Un premier syndicat claque la porte

 La présidente de la FIQ, Régine Laurent
Photo: Annick MH De Carufel Le Devoir  La présidente de la FIQ, Régine Laurent

Le gouvernement Couillard a suscité la colère des infirmières et des enseignants avec le dépôt de ses offres sectorielles globales pour le renouvellement de leurs conventions collectives. La Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) a quitté la table des négociations, tandis que la Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE-CSQ) qualifie ces offres de provocation.

« Le trio formé de M. Couillard, de M. Barrette et de M. Coiteux a distribué des gifles aux 66 000 infirmières, infirmières auxiliaires, inhalothérapeutes et perfusionnistes cliniques de la FIQ », s’est indignée la présidente de la FIQ, Régine Laurent.

L’exécutif du syndicat a décidé de se retirer immédiatement des négociations et n’y retournera pas tant que le gouvernement n’aura pas présenté de « nouvelles offres réelles qui vont vraiment apporter des solutions, des offres qui seront acceptables », a indiqué Régine Laurent. Elle ne voit aucun intérêt à discuter sur ces bases patronales. « On a eu des gifles hier [mardi], ça ne nous tente pas d’aller en chercher d’autres. »

La décision de mettre un terme à la négociation pour une période indéfinie sera entérinée par les délégués de la FIQ qui se réunissent les 1er et 2 octobre. Ils auront aussi à décider d’un plan d’action qui pourrait comprendre un mandat de grève ou d’autres moyens de pression, comme de négliger la « paperasse administrative », a signalé la chef syndicale.

En huit mois de négociations, la FIQ a obtenu le retrait de certaines demandes du gouvernement, « des choses incohérentes et inapplicables », selon sa présidente. « Dans le dépôt initial, il voulait nous couper les deux bras et les deux jambes. Cette fois-ci, il nous dit : je vais vous laisser une jambe. »

Régine Laurent est d’autant plus mécontente qu’elle a rencontré le ministre de la Santé et des Services sociaux, Gaétan Barrette la semaine dernière. « Le ministre a semblé vouloir démontrer qu’il voulait aller dans notre sens, qu’il y avait une ouverture. » Mais cela ne s’est pas concrétisé.

Selon elle, Gaétan Barrette laisse « M. Coiteux faire de la récupération pour atteindre son équilibre budgétaire sur notre dos».

«Amis médecins »

Pour la FIQ, les offres sectorielles confirment le rejet par le gouvernement des solutions qu’elle présente pour améliorer l’organisation du travail et des soins. « Ce que ça dit ces offres-là, c’est : continuez de courir », avance la présidente. Elle a dénoncé l’abolition de la majoration des primes de nuit et de soir ou pour les soins critiques, ainsi que l’obligation de se déplacer à « 70, 100, 200 km de chez vous », autant d’exigences patronales.

« Par ailleurs, M. Couillard maintient les primes pour ses députés qui démissionnent », a attaqué Régine Laurent. « M. Couillard et M. Barrette n’ont pas de problème à enrichir leurs amis médecins. » Les médecins ont obtenu un relèvement de leur rémunération pour qu’elle soit comparable à celle de leurs confrères du reste du Canada, un débours de quelques milliards par an.

Mercredi, Gaétan Barrette jugeait impossible d’accorder une parité semblable aux infirmières québécoises qui gagnent sensiblement moins que leurs consoeurs des autres provinces. « Nous, on a une négociation qui est à se faire au Québec, selon les paramètres du Québec, la capacité de payer du Québec », a-t-il affirmé.

Les salaires, que le gouvernement entend geler, dépendent de la négociation avec l’ensemble du Front commun et des autres employés de l’État et ne sont donc pas abordés dans les dernières offres sectorielles. Avec ces offres, Gaétan Barrette estime que le gouvernement « a fait un pas ».

Colère et indignation chez les enseignants

 

Chez les enseignants, la FSE-CEQ n’a pas annoncé qu’elle quittait la table de négociations, mais la déception était tout aussi vive. Ces offres sont « de la totale provocation », a lancé sa présidente, Josée Scalabrini. C’est la « colère et l’indignation » qui règnent au sein de ses troupes, a-t-elle ajouté.

Selon la chef syndicale, le gouvernement veut récupérer 153 millions en modulant la taille des classes pour augmenter le nombre moyen d’élèves qu’elles accueillent.

La partie patronale insiste toujours pour mettre fin à « la valeur pondérée » des élèves en difficulté dans une classe normale, c’est-à-dire le fait qu’un élève en difficulté peut compter pour deux élèves dans le calcul de la taille des classes. « À sa face même, cet exercice en est un de compressions dans les services existants », croit la FSE-CEQ.

Le gouvernement entend également inscrire que la semaine de travail est de 40 heures. On craint que les directions d’école exigent des enseignants qu’ils demeurent à l’école pendant toutes ces heures, alors que présentement, ils sont tenus à 32 heures de présence à l’école et peuvent compléter leur tâche chez eux.

D’un calme olympien comme à son habitude, le président du Conseil du trésor, Martin Coiteux, a réagi mardi à la sortie des syndicats en prodiguant des assurances lénifiantes. « Je suis convaincu que ce qu’on a mis sur la table permet d’avoir des discussions très intéressantes et très sérieuses, pas seulement dans l’esprit du gouvernement, mais dans la nécessité de valoriser davantage le travail des infirmières, des enseignants », a-t-il dit, tout en écartant le recours à une loi spéciale pour imposer les conditions de travail des employés de l’État.

Dans le dépôt initial, il  voulait nous couper les deux bras et les deux jambes. Cette fois-ci, il nous dit : je vais vous laisser une jambe.

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