Plan Nord: les mines et entreprises sont pour, les écologistes sont contre

Pour le chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, Ghislain Picard, le processus ayant mené au Plan Nord est incomplet et très décevant.
Photo: -Le Devoir Pour le chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, Ghislain Picard, le processus ayant mené au Plan Nord est incomplet et très décevant.

Le Plan Nord ne fait pas l’unanimité. Comme on pouvait s’y attendre, les groupes représentant les entreprises sont favorables, alors que les groupes écologistes y décèlent de nombreuses lacunes.

En entrevue, l’Association minière du Québec s’est réjouie du lancement de ce vaste projet de développement économique minier, forestier et énergétique.

Son directeur des communications et des affaires publiques, André Lavoie, souligne l’importante demande en ressources minérales provenant de la Chine et des pays émergents. Et il rappelle que comme les droits miniers ont été haussés, ce seront 1,5 milliard $ en redevances qui seront versées au Québec d’ici les cinq prochaines années.

Le défi pour l’industrie minière sera toutefois d’attirer de la main-d’oeuvre qualifiée dans ces régions éloignées et souvent rudes, admet M. Lavoie.

À la Fédération des chambres de commerce du Québec, la présidente, Françoise Bertrand, applaudit à la vision à long terme que représente le Plan Nord.

À l’opposé, les groupes écologistes rejettent le plan actuel, estimant qu’il n’offre pas de protection suffisante dans les domaines des ressources naturelles et de l’énergie.

Le directeur général de Nature Québec, Christian Simard, affirme que le Plan Nord est avant tout une plateforme pour accroître les modes de développement minier, énergétique et forestier non soutenables.

Désaccord de l’Assemblée des Premières Nations

Par ailleurs, avant même le lancement du plan cet après-midi, l’Assemblée des premières Nations avait exprimé d’importantes réserves.

Le chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, Ghislain Picard, a qualifié le processus ayant mené au Plan Nord d’incomplet et de très décevant.

En entrevue à la Presse canadienne, il a déploré le fait que toutes les Premières Nations n’ont pas été consultées, alors que le gouvernement du Québec a des obligations en ce sens.

«Le territoire dont on parle ici a été en partie l’objet de convention, la Convention de la Baie James et du Nord-Est québécois, mais il y a quand même d’autres portions de ce territoire-là qui sont encore grevées d’un titre autochtone. C’est là-dessus que nous en voulons au Plan Nord et au gouvernement du Québec parce qu’on juge qu’avec le Plan Nord, tout ce qu’on fait, c’est de contourner ces questions-là qui méritent d’être réglées», a expliqué M. Picard.

D’autres représentants autochtones ont confirmé ces objections et leurs réticences. Il en est ainsi des chefs de Pessamit, Raphaël Picard, d’Ekuanitshit, Jean-Charles Piétacho, de Uashat mak Mani-Utenam, Georges-Ernest Grégoire, de Matimekush-Lac John, Réal McKenzie, et de Unamen Shipu, George-C.S. Bâcon, qui ont fait savoir par voie de communiqué qu’ils ont «refusé d’assister au dévoilement du Plan Nord» à Lévis.

«Le gouvernement ne nous a pas consultés, alors qu’il en a l’obligation. On ne lui signera certainement pas un chèque en blanc pour exploiter nos territoires», a protesté le chef Raphaël Picard.

Certains représentants autochtones ont tout de même participé à l’annonce officielle du Plan Nord, lundi. Les Cris, notamment, estimaient que le projet est sur la bonne voie.
Le premier ministre Charest a prononcé quelques mots en langue autochtone, lors du dévoilement, parlant d’«un partenariat sans précédent entre les Premières Nations, les Inuits et les Québécois».

Pas de redevances?


Ghislain Picard affirme pourtant que le gouvernement du Québec n’est guère ouvert à l’idée de verser des redevances aux Premières Nations pour l’exploitation des richesses du territoire. «Pour la question des redevances, le gouvernement du Québec, à ce que je sache, ne veut rien savoir. Il n’a jamais été question dans nos discussions jusqu’à maintenant qu’il y ait un partage des royautés sur le développement du territoire. Ça, c’est tabou pour le gouvernement du Québec», s’est-il exclamé.

M. Picard avertit également que les Premières Nations ne se contenteront pas d’obtenir des emplois dans la construction, les mines et les chantiers développés au nord du 49e parallèle. «Les communautés autochtones méritent plus que ça», a-t-il soutenu.

Malgré son mécontentement, il n’est pas question pour l’instant de recourir aux tribunaux. «On n’est pas rendu là, sinon que de rappeler aux communautés qui sont membres de notre table que la Convention de la Baie James, si elle est devenue réalité, c’est qu’elle trouve un peu sa source dans les mouvements de contestation judiciaire à cette époque-là», a indiqué M. Picard.

Le chef de l’Assemblée des Premières Nations croit cependant qu’il n’est pas trop tard, «pas du tout», pour amorcer ou relancer des négociations dignes de ce nom avec toutes les Premières Nations.

L’Assemblée des Premières Nations regroupe les 43 chefs des Premières Nations du Québec et du Labrador.

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