Financement des partis politiques - Le pouvoir attire plus les contributeurs du PLQ que ceux du PQ

Deux partis politiques, deux réalités Moyenne annuelle des contributions totales (en millions de dollars)
Photo: Deux partis politiques, deux réalités Moyenne annuelle des contributions totales (en millions de dollars)

Les contributeurs à la caisse du Parti libéral du Québec sont deux fois plus généreux lorsque les libéraux sont au pouvoir, selon des chiffres obtenus par Le Devoir. Une situation unique, puisque les dons versés au Parti québécois ne varient presque pas lorsque le PQ passe de l'opposition au gouvernement.

Lorsque le Parti libéral formait l'opposition officielle, de 1994 à 2002, il recevait en moyenne 4,37 millions de dollars par année de la part de contributeurs. Depuis qu'il a pris le pouvoir, en 2003, les dons ont explosé. Ainsi, de 2003 à 2008, le PLQ a reçu chaque année en moyenne 8,37 millions de dollars, soit presque deux fois plus que durant son séjour dans l'opposition (voir le tableau).

La situation est différente au Parti québécois, qui a pourtant lui aussi eu l'avantage d'être au gouvernement depuis 15 ans. Ainsi, lorsqu'il était au pouvoir de 1994 à 2002, le PQ amassait en moyenne 4,68 millions de dollars par année. Une fois dans l'opposition, de 2003 à 2008, les dons ont été en moyenne de 4,83 millions de dollars par année, soit une variation minime. En fait, le PQ a reçu en moyenne plus d'argent des contributeurs depuis qu'il est dans l'opposition. Une situation tout à fait inverse de celle des libéraux.

Ces chiffres ont été obtenus à partir des états financiers des partis politiques remis au Directeur général des élections depuis 1994. Les chiffres pour 2009 ne sont pas encore connus.

Des attentes plus élevées

Réjean Pelletier, politologue à l'Université Laval, se dit «très surpris» de ces chiffres. «Cette très grande variation soulève des questions, surtout dans le contexte actuel», a-t-il dit au Devoir hier. «Visiblement, les donateurs au Parti libéral ont l'impression que c'est plus payant pour eux de contribuer à la caisse quand le parti est au pouvoir. Est-ce que certains s'attendent à des retours d'ascenseur? On peut poser la question.»

Les grandes entreprises ne peuvent pas contribuer au financement des partis politiques au Québec, mais il est de notoriété publique que leurs dirigeants sont plus près des libéraux que des péquistes, affirme Réjean Pelletier. «Visiblement, certains entrepreneurs s'attendent à plus quand le PLQ est au gouvernement. Les dons le montrent. On voit que la position du parti a un lien direct avec son financement.»

Au Parti québécois, on a fait exactement les mêmes calculs. Le PQ affirme que «le fil conducteur de toutes les controverses, c'est le financement du Parti libéral», comme l'a dit Pauline Marois sur les ondes de LCN hier avant-midi. Elle entend d'ailleurs revenir à la charge aujourd'hui en conférence de presse, notamment pour demander des modifications à la loi qui encadre le financement des partis politiques.

Les ministres à l'oeuvre

Rappelons qu'en décembre dernier Jean Charest a reconnu que chaque ministre doit amasser personnellement 100 000 $ par année pour renflouer les coffres du parti. Le premier ministre doit en faire autant. Les 26 ministres ont donc un objectif annuel de 2,6 millions de dollars. Une somme importante, qui force les ministres à entrer régulièrement en contact avec des bailleurs de fonds.

L'ex-ministre Marc Bellemare a toutefois affirmé, au cours des derniers jours, que le PLQ ne se finance pas uniquement de manière légale, puisqu'il utiliserait aussi des enveloppes bourrées d'argent comptant.

Marc Bellemare a également fait des allégations selon lesquelles les bailleurs de fonds du PLQ, visiblement généreux lorsque le parti est au pouvoir, ont leur mot à dire sur certaines nominations politiques et sur des projets de loi du gouvernement. Bref, que cette influence serait directement liée aux montants qu'ils amènent à la caisse du PLQ. Le premier ministre Charest a vigoureusement nié ces allégations et menace de poursuivre M. Bellemare.

Le DGE poursuit ses vérifications

Par ailleurs, le bureau du Directeur général des élections du Québec (DGE) a confirmé au Devoir hier que ses vérifications sur les affirmations de trois ministres se poursuivent.

En février, dans une courte période de temps, Julie Boulet (Transports), Michelle Courchesne (Éducation) et Norman MacMillan (ministre délégué aux Transports) ont tous affirmé qu'il est légal pour les entreprises de contribuer aux caisses des partis politiques, ce qui est faux.

«Notre vérification n'est pas terminée, dit Audrey Garon, porte-parole au DGE. Nous avons besoin des états financiers des circonscriptions pour poursuivre nos recherches, et les partis vont les produire seulement à la fin d'avril.» À l'époque, le DGE avait dit trouver «surprenantes» ces affirmations, surtout de la part de trois ministres différents.

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