Un panel divisé… à l’image des Québécois

Les électeurs invités au Devoir ont mené une discussion animée tout au long de la soirée.
Photo: Olivier Zuida - Le Devoir Les électeurs invités au Devoir ont mené une discussion animée tout au long de la soirée.

À l’image des Québécois, le panel des citoyens du Devoir s’est montré fort divisé tout au cours de la soirée, attribuant la massive victoire libérale au schisme créé par la charte et à la peur semée en cours de campagne par la question référendaire. Un seul consensus a point, finalement, en fin de soirée : une pensée partagée pour Pauline Marois, une femme politique « admirable et importante », meurtrie par une double défaite.

 

« Ça va faire un vide immense dans le paysage politique », a commenté hier Luc Constantin, l’aîné de nos panélistes. Libéraux, péquistes ou solidaires, tous ont convenu du rôle majeur joué par la chef déchue dans l’histoire politique récente.

 

La victoire de l’intimidation

 

« Les gens ont fait un vote stratégique en bloquant les péquistes et le référendum », a résumé Emmanuel Coutu, étudiant en économie, seul citoyen du panel à avoir annulé son vote lundi, surpris par l’avancée libérale.

 

Évidemment déçue, notre jeune partisane péquiste, Anaïs Valiquette L’Heureux, qui a déjà brigué les couleurs du Parti québécois dans la circonscription de Nelligan, s’est montrée amère à l’endroit du Parti libéral. À son avis, le discours de peur et d’intimidation entretenu par Philippe Couillard a visiblement fait mouche en fin de campagne, compte tenu de la victoire massive de ses troupes. « Les libéraux ont réussi à attiser la crainte des plus vulnérables en associant le référendum à l’instabilité. On n’a pas débattu d’idées, on a réveillé des démons et on ne s’est pas battu à armes égales », déplore celle qui avait prédit en début de soirée un gouvernement péquiste majoritaire.

 

Pour Shahad Salman, une Québécoise musulmane farouchement opposée à la charte qui a donné son vote au PLQ, il est clair que la position du PQ sur la charte de la laïcité a incité de nombreux immigrants, au surplus les musulmans, à tourner le dos à la formation de Pauline Marois.

 

« Je crois que le PQ a perdu la confiance des minorités ethniques, notamment des Maghrébins, dont plusieurs, avant la charte, étaient favorables au Parti québécois », avance-t-elle. À son avis, le résultat électoral traduit en partie le fait que bien des gens « tiennent aux droits et libertés de la personne », indépendamment de leur position politique. « Je n’aurais moi-même peut-être pas voté pour les libéraux à défaut de la charte. L’autre élément, je crois, c’est aussi le changement de chef, car Philippe Couillard a montré en tant que personne une authenticité que n’avait pas Jean Charest », dit Shahad Salman.

 

Inquiétudes et craintes

 

Éléonore Paré, 18 ans, future étudiante en sciences politiques à l’Université McGill, qui s’est jointe au mouvement étudiant au printemps 2012, s’étonne que les allégations faites devant la commission Charbonneau n’aient pas eu plus de prise sur l’électorat. Anaïs et Éléonore craignent d’ailleurs un retour à la case départ, notamment le retour de manifestations dans la rue et du mécontentement populaire.

 

Luc Constantin, Suisse d’origine installé au Québec depuis 14 ans, qui a finalement accordé son vote à QS, craint qu’avec l’arrivée en force des libéraux toute la lumière ne soit pas faite sur plusieurs « affaires douteuses ». Il s’inquiète aussi pour le sort de la culture, de la langue, des enjeux passés sous silence.

 

Pour Emmanuel, les miettes laissées aux tiers partis traduisent l’urgence de revoir le mode de scrutin, puisque de plus en plus de Québécois ne se reconnaissent plus dans les partis traditionnels.

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