Cap sur le rattrapage
Après les dures compressions des deux dernières années, le gouvernement Couillard met le cap sur le rattrapage. L’équilibre budgétaire confirmé pour cette année ouvre la voie à des investissements modestes, notamment en éducation, et même à un rabais-surprise de 50 % pour les parents d’un deuxième enfant qui fréquente un service de garde subventionné.
L’éducation (3 %) et la santé (2,4 %) accaparent la plus grande partie de la croissance budgétaire, mais ces hausses sont jugées nettement insuffisantes par les partis de l’opposition. Le gouvernement investit aussi dans les infrastructures, notamment dans les écoles qui ont besoin de rénovations, et dans les transports, avec l’aide présumée d’Ottawa — prolongement de la ligne bleue du métro de Montréal et création d’un système d’autobus rapides à Québec.
Ce retour à l’équilibre budgétaire cache en réalité un surplus puisque Québec prévoit transférer 2,03 milliards dans le Fonds des générations, soit 597 millions de plus que cette année. Plutôt que de réduire le fardeau de la dette, les partis de l’opposition font valoir qu’il aurait fallu injecter ces milliards dans les services à la population, notamment les écoles et les services de garde à bout de souffle.
Des baisses d’impôt pour les contribuables auraient aussi pu donner un coup de pouce à l’économie, estime la Coalition avenir Québec (CAQ). Le gouvernement rétorque que les baisses d’impôt sont pour plus tard. Pour le moment, seuls le Québec et la Colombie-Britannique ont atteint l’équilibre budgétaire parmi les provinces canadiennes. Le gouvernement Trudeau se dirige aussi vers un déficit estimé à plus de 30 milliards de dollars, à cause notamment de la faible croissance économique et de l’effondrement des prix du pétrole.
Des efforts qui rapportent
À mi-mandat, le gouvernement Couillard affirme que les sacrifices des deux dernières années commencent à rapporter. Québec a repris le contrôle des dépenses de l’État, a atteint un équilibre budgétaire « durable » et peut investir de façon modeste dans des programmes ciblés.
« La maison est maintenant en ordre. Tous les Québécois ont consenti les efforts nécessaires. Ils peuvent profiter de finances publiques plus saines et plus solides, et le retour à l’équilibre budgétaire a été effectué au bon moment », a déclaré le ministre Leitao dans son budget déposé jeudi après-midi à l’Assemblée nationale.
« Vous me permettrez de citer aujourd’hui un autre proverbe portugais s’appliquant bien au budget 2016-2017. On a coutume de dire au Portugal“quem tem esperança sempre alcança”, ce qui signifie “celui qui garde l’espoir réussit toujours”», a-t-il ajouté.
Les dépenses globales de l’État augmenteront de 2,7 %, comparativement à 1,7 % pour l’année qui s’achève le 31 mars. Le gouvernement prévoit éviter les déficits malgré une croissance prévue de l’économie d’à peine 1,5 % en 2016.
Répit pour le service de garde
Critiqué pour la hausse des frais de garde, le gouvernement accorde un répit aux parents d’un deuxième enfant qui fréquente un service de garde subventionné. La facture pour ce deuxième enfant sera coupée de moitié de façon rétroactive à avril 2015, a annoncé le ministre Leitao.
Cette annonce vient soulager des milliers de parents qui ont eu une surprise, en cette saison des impôts : la modulation des frais de garde en fonction des revenus, annoncée l’an dernier, se fait sentir à la ligne 434 des déclarations de revenus. Sept familles sur dix qui ont des enfants en garderie devront ainsi payer des frais, en plus du tarif de 7,55 $ par jour déjà déboursé. Pour plusieurs, la facture de plus de 4000 $ est dure à digérer.
Pour faire avaler la pilule, le gouvernement Couillard éliminera comme prévu la taxe santé à compter du 31 décembre 2017. À terme, ce sont 759 millions de dollars qui resteront dans les poches de 4,5 millions de contribuables, selon Québec.
Stimuler l’économie
Pour stimuler l’économie, le gouvernement compte aussi élargir le rabais tarifaire sur l’électricité aux entreprises manufacturières et du secteur de la transformation. L’État prévoit ainsi accorder des avantages financiers de 539 millions au secteur privé. D’autres incitatifs pour encourager l’innovation, ainsi qu’une stratégie numérique de 162 millions, figurent au budget.
Québec prévoit aussi des investissements de 620 millions pour restaurer des sites miniers, et d’autres mesures pour relancer le Plan Nord. Québec prévoit aussi des sommes pour le Nunavik : construction de logements, amélioration des télécommunications et investissements dans le système de justice des Inuits font partie des priorités.
Le ministre des Finances réfute l’étiquette d’austérité qui colle au gouvernement libéral depuis son arrivée au pouvoir il y a deux ans. « On n’est pas le gouvernement de l’austérité, il n’y a pas eu d’austérité. Regardez les budgets qui s’en viennent à Terre-Neuve et en Alberta, vous verrez c’est quoi l’austérité », a dit Carlos Leitão en réponse à une journaliste, au huis clos budgétaire.