L'énoncé économique n'impressionne guère

Photo: Agence Reuters

Preuve que les Québécois l'attendaient impatiemment, une vague de réactions a déferlé après l'annonce du plan de crise de la ministre des Finances, hier. Critiques, déceptions et quelques réjouissances.

Déception: le mot était sur toutes les lèvres des intervenants des organisations sociales et communautaires. Le Front d'action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) considère que Monique Jérôme-Forget a «oublié les locataires». Le coordonnateur, François Saillant, s'est indigné que l'énoncé économique ne mentionne que les propriétaires: «Qui a le plus besoin d'aide? Les propriétaires, qui ont un revenu médian de 62 205$ par année, ou les locataires, qui ne gagnent en moyenne que 29 426$?» Dans la même veine, la porte-parole de la Coalition pour l'habitation communautaire, Édith Cyr, s'explique mal l'absence du développement du logement communautaire dans l'énoncé, alors que «les mesures de soutien à l'économie doivent venir en aide aux ménages les plus vulnérables». Le Chantier de l'économie sociale l'a secondée, affirmant que «l'immobilier collectif apparaît tout désigné pour amortir plusieurs des effets les plus néfastes de la crise, et l'énoncé économique aurait été le moment tout indiqué pour concrétiser [la promesse du gouvernement libéral en faveur de 3000 nouveaux appartements sociaux par année]».

***

Équiterre a déploré le «manque de vision» du gouvernement, soulignant que celui-ci aurait pu suivre la voie du président élu Barack Obama dans son plan de sauvetage de l'économie. L'organisme environnemental juge que les 250 millions de dollars de mesures fiscales visant à soutenir les travaux de rénovation résidentielle auraient pu cibler l'amélioration du bilan énergétique des demeures. Aussi, Équiterre se désole que «les transports collectifs aient encore une fois été laissés de côté au profit des infrastructures routières». C'était l'occasion d'investir dans les technologies vertes, estime également la Centrale des syndicats du Québec (CSQ).

***

«La ministre Jérôme-Forget rêve en couleur si elle s'imagine que les mesures frileuses qu'elle annonce auront un effet marquant sur les objectifs visés», a déclaré Lina Bonamie, présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ), qui représente les professionnels en soins infirmiers et cardiorespiratoires. Selon la FIQ, la ministre «répète les mesures annoncées en novembre», nettement insuffisantes pour protéger les emplois, soutenir le pouvoir d'achat et aider les entreprises, ainsi qu'épauler les travailleurs mis au chômage.

***

Le Syndicat de la fonction publique du Québec (SPFQ) et la CSQ ont salué la hausse du salaire minimum. Par contre, la présidente générale de la SPFQ, Lucie Martineau, estime qu'une action plus ambitieuse du gouvernement était nécessaire pour diminuer l'impact de la crise sur la population. Du côté de la CSQ, son président, Réjean Parent, n'a pas mâché ses mots, affirmant que «[l'énoncé économique] est une mise en scène inutile et opportuniste pour annoncer des mesures modestes, déjà annoncées en campagne électorale». Il attendait une aide à la formation des travailleurs ainsi qu'un appui aux travailleurs âgés qui se retrouveront au chômage.

***

Si la hausse du salaire minimum plaît aux uns, elle inquiète les commerçants. Le Conseil québécois du commerce de détail (CQCD) considère que la mesure entraînera une diminution du nombre d'employés et des heures travaillées chez les détaillants. Même son de cloche du côté des PME. La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI) croit qu'elle sera accueillie avec froideur par les dirigeants, qui ne «peuvent absorber des augmentations de leurs coûts de fonctionnement au moment où les clients se font de plus en plus rares». Audrey Azoulay, analyste principale des politiques, souligne que «le gouvernement a négligé de répondre à la demande fondamentale des PME, soit la réduction de leur fardeau fiscal».

***

La CSQ a salué les mesures d'assouplissement des règles régissant les régimes de retraite et permettant d'assurer la solvabilité des caisses de retraite, mais l'Association québécoise des retraités (AQRP) ne partageait pas son enthousiasme. «L'énoncé économique [...] ne contient aucune nouvelle mesure importante pour contrer les effets de la crise financière sur les retraités du Québec, ni sur les 234 000 retraités des secteurs publics et parapublics du Québec et leurs proches», estime la présidente de l'AQRP, Madelaine Michaud.

***

Les secteurs municipal et immobilier se sont montrés généralement favorables aux mesures annoncées. La Fédération québécoise des municipalités (FMQ) et l'Union des municipalités du Québec (UMQ) sont satisfaites des nouveaux investissements dans les infrastructures, mais la FMQ craint que l'économie des régions ne soit mise de côté. Au contraire, la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec (CORPIQ) et l'Association provinciale des constructeurs d'habitation (APCHQ) sont d'avis que les propriétaires attendaient beaucoup plus que les crédits d'impôt favorisant la rénovation résidentielle, alors que la Fédération des chambres immobilières du Québec a réagi positivement, parlant de «bonne mesure pour les vendeurs et les acheteurs».

***

La bonification des crédits d'impôt pour leur secteur a réjoui le Bureau du cinéma et de la télévision du Québec (BCTQ). Pour le Commissaire national Hans Fraikin, cette action concrète et rapide bénéficiera à «l'ensemble de l'industrie, tant à court qu'à long terme».

À voir en vidéo