Le PQ veut fermer la filière de l’amiante

Le Parti québécois s’engage à annuler le prêt de 58 millions consenti par le gouvernement Charest à la mine Jeffrey d’Asbestos, affirmait mardi soir un communiqué de ce parti qui citait son porte-parole en matière de ressources naturelles, Daniel Breton.
Selon le candidat écologiste du PQ dans Sainte-Marie-Saint-Jacques, les 58 millions prêtés par Québec pour la relance de la mine Jeffrey « seront plutôt investis dans la diversification économique de la région ».
Mais contrairement à la Coalition avenir Québec, le PQ n’entend pas s’engager maintenant à interdire l’exportation d’amiante vers des pays aux normes incertaines. Le PQ projette toujours de tenir une commission parlementaire avant de trancher définitivement cette question. Les parlementaires entendraient alors experts, travailleurs, promoteurs économiques et agents économiques régionaux « afin de déterminer la manière dont nous allons prendre ce virage », ajoutait Daniel Breton.
Ce virage, l’écologiste bien connu le décrit comme aboutissant à « la fermeture de l’industrie de l’amiante au Québec » en raison des dangers de ce produit pour la santé des travailleurs, des usagers et des environnements humains où il est utilisé, nocivité qui fait consensus à l’échelle internationale.
Mais le porte-parole du PQ dans ce dossier reconnaît qu’il ne peut pas dire pour le moment comment un gouvernement Marois s’y prendra pour annuler un prêt déjà confirmé par le gouvernement Charest.
Le chef de la CAQ, François Legault, de son côté, a promis d’honorer les engagements gouvernementaux en disant que le Québec n’était pas une « république de bananes ». Mais il s’est engagé à négocier avec le bénéficiaire du « prêt » gouvernemental, la mine Jeffrey, la façon de dépenser les 58 millions consentis afin de procéder à la « reconversion industrielle » de la région de l’amiante. La CAQ, avait-il affirmé, interdira clairement l’exportation de l’amiante et son usage au Québec.
Pour le PQ, il est inadmissible de dépenser les 58 millions engagés par le gouvernement Charest dans une filière industrielle aussi risquée pour les travailleurs et les usagers d’autres pays, danger confirmé par la plupart des scientifiques et des milieux médicaux d’ici et d’ailleurs.
« Mais, précise Daniel Breton, je ne peux pas dire ce soir de quelle manière nous devrons procéder, car on n’a pas vu les textes. S’agit-il d’un contrat ferme ? D’une simple entente de principe ? On verra. Mais une chose est certaine, ils n’auront pas cet argent. » Si des textes légaux ont été signés, le PQ ira-t-il jusqu’à la loi spéciale pour abolir un tel contrat ?
« Oui, c’est ça », répond le porte-parole du PQ.
Pour Daniel Breton, le gouvernement Charest a manqué de « vision économique pour le Québec et plus particulièrement pour cette région » en accordant un prêt de 58 millions pour relancer la mine d’Asbestos. Quant à la CAQ, dit-il, elle a « manqué de cohérence » dans ce dossier.
« François Legault dit vouloir interdire de façon définitive ce produit, et du même souffle, il promet de maintenir la subvention à la mine Jeffrey. Le chef de la CAQ va à l’encontre du bon sens. Le Parti québécois s’engage d’abord à annuler la subvention, à court terme, puis à prendre une décision sur l’avenir de cette industrie après avoir fait le tour de la question avec tout le monde en commission parlementaire, question de faire un dernier tour de table avant de prendre une décision définitive », explique le porte-parole péquiste.
Examen public du dossier
Invité à dire qui, selon le PQ, gérera les 58 millions destinés à la reconversion industrielle de la région de l’amiante, Daniel Breton précise que « cela fera partie des questions qui seront discutées durant la commission parlementaire. Les gens de la région de l’amiante vont voir que les décisions définitives dans ce dossier ne seront pas prises d’en haut, mais débattues avec eux, même si c’est clair que pour nous, il faut finir par sortir le Québec de l’amiante ».
Si un gouvernement du Parti québécois peut empêcher la mine Jeffrey d’aller de l’avant avec de nouveaux projets en la privant d’aide gouvernementale, que ferait-il si des industriels décidaient de ressusciter les mines de cette région en ne comptant que sur eux-mêmes ? Est-il prêt à faire comme pour des produits jugés dangereux dans les années soixante-dix, à l’exemple des BPC, dont Ottawa a interdit par voie légale la production, la vente au pays et l’exportation à l’étranger ?
Toutes ces hypothèses seront envisagées si cela s’avère nécessaire, ce qui démontre, conclut Daniel Breton, qu’il faut absolument procéder à un examen complet et très rigoureux d’un pareil dossier en commission parlementaire pour atteindre l’objectif de sa formation politique.
La prise de position du PQ dans ce dossier traduit une évolution importante de sa position par rapport à celle des dernières semaines, alors qu’elle proposait de renvoyer tout le dossier à une commission parlementaire, à qui il appartiendrait même, le cas échéant, de décider du sort réservé au prêt gouvernemental de 58 millions.