Appel à un mode de scrutin proportionnel

Le taux de participation de lundi est légèrement supérieur à 71 %. Il fut de 74,6 % aux élections de 2012.
Photo: - Le Devoir Le taux de participation de lundi est légèrement supérieur à 71 %. Il fut de 74,6 % aux élections de 2012.

Une fois de plus la volonté populaire n’est pas respectée dans la répartition des sièges au Parlement, clament les défenseurs de la représentation proportionnelle. En entrevue au Devoir, le président du Mouvement démocratie nouvelle (MDN), Jean-Sébastien Dufresne, observe « qu’avec l’élection du 7 avril, la CAQ et Québec solidaire sont sous-représentés » par rapport aux votes exprimés en leur faveur. Le MDN est une association transpartisane pour une réforme du scrutin.

 

En pourcentage des votes exprimés, les résultats du Parti québécois sont parmi les plus mauvais de son histoire : 25,38 %. Le PQ récolte tout de même 30 députés, ce qui n’est pas pour autant sa plus mauvaise moisson.

 

À l’élection du 29 avril 1970, le parti fondé deux ans plus tôt par René Lévesque obtenait 23,6 % des suffrages exprimés mais seulement 7 députés, tandis que l’Union nationale obtenait 17 sièges avec seulement 19,65 % des suffrages.

 

En 1973, ce sera encore pire pour le Parti québécois. Avec 30,22 % des suffrages, le PQ n’obtenait cette fois que 6 sièges.

 

Majoritaire

 

Les distorsions ne datent pas d’hier. Au scrutin de lundi, avec seulement 2,38 % de voix de moins que le Parti québécois, la Coalition avenir Québec obtient quant à elle 8 députés de moins.

 

« On se retrouve avec un gouvernement libéral majoritaire élu avec moins de 50 % des voix, c’est-à-dire qu’il pourra gouverner en faisant le moins de compromis possible tout en ayant reçu pas même la moitié des votes », explique Jean-Sébastien Dufresne. « Dans certaines régions du Québec, comme à Laval, sur la Côte-Nord ou en Outaouais, on est devant une situation de monopolisation du pouvoir qui ne reflète pas du tout l’expression populaire : 100 % des sièges vont à un seul parti. Les citoyens n’ont pas voté pour un seul parti ! »

 

La nature du système électoral d’inspiration britannique dont le Québec a hérité conduit sans cesse à défigurer le visage du suffrage populaire. Ce système de type majoritaire uninominal est décrié depuis pratiquement un demi-siècle.

 

Dans un système dit proportionnel, chaque parti obtiendrait un nombre de sièges proportionnel au total des suffrages exprimés. Différentes variantes de ce type de scrutin existent de par le monde. Elles obligent les partis en présence à faire des coalitions et à discuter davantage des enjeux de leurs décisions, plaident les défenseurs de ce type de scrutin.

 

De quoi aurait l’air le résultat du vote de lundi avec la proportionnelle ? Ce seraient 52 sièges au PLQ au lieu de 70, 32 sièges pour le PQ au lieu de 30, 29 à la CAQ plutôt que 22, 9 sièges pour Québec solidaire alors qu’il n’en obtient que 3, puis 1 pour Option nationale qui n’en a reçu aucun. Et la même chose pour le Parti vert (PV). Un dernier siège serait attribué aux autres partis.

 

«On est dans une culture politique du gouvernement majoritaire qui pose vraiment des problèmes », explique Jean-Sébastien Dufresne. « C’est d’ailleurs pour cela que le Parti québécois a déclenché des élections : pour être majoritaire. Tout cet argent dépensé pour ça ! On doit apprendre à gouverner un pays avec plus de discussions. C’est grâce aux échanges et à la discussion qu’existe d’ailleurs une société », croit le président du MDN.

 

Pétition

 

Le 1er avril, à quelques jours de l’élection, est parue une lettre signée par 700 citoyens favorables à l’instauration d’un scrutin de type proportionnel. En tête de liste de cette lettre intitulée « Tous ensemble pour une meilleure démocratie », on trouvait des personnalités publiques aussi différentes que le chroniqueur libertarien Éric Duhaime, l’ex-syndicaliste Gérald Larose ou le philosophe Michel Seymour.

 

Selon le MDN, « le dossier de la réforme du mode de scrutin est certainement le mieux documenté de tous les dossiers qui relèvent de l’administration provinciale », mais les élus se trouvent en conflit d’intérêts devant lui.

 

Mardi, les cendres de l’élection du 7 avril n’étaient pas encore froides que circulait déjà une pétition visant à recueillir des signatures favorables à une réforme du mode de scrutin. En quelques heures, cette pétition activée par avaaz.org avait recueilli plus de 40 000 signatures.

 

Doug Baille, président de Représentation équitable au Canada, réclamait lui aussi mardi une réforme du scrutin devant les résultats de l’élection québécoise. Les résultats, dit-il, ne « reflètent pas la diversité politique » de la population.

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