Couillard nie diriger un gouvernement prônant l’austérité
Québec — Le premier ministre Philippe Couillard refuse l'étiquette d'austérité pour qualifier le plan de compressions majeur entrepris par son gouvernement en vue d'assainir les finances publiques d'ici le prochain budget.
«La politique économique et fiscale du gouvernement continue d'être expansionniste», a assuré M. Couillard, malgré le chapelet de coupes de dépenses, hausses de tarifs et compressions de toutes sortes annoncées depuis des mois.
«L'austérité est une vue de l'esprit», a-t-il commenté, vendredi, en conférence de presse, au moment de faire le bilan de la dernière session parlementaire.
Il note qu'au sens strict du terme, le mot «austérité» s'applique quand un gouvernement dépense moins une année que l'année précédente, alors qu'au Québec, les dépenses gouvernementales continuent de croître malgré toutes les coupes effectuées et annoncées.
«On est dans une période de rigueur budgétaire qui va demeurer, qui doit être maintenant la norme au Québec», a-t-il soutenu, et ce, même quand l'équilibre budgétaire aura été atteint, normalement le printemps prochain.
Il n'est donc pas question de reporter le retour à l'équilibre budgétaire en 2015-2016, a-t-il réaffirmé. «On ne changera pas d'avis là-dessus», si certains en doutaient encore.
Pas d'augmentation d'impôts
Pour contrer l'impression que son gouvernement assainit les finances publiques en alourdissant le fardeau fiscal des contribuables, il réplique qu'il «n'y a pas eu d'augmentation d'impôts et il n'y a pas eu d'augmentation de la TVQ».
M. Couillard n'entend pas par ailleurs modifier son approche économique en matière de création d'emplois, même si le Québec a perdu près de 100 000 emplois depuis le début de l'année.
Il note des «signes intéressants» de reprise, alors que le jour même on apprenait que 19 600 emplois avaient été créés en novembre au Québec, une première tendance positive en six mois. Le taux de chômage demeure élevé mais stable à 7,6 %.
En campagne électorale, il s'était engagé à créer 250 000 emplois en cinq ans.
Bref, le gouvernement garde le cap et estime que le Québec est sur la bonne voie, a commenté M. Couillard.
Le marathon de négociations qui s'amorce avec les syndicats du secteur public se produira dans ce contexte de rigueur budgétaire absolue et les fonctionnaires ne doivent pas s'attendre à faire de gain sur le plan de la rémunération, a-t-il aussi laissé entendre.
«Il y a une conversation fondamentale à faire avec le mouvement syndical, sur la façon dont on paye les gens, le nombre de personnes qu'on paye et combien on les paye. Tout ça est en relation», a dit le premier ministre.
À l'Assemblée nationale, les travaux reprennent le 10 février.
Le prochain budget du ministre des Finances est attendu à la fin mars.
Les libéraux devront payer le prix, dit le PQ
Le gouvernement libéral devra payer le prix politique de ces hausses de taxes «généralisées», a prédit le chef intérimaire du Parti québécois, Stéphane Bédard, vendredi.
Comme il est d'usage, l'opposition officielle a dressé un bilan catastrophique des actions du gouvernement à l'ajournement des travaux parlementaires.
Promesses rompues, hausses de tarifs et de taxes, guerre menée contre les familles et les régions, aplatventrisme devant Ottawa et le pétrole, ce gouvernement ne mérite pas la confiance des Québécois, a soutenu le leader péquiste en point de presse.
«Le bilan de session est plutôt simple: comme tous les Québécois, on a l'impression de s'être fait avoir, de s'être fait passer un sapin dans la dernière campagne électorale, a lancé M. Bédard. Rarement a-t-on vu des promesses brisées aussi rapidement.»
Après avoir dénoncé en campagne électorale l'augmentation de 7 $ à 9 $ du tarif quotidien en services de garde et promis de limiter toute hausse à l'inflation, le gouvernement libéral a asséné un «coup de massue» aux familles avec la modulation des tarifs, a accusé le chef du PQ.
«La population ne doit pas avoir confiance envers des gens qui ne respectent pas leur parole, a-t-il insisté. Ce gouvernement n'aime pas les familles.»
De même, après s'être engagé à épargner les contribuables, le gouvernement de Philippe Couillard a infligé aux Québécois une pluie d'augmentations de tarifs et de taxes, a soulevé le député de Chicoutimi.
«C'est incroyable d'avoir promis une chose et faire exactement le contraire», a-t-il fulminé, rappelant que la récente mise à jour économique et financière du ministre des Finances, Carlos Leitao, a refilé une lourde facture aux contribuables.
«On parle de plus de 500 millions simplement dans la dernière mise à jour économique et il y en a d'autres qui s'en viennent dans les prochains mois avec des hausses au niveau municipal, des hausses importantes qui vont toucher la classe moyenne», a dit M. Bédard.
Pour l'opposition péquiste, la faible croissance économique aurait d inciter le gouvernement à laisser de l'oxygène aux familles, mais il a «choisi la facilité» en allant chercher des fonds dans les poches des contribuables de la classe moyenne.
Selon M. Bédard, le gouvernement s'est mis à dos la population avec ces «hausses de taxes généralisées» et devra en assumer les conséquences auprès de l'électorat.
«M. Couillard a décidé d'augmenter les taxes des familles, des Québécois, des contribuables, de différentes façons — on parle de stratagèmes — et ça, je pense qu'il y aura un prix politique très élevé», a-t-il avancé.
Un gouvernement «en attente», dit la CAQ
Face à un Parti québécois enfermé dans une logique «irresponsable» d'opposition systématique, la Coalition avenir Québec a joué son rôle de «gouvernement en attente», a fait valoir, de son côté, le chef caquiste François Legault.
«On a proposé d'abolir les élections scolaires, on aurait pu sauver 20 millions, mais les deux vieux partis ont refusé. On a proposé de faire une commission d'enquête sur les contrats informatiques, les deux vieux partis ont refusé. On a proposé de faire des nominations selon la compétence [...], les deux vieux partis ont refusé», a relaté M. Legault.
Même si elle a appuyé le gouvernement à maintes occasions, notamment pour l'adoption du controversé projet de loi 3 sur les régimes de retraite municipaux, la CAQ s'est démarquée avec sa défenses des contribuables, a estimé le député de L'Assomption.
À son avis, il aurait été possible pour le gouvernement de viser l'atteinte de l'équilibre budgétaire en sabrant dans les dépenses, sans alourdir la charge des contribuables. Mais les libéraux ont choisi une autre voie, a-t-il décrié.
«On a un gouvernement qui choisit de sacrifier la classe moyenne en amputant leur pouvoir d'achat, a déclaré M. Legault. En quelques mois, on a annoncé des hausses sur les tarifs de garde, sur les tarifs d'électricité, sur les taxes scolaires, sur l'assurance auto, sur les droits d'immatriculation. Au total, ça donne une moyenne de 1300 $ par famille.»
QS condamnde l'austérité
Québec solidaire, pour sa part, a condamné le climat d'austérité entretenu par le gouvernement libéral, ses réformes des services publics et son penchant présumé pour le pétrole de l'Alberta.
La formation de gauche redoute un retour à la charge de la société albertaine TransCanada maintenant que le site de Cacouna, choisi à l'origine pour y construire un terminal pétrolier, semble écarté au nom de la protection des bélugas.
«C'est sûr que TransCanada est un vieux loup, on n'apprend pas à un vieux singe à faire des grimaces. On pense bien qu'ils vont revenir, mais nous serons là, encore et toujours, pour continuer à résister à ce projet du XVIIIe siècle», a averti la députée Manon Massé.