Les écologistes rechignent à s'inscrire comme lobbyistes
Le milieu environnemental québécois était sous le choc hier lorsqu'il a pris connaissance de la proposition du commissaire du lobbyisme, André Côté, d'assujettir les grands groupes environnementaux à la loi.
Le commissaire Côté a recommandé mercredi aux parlementaires d'amender la loi pour étoffer la liste actuelle des organismes qui poursuivent des fins «financières, économiques ou professionnelles» afin d'inclure des organismes sans but lucratif dotés de solides moyens financiers comme Greenpeace et Équiterre. Selon le commissaire Côté, certains de ces groupes s'enregistrent à titre de lobbyistes à Ottawa et en Ontario mais pas au Québec.Il estime qu'il faudrait aussi assujettir à la loi des organismes comme la Croix-Rouge, les sociétés de lutte contre le cancer, le Congrès juif du Canada, l'Association des universités et collèges ou l'Association du hockey mineur.
«Il est difficile de voir où s'en va le commissaire Côté avec sa proposition, de comprendre quels abus il veut corriger, quelle iniquité il veut rétablir», a expliqué Christian Simard, de Nature Québec. «Quand on représente les sans-voix que sont les poissons et les oiseaux dans le débat sur les politiques publiques qui les touchent, quand on représente la Terre et ses écosystèmes, on ne cherche aucun avantage pour nos membres ou nos organismes. Nos fonds proviennent de programmes publics. Encadrer et débattre de nos demandes de subvention ne constitue pas du lobbying. On se demande aussi si ce statut de lobbyiste pourrait nous faire perdre notre statut d'organisme charitable, car l'essentiel de notre travail, c'est de faire de la sensibilisation auprès du public et d'offrir des services d'information, etc.»
André Bélisle, de l'Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA), répond qu'il n'a pas un sou à consacrer à un enregistrement à titre de lobbyiste.
«Tout ce qu'on fait est public, a-t-il dit. Quand des fonctionnaires nous invitent à leur expliquer nos positions, on le fait pour faciliter leur travail d'analyse. Mais cela prolonge tout simplement notre participation au débat public sur des politiques publiques. Évidemment, on est pour la transparence, et c'est clair qu'on tente d'influencer l'évolution des politiques, mais on le fait en public, pour le public et par la pression publique. Difficile d'être plus transparent et moins lobbyiste.»
Chez Greenpeace, Jocelyn Desjardins s'est lui aussi dit en faveur de la transparence, mais il se demande comment son organisme pourrait l'être davantage, car toutes ses positions sur les politiques publiques sont médiatisées. À une occasion, Greenpeace Canada a pu faire appel à un lobbyiste du côté fédéral. Mais au Québec, a-t-il ajouté, ce n'est pas le cas, et il se demande comment le commissaire Côté a pu se convaincre du contraire.