Écarté du conseil des ministres - Paradis discute de son avenir avec Charest
Le sort du député de Brome-Missisquoi, Pierre Paradis, aurait été scellé hier alors qu'il rencontrait le premier ministre Jean Charest.
Le face-à-face a eu lieu à Sherbrooke après la tenue de la réunion du caucus régional de l'Estrie, à laquelle M. Paradis ne participait pas. Depuis la veille de la formation du conseil des ministres, duquel il a été écarté, Pierre Paradis n'avait pas reparlé à son chef.À quatre jours de la rentrée parlementaire, la rencontre visait à déterminer si M. Paradis reprendrait le collier ou s'il tirerait sa révérence. En début de soirée, rien n'avait encore filtré de la rencontre.
Mais selon ce qu'a appris Le Devoir, M. Charest a proposé à M. Paradis d'assumer la présidence d'un comité de travail qui pourrait par exemple porter sur la réduction de la taille de l'État ou sur la déréglementation au sein du gouvernement. M. Charest avait également un scénario en poche advenant que le choix de M. Paradis soit de partir.
Sur ce point, dans les coulisses libérales, on envoie Pierre Paradis à différents postes: délégué général du Québec à l'étranger, commissaire à la Commission des droits de la personne, voire juge. Il ne s'agit toutefois que de conjectures.
Chose certaine, la décision de mettre ce vétéran à l'écart du cabinet avait causé toute une surprise. Jean Charest avait justifié son geste en invoquant un changement de génération, de style et de ton. Pierre Paradis était pourtant perçu comme un élément incontournable de l'équipe libérale à cause de ses états de service.
Élu sans interruption depuis 23 ans, Pierre Paradis a occupé plusieurs postes de ministre. Entre 1985 et 1994, il a été successivement responsable du Travail, puis de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu. Ensuite, il est devenu ministre des Affaires municipales et de l'Habitation puis de l'Environnement. Dans l'opposition, il a été leader parlementaire.
L'éviction de M. Paradis a été associée par son entourage à la présence de Daniel Johnson auprès de Jean Charest dans la transition gouvernementale ainsi que dans la confection du conseil des ministres. M. Johnson est un vieil adversaire de M. Paradis. En 1983, Pierre Paradis avait terminé deuxième, devant M. Johnson, dans la course au leadership qui avait permis le retour de Robert Bourassa.
Il y a une dizaine de jours, M. Paradis sortait de son mutisme sans pour autant annoncer ses intentions. Cet avocat spécialisé en droit agricole a dit se laisser le temps de réfléchir. «Je suis en rechargeage de batteries en ce moment. [...] Il faut que je pense à moi et aux autres. Ce n'est pas une décision facile à prendre, mais ça ne donne rien de s'en faire. En 1983, j'étais en maudit. Aujourd'hui, à 52 ans, je suis plus philosophe. Je me dis qu'il y en a qui ont perdu leur poste de député. C'est encore pire que moi!», a-t-il expliqué.
Ainsi, le retour en Chambre dès mardi ne semblait pas créer de pressions. «Je ne vois pas le 3 juin comme une obligation. J'ai sûrement été l'un des députés les plus présents à l'Assemblée nationale depuis que je suis en politique. Je ne me sentirais pas du tout coupable de prendre une journée de congé!», a alors lancé Pierre Paradis.