Mont-Joli n’a pas l’intention d’abuser du pouvoir accordé

72% des contrats accordés l’an dernier en appels d’offres par la Ville de Mont-Joli auraient été donnés de gré à gré si la loi avait été en vigueur.
Photo: Jmvk Records CC 72% des contrats accordés l’an dernier en appels d’offres par la Ville de Mont-Joli auraient été donnés de gré à gré si la loi avait été en vigueur.

Ce n’est pas parce que le gouvernement leur permet de le faire que les municipalités vont donner tous les contrats de 100 000 $ sans appels d’offres, plaide la mairesse de Mont-Joli, Danielle Doyer.

À Mont-Joli, on compte d’abord faire un « test » avec les contrats sous la barre des 50 000 $, a expliqué la mairesse en entrevue au Devoir vendredi. « Pour une municipalité de notre taille, de gré à gré, 100 000 $, je ne suis pas sûre », dit-elle.

La ville de Mont-Joli compte 6600 habitants et son budget annuel est d’environ 11 millions, soit près de 100 fois moins que celui de la ville de Québec. Malgré tout, elle est ravie que le gouvernement donne aux villes qui le souhaitent la possibilité de le faire. « Ce n’est pas une obligation, c’est un pouvoir qu’on nous donne. […] Ce n’est pas parce qu’on a le droit de faire quelque chose en législation qu’on va le faire, résume-t-elle. Pour les grosses municipalités, la limite de 100 000 $, ça peut être intéressant, mais à mon idée, la plupart des municipalités vont continuer d’aller chercher plus d’une soumission. »

Le projet de loi 122, qui vise à donner plus d’autonomie aux municipalités, fait passer de 25 000 $ à 100 000 $ le montant maximal des contrats pouvant être octroyés sans appel d’offres. Certains groupes, comme la Ligue d’action civique, ont dénoncé cette mesure récemment en faisant valoir qu’il n’y aurait presque plus d’appels d’offres dans les petites villes.

Ils donnaient l’exemple de Mont-Joli, où 72 % des contrats accordés l’an dernier en appels d’offres auraient été donnés de gré à gré si la loi avait été en vigueur. Cette proportion aurait été de 25 % à Montréal.

Pour la Ligue d’action civique, le recours aux contrats de gré à gré est d’autant plus inquiétant que les petites municipalités manquent de ressources et d’expertise pour procéder à l’octroi de contrats.

Une affirmation insultante pour Mme Doyer. Outre les appels d’offres, les municipalités ont toutes sortes de règles pour encadrer les contrats municipaux, plaide-t-elle. Mont-Joli, par exemple, a entériné une politique d’achat en 2010 qui interdit les dons et encadre avec précision les relations entre le personnel de la Ville et les entreprises qui contractent avec elle.

Des règles différentes

 

Mme Doyer concède toutefois que « ce ne sont pas toutes les municipalités » qui ont une politique d’achat, en particulier les plus petites. Selon elle, le gouvernement devrait peut-être catégoriser les municipalités selon leur nombre d’habitants et permettre l’octroi de contrats de gré à gré proportionnel à la population des municipalités, comme le proposait récemment le maire de Saint-Jérôme, Stéphane Maher, dans Le Devoir.

« Est-ce que les petites municipalités ont des réglementations concernant leurs achats ? Pas souvent. […] Et la politique de gestion contractuelle, je ne suis pas sûre que les petites municipalités ou les petits villages ont ça. »

Reste à savoir si d’autres municipalités comptent ne pas aller jusqu’à la limite de 100 000 $. À l’Union des municipalités (UMQ), on n’a pas eu vent d’autres municipalités ayant prévu un test sous la barre des 50 000 $. « La plupart attendent certainement de voir ce qui sera dans le texte définitif de la loi avant de décider ce qu’elles vont faire », fait-on remarquer.

La commission parlementaire sur le projet de loi 122 s’est terminée avant la relâche et doit reprendre pour l’étude détaillée.

« Ce qui est certain cependant, c’est que désormais, pour les contrats en bas de 100 000 $, chaque municipalité aura l’autonomie nécessaire pour se doter d’une politique interne de gestion contractuelle en fonction de sa réalité propre, de la valeur et du type de contrats octroyés, etc., et justifier pourquoi elle retient telle ou telle approche », a expliqué le porte-parole de l’UMQ, Patrick Lemieux.

Les lobbies municipaux réclament depuis des années que le gouvernement leur donne plus de souplesse, notamment dans l’octroi des contrats. Pour justifier le seuil de 100 000 $ pour les appels d’offres, ils ont fait valoir que c’est ce qui est imposé aux commissions scolaires et aux ministères.

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