Place au Conseil national des universités

Mandaté par le gouvernement Marois dans la foulée du Sommet sur l’enseignement supérieur, Claude Corbo propose la création d’un Conseil national des universités (CNU) indépendant qui aurait un pouvoir de recommandation auprès du ministre, mais aucun pouvoir de contrainte à l’endroit des universités.
Le ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie, Pierre Duchesne, a rendu public le rapport de Claude Corbo issu du chantier sur le CNU, rapport qu’il venait tout juste de recevoir. « J’annoncerai à l’automne les suites qui seront données ainsi que l’encadrement législatif proposé », indique le ministre dans un communiqué.
Pour Claude Corbo, il ne fait guère de doute que Pierre Duchesne créera le CNU. « Compte tenu du fait qu’il y a un consensus significatif dans le milieu sur l’opportunité de mettre en place un tel conseil, mon intuition, c’est que le ministre va vouloir aller de l’avant », a-t-il affirmé dans un entretien accordé au Devoir.
Claude Corbo recommande la création d’un organisme consultatif calqué sur le modèle du Conseil supérieur de l’éducation (CSE). Le CNU n’aurait qu’un pouvoir de recommandation parce qu’il faut préserver l’autonomie institutionnelle et intellectuelle des universités. Il faut aussi ne ravir aucun pouvoir au ministre responsable : faire autrement « serait instaurer une forme de technocratie qui répugne à l’idéal démocratique », prévient l’auteur.
« Modeste» majorité
Le CNU serait composé d’un président à temps plein nommé par le gouvernement sur recommandation du ministre pour un mandat renouvelable de cinq ans et de douze membres, tous choisis pour leur compétence et leur indépendance.
Une « modeste » majorité sera accordée au milieu universitaire. Des douze membres nommés pour un mandat de quatre ans, sept proviendraient du milieu, soit trois professeurs, un étudiant inscrit aux cycles supérieurs, un membre du personnel universitaire et deux personnes avec une expérience de direction dans une université. Cinq membres représenteraient la société civile. Le CNU serait doté d’un budget annuel de 4 millions, dont 2,5 millions pour son fonctionnement et 1,5 million pour commander des études.
Le rapport rappelle l’existence du Conseil des universités, dont l’abolition en 1993, dans un contexte de réduction des dépenses publiques a conduit d’autres instances - ministères, CSE, Conférence des recteurs et principaux des universités du Québec (CREPUQ), universités - à traiter des grands enjeux touchant les universités. « Au lieu d’avoir un lieu institutionnel mandaté pour faire un travail d’analyse et de réflexion méthodique, large et continu, d’analyse et de veille, on se retrouve avec de multiples intervenants ne travaillant pas de façon ordonnée ni coordonnée et ne bénéficiant pas de la distance, du détachement et de l’indépendance nécessaires à une réflexion aussi objective et aussi inspirée par le souci du plus grand bien collectif possible », estime Claude Corbo. La CREPUQ « est d’abord et avant tout un organisme de représentation et de défense des intérêts institutionnels des universités », rappelle-t-il.
C’est le CNU qui se chargerait de l’évaluation des nouveaux programmes et superviserait l’évaluation, faite par les universités, des programmes existants, propose le rapport. Cette tâche est dévolue à la CREPUQ à l’heure actuelle.
Si le CNU avait existé lors du conflit étudiant du printemps 2012, « ça aurait éclairé les débats », croit Claude Corbo. L’université est une institution « souvent mal connue et mal comprise » et elle « apparaît comme le terrain de conflits et d’affrontements incessants », écrit-il. « Les événements de 2012 ont pu faire apparaître encore plus mystérieuse et plus anarchique l’institution. »
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La CREPUQ renommée Bureau de la coopération universitaire
En pleine redéfinition de ses mandats, la Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec (CREPUQ) s’appellera Bureau de la coopération universitaire, a appris Le Devoir. La présidente de la CREPUQ, Luce Samoisette, a confirmé cette information, en se gardant toutefois de donner plus de détails sur les transformations qui seront effectuées au fil des rencontres du comité chargé de la refonte. Mais déjà on sait que le mandat de l’évaluation des nouveaux programmes, qui incombait en partie à la CREPUQ, sera transféré au nouveau Conseil des universités, tel qu’annoncé jeudi par le ministre de l’Enseignement supérieur. « L’objectif est de diminuer les services, c’est clair. Mais quelle en sera l’ampleur ? On n’a pas fait tous les travaux », a-t-elle indiqué, sans s’avancer sur la nouvelle structure administrative et organisationnelle. Présidé par Mme Samoisette, le comité, qui se penchera tout l’été sur le sort de la CREPUQ, est formé de Guy Breton, recteur de l’Université de Montréal, de Robert Proulx, recteur de l’UQAM, de Nelson Michaud, directeur de l’École nationale d’administration publique, et de Michel Patry, directeur de HEC. Les recommandations qui en seront issues devront être entérinées par le conseil d’administration de l’organisme.
Lisa-Marie Gervais