Ranimer l’esprit du printemps érable

Pour la première fois de son histoire, Québec solidaire aura des fonds suffisants pour monter dans un autobus de campagne. Françoise David compte bien raviver les idées révolutionnaires du Québec qui s’est soulevé au printemps 2012.
Photo: - Le Devoir Pour la première fois de son histoire, Québec solidaire aura des fonds suffisants pour monter dans un autobus de campagne. Françoise David compte bien raviver les idées révolutionnaires du Québec qui s’est soulevé au printemps 2012.

La révolte étudiante du printemps 2012 a ouvert la voie à l’élection de Françoise David, deuxième députée de Québec solidaire (QS) à l’Assemblée nationale. Deux ans plus tard, elle rêve d’un autre printemps érable qui redonnerait le goût aux Québécois d’envoyer un message aux « élites ».

« Je voudrais voir l’esprit du printemps érable flotter encore au Québec », dit Françoise David, rencontrée à son bureau de circonscription, rue Beaubien Est, dans le quartier Rosemont.

« Le 22 mars, en pleine campagne électorale, marquera le deuxième anniversaire de la première grande manifestation étudiante du printemps 2012. Je voudrais que toutes les personnes qui ont pris à coeur le printemps érable se demandent : quel parti politique incarne le mieux le véritable changement économique, politique, social et culturel ? On est les seuls à l’incarner. »

Le jeune parti de gauche a 33 jours pour concrétiser ses ambitions : donner de la compagnie à Amir Khadir et Françoise David sur les banquettes de l’Assemblée nationale ; augmenter sa part de l’électorat — QS s’était contenté de 6,03 % des voix au dernier scrutin ; séduire les électeurs progressistes déçus par le recentrage du Parti québécois.

 

Une campagne à 1 million

 

Pour la première fois de sa jeune histoire, Québec solidaire a les moyens de se payer un autobus de campagne qui fera le tour du Québec. Françoise David, Amir Khadir et le président du parti, Andrés Fontecilla, se relaieront à bord de l’autocar. La tournée traversera la vingtaine de circonscriptions où QS a obtenu ses meilleurs résultats au dernier scrutin.

Le parti mènera une campagne à 1 million de dollars — loin de la limite permise de 8 millions, mais plus que les campagnes précédentes — grâce notamment aux nouvelles règles de financement, qui haussent les contributions de l’État. QS a amassé 213 000 $ auprès de ses membres en 2013, somme augmentée à 456 525 $ avec le financement public.

Le parti compte même se payer des publicités à la télé et à la radio. Une première. « On veut faire partie de l’équation, du débat public », dit Andrés Fontecilla, qui sera à nouveau candidat dans Laurier-Dorion, la circonscription qui englobe le quartier Villeray, à Montréal — il avait remporté 24,3 % des voix en 2012, un des meilleurs résultats pour QS.

En plus de Fontecilla et d’Amir Khadir (facilement réélu en 2012 dans la circonscription de Mercier avec 46,7 % des voix), les autres piliers de QS sont de retour.

Françoise David a bon espoir de se faire réélire dans Gouin, qu’elle avait arraché au député-vedette Nicolas Girard, du Parti québécois, en 2012. L’infatigable Manon Massé revient dans Sainte-Marie–Saint-Jacques, et Alexandre Leduc se représente dans Hochelaga-Maisonneuve. QS tente une fois de plus de se débarrasser de son étiquette de « parti montréalais » en présentant des candidats bien ancrés dans les régions, comme Guy Leclerc dans Rouyn-Noranda-Témiscamingue, qui aura droit à une visite de l’autobus de campagne du parti.

Secouer l’apathie

 

Québec solidaire a beau appeler à un nouveau printemps érable, la révolte citoyenne d’il y a deux ans paraît bien lointaine. Le Québec semble revenu à son petit confort tranquille. Comble de l’ironie, deux des trois visages du printemps étudiant, Léo Bureau-Blouin et Martine Desjardins, se joignent au Parti québécois — qui a augmenté les droits de scolarité.

Françoise David refuse de « personnaliser le débat », mais elle soutient que le gouvernement minoritaire de Pauline Marois mérite à son tour de se faire montrer la porte, comme les libéraux de Jean Charest en 2012. Il y a deux ans, les Québécois avaient protesté non seulement contre la hausse des droits de scolarité, mais contre un gouvernement usé à la corde. Les histoires de corruption et de financement illégal des partis politiques se multipliaient. Les Québécois avaient besoin de changement.

 

Contre le «virage à droite»

 

Cette fois, Québec solidaire soutient qu’il faut sanctionner le « virage à droite » du gouvernement péquiste. L’exploration pétrolière, les compressions budgétaires et les hausses de tarifs d’électricité et de garderies, notamment, devraient inciter les électeurs progressistes à tourner le dos au PQ, affirme Françoise David.

« Le Parti québécois, le Parti libéral et la CAQ, c’est trois variantes d’une même façon de voir l’économie et les finances publiques. Ils n’ont aucun scrupule à demander aux gens de payer plus pour obtenir moins de services publics », affirme-t-elle.

Comme à chaque rendez-vous aux urnes, Québec solidaire doit convaincre les électeurs sensibles à sa cause mais qui sont tentés d’appuyer le PQ pour toutes sortes de raisons. Que dites-vous à ces gens attirés par le « vote stratégique », Mme David ?

« Je leur dis qu’il faut une opposition très forte à gauche, sinon, mes amis, c’est à droite toute qu’on s’en va. Ça prend une barrière, un garde-fou, et le garde-fou, il s’appelle Québec solidaire. Donnez-nous-en un solide. Il nous faut bien plus que deux députés. »

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