Stratégie sur les violences sexuelles: nécessaire, mais insuffisante

Québec a finalement annoncé, vendredi à Montréal, sa stratégie pour prévenir les violences sexuelles («Les violences sexuelles, c'est non!»), une stratégie revendiquée depuis quelques années, et qui est dévoilée quelques jours après l’affaire Sklavounos. Très attendue, cette stratégie est toutefois jugée insuffisante par les groupes communautaires et les partis d’opposition.
Cinq ministres — Lise Thériault (Condition féminine), Martin Coiteux (Sécurité publique et Affaires municipales), Stéphanie Vallée (Justice), Lucie Charlebois (Protection de la jeunesse) et Hélène David (Enseignement supérieur) — se sont déplacés au Y des femmes de Montréal, en matinée, pour annoncer différentes mesures, parmi lesquelles une escouade policière intégrée et davantage de recours aux télétémoignages dans les endroits éloignés notamment.
Une somme de 200 millions y sera consacrée sur cinq ans, mais seulement 26 millions de nouveaux investissements. Dans la plupart des cas, donc, il s’agira de mesures qui seront reconduites.
Manque de fonds
Le Regroupement des Centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (CALACS) s’est réjoui de l’annonce. Le regroupement se félicite particulièrement du recours étendu au télétémoignage, à la formation accrue des intervenants et aux rencontres préalables avec les procureurs.
Présente sur place, la vice-présidente de la CSN responsable de ces dossiers, Véronique De Sève, s’est dite « impressionnée non, mais heureuse oui, parce que depuis de nombreuses années on attend cette stratégie-là ». La CSN représente de nombreux travailleurs dans les services sociaux et les centres jeunesse, notamment.
Mme De Sève ne croit pas que les fonds octroyés seront suffisants, compte tenu des compressions budgétaires passées. « Non. Le gouvernement réinvestit, mais il a tellement coupé, que ces investissements-là, ce n’est que ce qui aurait dû être là au départ », a-t-elle commenté en entrevue avec La Presse canadienne.
Même son de cloche à la Centrale des syndicats du Québec, où la présidente Louise Chabot aurait aimé davantage d’accent sur la prévention, comme avec des cours d’éducation sexuelle généralisés dès le jeune âge, qui aborderaient la question des rapports entre les personnes.
« On va manquer de ressources encore [dans les groupes communautaires]. Ces groupes-là ont été coupés partout dans les régions, dans leur mission autonome. Et la réponse évasive qu’on a eue [de la ministre Thériault] de “ la moitié de la somme de… on ne sait pas quelle somme ”, ce n’est pas suffisant », a déploré Mme Chabot, qui représente la majorité des enseignants du préscolaire, primaire et secondaire, en plus de professionnels qui viennent en aide aux jeunes.
« Extrêmement décevant »
Du côté de Québec solidaire, la députée Manon Massé a aussi jugé insuffisantes les sommes annoncées. « On sait qu’on a un surplus budgétaire de près de 4 milliards. On attendait cette politique. On nous dit que c’est important et là, avec 5 millions par année, c’est une « joke ». Il y a là quelque chose d’extrêmement décevant », a-t-elle critiqué.
Du côté de l’opposition péquiste, la députée Mireille Jean a aussi noté « de grands absents » de cette stratégie, comme les cours d’éducation sexuelle dès le primaire. Elle déplore également l’absence de précisions quant aux moyens pour aider les femmes autochtones et quant aux ressources dont disposeront les CALACS.
« Ça fait trois ans qu’on attend [cette stratégie], on se serait attendu à plus de précisions », a-t-elle commenté en entrevue.