiques mouvementées, Nicole Léger et Agnès Maltais, elles, balaient toute possibilité d’effectuer un retour à l’Assemblée nationale. Elles ont toutefois promis, tout en faisant le plein d’énergie et de nouveaux projets, d’appuyer M. Lisée à titre de « militantes » au cours des prochaines années. « Watchez-vous, j’aurai refait mes forces ! » a lancé Mme Maltais mardi après-midi.
Circonscriptions « sûres »
Les élus quittent-ils un navire qui coule ? a demandé une journaliste à Jean-François Lisée en matinée. « Si on avait de la difficulté à trouver des candidats pour les remplacer, il y aurait du mérite à ce que vous dites, mais ce n’est pas le cas, bien au contraire », a répondu le chef péquiste.

Le chef du PQ a laissé entendre que les trois circonscriptions « sûres » de Lac-Saint-Jean, Pointe-aux-Trembles et Taschereau — où Agnès Maltais a été élue avec à peine 451 voix de majorité sur son adversaire libéral en 2014 — suscitent déjà « énormément de convoitise » de la part de candidats potentiels. « Quand les gens se demandaient “où allez-vous installer des vedettes nationales qui voudront venir ?”, moi, j’ai des idées », a dit M. Lisée.
Des péquistes disent s’attendre à la candidature de Jean-Martin Aussant dans la circonscription de Pointe-aux-Trembles. Nicole Léger assure qu’elle n’a subi « aucune pression » pour céder sa place à qui que ce soit. « Si un jour il [Jean-Martin Aussant] prend la décision de se joindre au Parti québécois, la porte est ouverte, la décision lui appartient », a dit M. Lisée. « Le Parti québécois est une coalition, je suis toujours ouvert à l’addition. » L’ex-député péquiste (2008-2011) et chef d’Option nationale (2011-2013) ne serait pas pour autant dispensé de « faire le travail de parti avec les membres et les militants comme n’importe qui d’autre », a-t-il précisé.
M. Lisée avait été avisé de la décision de Mme Léger et de Mme Maltais de ne pas briguer une nouvelle fois les suffrages il y a plusieurs jours. M. Cloutier a quant à lui annoncé son départ à M. Lisée « quelques heures » à peine avant de s’adresser à la presse. Le chef péquiste s’est trouvé aux côtés de Mme Léger, à Montréal, puis de Mme Maltais, à Québec, au moment de leur annonce respective.
Là-dessus, l’état-major du PQ a choisi de mettre fin aux rumeurs sur l’avenir politique d’Agnès Maltais, qui allaient bon train depuis le début de l’année. Autrement, celles-ci auraient fait ombrage au dévoilement de la candidature de Nathalie Leclerc dans la circonscription de Charlevoix–Côte-de-Beaupré — que ne manquera pas la députée de Taschereau mercredi —, estimait-il.
Après Maltais, le « vide »
Le maire de Québec, Régis Labeaume, ne miserait pas gros sur l’élection du candidat ou de la candidate du PQ dans Taschereau le 1er octobre prochain. « La réalité est que, maintenant, il n’y a plus de représentation du PQ à Québec avec le départ d’Agnès. C’est vraiment ça parce que, entre vous et moi, c’est le vide, après. Alors, dans l’histoire politique contemporaine de notre ville, c’est majeur », a-t-il déclaré lors de son passage sur la colline Parlementaire mardi.
Cela dit, M. Labeaume a salué la fougue avec laquelle Mme Maltais — seule élue péquiste dans la région de Québec — a défendu les « dossiers » de la capitale à l’Assemblée nationale et au gouvernement.
M. Lisée s’est dit étonné d’entendre un courriériste parlementaire employer l’expression « hécatombe » afin de décrire les départs annoncés dans le camp péquiste mardi. « J’ai hâte de voir […] quel mot vous allez utiliser pour » qualifier le « départ de huit députés libéraux », a-t-il lancé.
De son côté, Philippe Couillard, a dit ne pas avoir d’« indication » selon laquelle une vague de départs bouleverserait le Parti libéral du Québec. « Les périodes qui prétendent les élections, on le voit, sont toujours des périodes de remises en question », a-t-il toutefois fait remarquer.
Avec Marco Fortier, Isabelle Porter et Marie-Michèle Sioui
Agnès Maltais, députée de Taschereau
« Ma plus grande fierté est d’avoir fait de la politique dans le respect de mes valeurs, dans le respect de mes convictions, tout en osant repousser mes propres limites. Et je n’ai aucun regret. J’ai la fierté de dire que j’ai tout essayé, que j’ai tout donné. »
Alexandre Cloutier, député de Lac-Saint-Jean
« Je me suis donnée à 100 %, sept jours par semaine, durant sept mandats depuis le 5 décembre 1996. Il est temps pour moi de passer le flambeau. On sait quand entrer en politique, on ne sait jamais comment et quand en sortir. Mais on peut en sortir heureuse, la tête haute et de façon sereine. »
Nicole Léger, députée de Pointe-aux-Trembles