Politique de gouvernance des sociétés d'État - Les nominations partisanes continueront

Québec — Le gouvernement Charest continuera à procéder à des nominations politiques au sein des conseils d'administration des sociétés d'État mais les candidats devront désormais correspondre à des «profils» afin de s'assurer qu'ils possèdent un minimum de compétences.

Le ministre des Finances, Michel Audet, a présenté hier son énoncé de politique sur la gouvernance de sociétés d'État, énoncé qu'il promettait depuis plus d'un an. «Le gouvernement qui est au pouvoir, donc celui qui exerce les fonctions de gouvernement, garde son privilège d'actionnaire», a souligné M. Audet au cours d'une conférence de presse. «Donc, le privilège d'actionnaire, c'est de nommer les administrateurs.»

Des amis du régime pourront donc être nommés à ces conseils, mais le gouvernement devra consulter les conseils qui auront établi au préalable les profils de savoir-faire et d'expérience des candidats recherchés.

«Depuis la Révolution tranquille, c'est la première fois qu'une mise à jour aussi importante et globale est effectuée aux règles de gouvernance des sociétés d'État», a fait valoir Michel Audet. Le Québec sera «à l'avant-garde de ce qui se fait en Amérique du Nord».

Ainsi, d'ici cinq ans, la moitié des membres des conseils d'administration des plus importantes sociétés d'État du Québec seront des femmes. Dans les 24 sociétés d'État visées par l'énoncé de politique, les femmes occupent à l'heure actuelle 28 % des postes au conseil.

L'énoncé de politique débouchera sur un projet de loi qui s'appliquera à six sociétés d'État à caractère financier et commercial, soit Hydro-Québec, Investissement Québec, la Société d'assurance automobile du Québec (SAAQ), la Société des alcools du Québec (SAQ), Loto-Québec et la Société générale de financement du Québec. La Caisse de dépôt et placement du Québec, dont la loi constitutive a été modifiée en décembre 2004, est déjà soumise à la plupart des règles contenues dans l'énoncé de politique. Pour les 17 autres sociétés d'État, des projets de loi seront déposés d'ici la fin de 2007 afin d'édicter des règles qui leur seront adaptées.

D'une façon générale, les nouvelles règles de régie visent à renforcer les conseils des sociétés mais, en même temps, le gouvernement exercera un meilleur contrôle sur les sociétés. Ces règles s'inspirent largement de celles instaurées au sein des grandes sociétés privées à la suite des scandales d'Enron et de WorldCom.

Aussi, le gouvernement se réserve le pouvoir de donner des directives à toutes les sociétés d'État afin d'influer sur leurs orientations et leurs pratiques si besoin est.

Les administrateurs des six sociétés visées ne seront plus des bénévoles. Ils seront rémunérés selon un modèle inspiré du gouvernement fédéral. La rémunération de base pourrait être de 2000 à 10 000 $ par an, somme à laquelle s'ajoutent des jetons de présence de 200 à 800 $ par jour, pour une rémunération qui pourrait varier de 12 000 à 20 000 $ par an, a indiqué M. Audet.

Comme c'est maintenant le cas à la Caisse de dépôt et à Hydro-Québec, le poste de président du conseil et celui de président et chef de la direction ne pourront pas être occupés par la même personne. Le président et chef de la direction sera nommé par le gouvernement, mais sur recommandation du conseil.

Les conseils devront être composés d'administrateurs indépendants. Cela signifie qu'ils ne devront pas avoir été à l'emploi de la société au cours des trois années précédentes, être des employés de l'État ou entretenir des liens d'affaires avec la société. Aucun d'eux ne se contentera d'être un simple observateurs; tous auront le droit de vote, y compris les représentants des gouvernements.

L'État ne se fera plus prendre au dépourvu comme ce fut le cas avec la SAQ. Le gouvernement devra approuver les plans stratégiques des sociétés d'État, tels que soumis par leur conseil, ainsi que la politique de rémunération variable, c'est-à-dire les bonis. Il n'y aura plus de bonis versés si la société n'est pas rentable.

Le vérificateur général du Québec aura graduellement le mandat de vérifier les états financiers de toutes les sociétés d'État. Pour les six sociétés visées d'emblée, le vérificateur général s'associera à un vérificateur privé pour faire une «covérification». Il ne pourra toutefois pas faire une vérification «d'optimisation», comme il le réclamait pour la Caisse de dépôt, par exemple. La responsabilité pleine et entière de l'optimisation restera entre les mains du conseil.

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