Stratégies et tactiques seront au centre des préoccupations des partis - Le long droit

Louise Harel reprendra du collier en tant que présidente de l’Assemblée nationale, mardi.
Photo: La Presse canadienne (photo) Louise Harel reprendra du collier en tant que présidente de l’Assemblée nationale, mardi.

Québec - Il ne reste plus que 265 jours pour la tenue des prochaines élections générales au Québec, s'il faut en croire le décompte de 300 jours déclenché par le premier ministre Bernard Landry à l'occasion du dernier Conseil national du Parti québécois. C'est indéniablement dans une atmosphère pré-électorale que s'ouvre la présente session parlementaire à l'Assemblée nationale. Dans une longue course à trois qui testera la résistance de chacun des partis, les débats enflammés sur le menu législatif céderont le pas aux stratégies et tactiques pré-électorales et aux discussions entourant les programmes partisans.

Dernier dans les sondages à l'échelle du Québec mais deuxième, aux dernières nouvelles, dans les circonscriptions francophones, le PQ a l'avantage de la glace puisqu'il tient les rênes du gouvernement.

On veut donc projeter l'image d'un gouvernement en mouvement, qui sait éviter les affres de la sclérose et le manque d'imagination politique. Le gouvernement Landry a ainsi concocté un plan d'action en plusieurs volets portant sur la santé, l'éducation, le plein emploi et la lutte à la pauvreté, l'environnement, les régions et une fonction publique au service des citoyens. Il y a aussi ce délai de 1000 jours, auquel il ne reste plus que 965 jours, pour faire du Québec un pays souverain. L'échéance nous reporte après les élections, une question négligeable lancée en pâture aux militants et occultée par la realpolitik. Qui plus est, Bernard Landry a beau parler de souveraineté dans les tournées régionales qu'il a entreprises, ses propos à ce sujet ne sont pas repris par les médias régionaux, admet-il lui-même.

La pauvreté

On connaît déjà l'élément fondamental de la stratégie gouvernementale de lutte contre la pauvreté: un projet de loi que les parlementaires continueront à étudier et qui a suscité une pléthore de mémoires — plus de 150 —, ce qui nous réserve des heures et des heures de discussions en commission parlementaire. On connaît également les grandes lignes de la stratégie du gouvernement en matière d'éducation: rénover en profondeur l'école secondaire publique pour la rendre semblable aux collèges classiques dont Bernard Landry est le pur produit, sans la mentalité dépassée qui caractérisait ces institutions, a-t-il précisé.

La santé

Le fin détail du plan d'action gouvernemental sera dévoilé à la fin du mois. Mais tous les yeux seront braqués sur le plan d'action en santé que présentera le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux, François Legault. Alors que l'Action démocratique du Québec préconise une médecine à deux vitesses s'appuyant sur un recours au secteur privé et sur l'infusion de l'argent des riches pour régler le problème de sous-financement du système public de santé, le gouvernement Landry n'a toujours rien à proposer à court terme. Seule l'élimination du déséquilibre fiscal lui sert de bouée de sauvetage, mais on doute que le gouvernement fédéral lâchera le morceau pour des raisons d'influence politique et de visibilité. Préoccupation centrale dans l'opinion publique, la santé demeurera au coeur des débats parlementaires, d'autant plus que, du côté du fédéral, Roy Romanow déposera son rapport en novembre.

Chose certaine, le plan d'action de François Legault s'accompagnera d'une facture salée que le gouvernement ne pourra éponger dans l'immédiat compte tenu de l'état de la précarité des finances publiques québécoises. Ni infirmé ni confirmé, le montant de 1,5 milliard en réinvestissement fut celui qu'avait évoqué au printemps le ministre lui-même devant l'association des hôpitaux. La solution aux problèmes récurrents des urgences réside dans la mise à niveau des soins à domicile — une note de 300 millions au bas mot — et dans l'établissement de ces fameux groupes de médecine familiale (GMF) dont l'implantation engouffrera de fortes sommes. Bref, ne serait-ce que pour réaliser des économies, le gouvernement doit faire des investissements.

C'est pourquoi François Legault entend lancer un vaste débat sur le financement du réseau public de santé. Plutôt qu'un système à deux vitesses, l'idée de créer une caisse santé, ou encore une caisse d'assurance-vieillesse, pour sauver le système public sera mise sur la table, comme le recommandait d'ailleurs la commission Clair.

Le gouvernement table sur une entente négociée avec les médecins pour déposer à l'automne un projet de loi sur la répartition des effectifs médicaux à la grandeur du territoire québécois. Il cherchera à faire oublier la loi 114 — et ses huissiers — qui force les médecins à pratiquer dans les urgences. Dotée d'une disposition de temporisation (clause «crépusculaire»), cette loi devient caduque à la fin de l'année.

Le gouvernement Landry a prévu deux «grands-messes» pour retrouver l'impulsion perdue il y a belle lurette. Le Forum national sur le déséquilibre fiscal s'est soldé par son consensus unanime obtenu à l'arraché. Le gouvernement compte surtout sur l'union des provinces sur cette question, ce qui a déjà forcé le premier ministre Jean Chrétien à tenir une conférence fédérale-provinciale au début de l'an prochain.

Courtiser les régions

Péquistes, libéraux et adéquistes savent bien que la prochaine campagne électorale se jouera largement en région. Bien assis sur environ 35 des 50 circonscriptions qu'ils occupent, les libéraux doivent faire d'énormes progrès en région s'ils veulent accéder au pouvoir. Jean Charest a indiqué que les députés libéraux partageraient leur temps entre les tournées en région et leur travail d'opposition. Les libéraux soutiennent qu'avec leurs 51 députés à l'Assemblée nationale, ils pourront jouer pleinement ce dernier rôle, mais il est permis d'en douter.

Pour le gouvernement, le Rendez-vous des régions qui aura lieu à la mi-novembre tombe à point. Il pourra miser sur sa feuille de route en matière de développement économique et sur ses promesses de décentralisation. Le premier ministre y proposera la création d'une Chambre des régions, formée d'élus et dotée d'un pouvoir de taxation.

Avant tout, la session sera marquée par l'arrivée d'une opposition adéquiste comptant sur cinq députés, ce qui bouleversera la dynamique à l'Assemblée nationale. Comme l'ADQ peut sérieusement aspirer à prendre le pouvoir, ses députés devront se prononcer sur les questions de l'heure dans une optique de gouvernement. Leurs positions seront autant d'engagements d'un prochain gouvernement adéquiste. Toute une commande pour une équipe aussi réduite.

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