La commission Viens suscite attentes et optimisme dans les communautés

On l’avait réclamée, à défaut d’obtenir des accusations : la Commission d’enquête sur les relations entre les autochtones et certains services publics du Québec amorce ses travaux lundi à Val-d’Or. Elle doit porter sur les 15 dernières années et les pratiques discriminatoires ou traitements différenciés dans six services publics : police, prisons, justice, santé et services sociaux et protection de la jeunesse.
Viviane Michel, la présidente de Femmes autochtones du Québec, entrevoit ces audiences avec optimisme. Après plusieurs rencontres avec l’équipe désignée par le gouvernement, elle a constaté son souci de transmettre l’information sur son fonctionnement, ses délais, ses participants, dit-elle.
Des séances de cette commission sont pour l’instant prévues à Val-d’Or jusqu’au 20 juin. La Commission se réserve la possibilité de visiter d’autres communautés autochtones touchées ailleurs au Québec, une ouverture saluée par Mme Michel.
Le mandat est certes large, reconnaît Françoise Ruperthouse, membre du conseil de bande de Pikogan, mais il restera encore des zones d’ombre. « On se rend compte que nos droits ancestraux sont négligés », dit-elle, citant l’exemple d’hommes qui se plaignent d’être arrêtés en forêt par des agents de la faune. Mme Ruperthouse affirme elle aussi avoir pleine confiance dans les personnes sélectionnées pour siéger à cette commission, dont le président, Jacques Viens, avec qui elle a pu discuter.
La colère des derniers mois ne s’est cependant pas totalement évanouie. « Il ne faut pas oublier non plus que c’est grâce aux femmes violentées qui ont dénoncé [leurs agresseurs] qu’on en est là. Il faut continuer à travailler pour ces femmes-là, rappelle-t-elle. C’est pas juste, ce n’est pas équitable et c’est flagrant. »
Le 18 novembre dernier, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) annonçait qu’il n’allait engager aucune poursuite contre les policiers de la Sûreté du Québec (SQ) à Val-d’Or. Les preuves pour porter des accusations de sévices sexuels, d’intimidation et d’abus de pouvoir contre six patrouilleurs suspendus après la diffusion d’un reportage de l’émission Enquête avaient été jugées insuffisantes. Des réactions de colère et de désespoir n’avaient pas tardé à éclater.
L’observatrice civile indépendante Fannie Lafontaine avait conclu à une enquête du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) « impartiale », mais « insuffisante », puisque cette crise sociale était marquée « par des enjeux plus collectifs et plus systémiques ».
Après avoir refusé durant des mois de déclencher une telle commission indépendante, sous prétexte qu’Ottawa en avait déjà créé une, le premier ministre Philippe Couillard en a fait l’annonce en décembre dernier.
L’Association des policières et policiers provinciaux du Québec (APPQ) a quant à elle réitéré à plusieurs reprises son opposition à la tenue d’une telle commission, puisqu’à son avis, celle-ci « ne ferait qu’exacerber les tensions déjà existantes » entre les policiers et les autochtones.