Lucien Bouchard se garde bien de jouer le rôle de belle-mère
C'est un Lucien Bouchard visiblement mal à l'aise qui a refusé hier de commenter la campagne électorale québécoise.
L'ancien premier ministre péquiste, qui fait généralement preuve de réserve depuis son départ de la politique, en 2001, a invoqué la tenue du débat télévisé, hier soir, pour justifier son mutisme.Après un discours prononcé devant le Forum coopératif 2007, à Montréal, un homme qui s'est présenté comme l'adjoint du recteur de l'Université de Sherbrooke a demandé à M. Bouchard de se prononcer sur le «prochain gouvernement».
«Ça commence à glisser, prochain gouvernement!», a répondu l'ex-politicien, suscitant les rires des quelque 200 convives.
«Je ne veux absolument pas que ce soir, dans le débat, il y ait quelqu'un qui dise: ah! Bouchard a dit telle chose et puis là... Non. Vous comprenez mon souci.»
Il faisait bien sûr allusion à une déclaration ambiguë faite par l'ancien chef péquiste Jacques Parizeau le jour même du débat télévisé de 2003, que le chef libéral Jean Charest n'avait pas hésité à exploiter et qui, selon plusieurs, lui avait permis de gagner la joute. Les propos de M. Parizeau touchaient au référendum de 1995.
«Je ne voudrais pas, à ce moment-ci de notre vie collective qui est très intense, jouer au rôle de belle-mère», a prévenu Lucien Bouchard, déridant une fois de plus l'assistance.
Devant les journalistes, par la suite, il s'est montré encore plus circonspect.
«Honnêtement, je ne pense pas que je puisse vous parler de quoi que ce soit sans glisser, alors le mieux, c'est de m'abstenir, a-t-il affirmé. [...] Vous pouvez tout me demander, mais je ne répondrai pas à grand-chose.»
L'ancien premier ministre a soutenu qu'il agissait ainsi «moins par vertu que par prudence».
En entrevue avec Christiane Charette à Radio-Canada, le mois dernier, Lucien Bouchard avait expliqué sa réticence à intervenir dans le débat politique.
«C'est par égoïsme rétroactif, avait-il dit. Parce que moi, j'ai vécu des situations où des gens me l'ont fait. Je sais ce que c'est que d'être en politique et de se faire tirer dans les jarrets par quelqu'un qui est bien assis chez lui, les pieds dans les pantoufles et qui dit: "Tu pourrais faire ci, tu pourrais faire ça." Ça m'a été fait, moi. Souvent. J'en ai beaucoup souffert et je n'ai jamais répliqué. [...] Je ne le fais pas aux autres, même pas aux adversaires. C'est déjà assez dur comme ça de gérer la vie publique [...] je veux donner la chance à ceux qui sont là. Je ne veux pas leur nuire.»
Dans son allocution d'hier, M. Bouchard, qui est avocat au cabinet Davies, Ward, Phillips et Vineberg, a vanté les mérites des coopératives pour l'économie québécoise.