Les réfugiés scolarisés en anglais?
La ministre de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion, Kathleen Weil, a semé la confusion, mercredi, en affirmant que les commissions scolaires anglophones pourront assurer la formation professionnelle de réfugiés syriens adultes pour ensuite soutenir que tous les efforts de son ministère viseront à les diriger vers des cours en français.
En vertu de la loi 101, tous les enfants d’immigrants doivent fréquenter l’école française. Or, la Commission scolaire anglophone Lester-B.-Pearson (CSLBP) a demandé au gouvernement Couillard de permettre à des enfants de réfugiés syriens de fréquenter ses écoles en invoquant l’article 85.1 de la Charte de la langue française, qui permet des exceptions pour des raisons humanitaires.
Kathleen Weil, tout comme la ministre responsable de la Charte de la langue française, Hélène David, ont refusé, mercredi, d’accéder à cette demande. Toutefois, les immigrants, comme tous les Québécois, ont le choix de leur langue d’enseignement en ce qui a trait à la formation professionnelle, ainsi qu’au cégep et à l’université. Pour la Commission scolaire Lester-B.-Pearson, « il existe toutes sortes de possibilités en matière de formation professionnelle », a indiqué en anglais la ministre de l’Immigration lors d’une conférence de presse en matinée. « J’ai appelé la commission scolaire parce que je comprends ce désir d’aider. »
Priorité au français
Au terme de la réunion du Conseil des ministres en après-midi, Kathleen Weil tenait un discours différent. « La priorité, c’est la francisation, a-t-elle déclaré. Toutes nos actions avec les réfugiés, avec les immigrants, c’est de les orienter vers des cours de français. » Que ce soit à Montréal, à Laval ou à Longueuil, « ils sont là dans un bain linguistique français ».
On ne peut pas travailler en anglais seulement à Montréal. « Non, honnêtement, non, non. Essayez donc, si vous êtes unilingues anglophones, de trouver un emploi à Montréal », a dit la ministre. Du moins, un emploi qui exige un certain « niveau de scolarisation », a-t-elle dû préciser.
La CSLBP, dont le territoire s’étend de Verdun jusqu’à Vaudreuil-Soulanges, ne veut pas créer de précédent en accueillant des enfants d’immigrants. « La situation est extraordinaire et nous proposons donc des solutions extraordinaires », a affirmé la présidente Suanne Stein Day. Il est maintenant plutôt question d’offrir aux nouveaux arrivants qui ont plus de 16 ans des cours aux adultes et des formations professionnelles.
Des programmes de mécanique automobile, de soins de beauté, de construction, de cuisine, de métiers du secteur de la santé et bien d’autres pourraient ainsi être suivis en anglais par les réfugiés. Mme Stein Day fait valoir l’expertise de la CSLBP en matière d’enseignement du français langue seconde. La présidente évoque même la possibilité d’offrir des formations exclusivement en français. « Nous avons les ressources, si nous sommes autorisés. N’importe quoi que l’on puisse faire, nous voulons aider », insiste-t-elle.
Baisse des inscriptions
Pendant que les écoles francophones débordent dans la métropole, les commissions scolaires anglophones font face à une décroissance. Entre 2010 et 2014, les inscriptions ont diminué de 8,4 % à la Commission scolaire English Montreal et de 11,1 % à la CSLBP. À Verdun seulement, Mme Stein Day évalue que 1000 places pourraient être disponibles à brève échéance.
En conférence de presse, la ministre Weil et le ministre des Affaires municipales et de l’Occupation du territoire, Pierre Moreau, ont confirmé que le Québec accueillera 3650 réfugiés syriens d’ici la fin de l’année et le même nombre en 2016, pour un total de 7300. À cela pourraient s’ajouter 2000 réfugiés pour atteindre la part du Québec des 25 000 réfugiés que projette de recevoir Ottawa. Sur le plan de la logistique, le Québec est prêt à les accueillir. « On est capable, pourvu que l’argent du fédéral soit au rendez-vous », a prévenu la ministre.
Selon une évaluation de la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes, ces organismes auront besoin de près de 9 millions de plus pour remplir la nouvelle commande fédérale.