Le SIM avait mis sur pause certains dossiers judiciarisés

Le Service de sécurité incendie de Montréal (SIM) assure qu’il n’a jamais réduit le rythme des inspections en prévention dans les bâtiments, mais qu’en 2018, il a mis en suspens certaines procédures dans le cas de dossiers judiciarisés plus complexes.
Le directeur du SIM, M. Richard Liebmann, a jugé bon de faire le point en fin de journée mardi afin de tenter de clarifier certains aspects du dossier. En matinée, à la suite d’un article publié par le Globe and Mail, la mairesse Valérie Plante avait soutenu qu’un moratoire sur les enquêtes concernant les voies d’évacuation des immeubles avait été instauré par le SIM en 2018, mais qu’il avait été levé en 2021, et non dans les jours suivant l’incendie du Vieux-Montréal qui a fait sept morts le 16 mars dernier.
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Dans les faits, soutient Richard Liebmann, le SIM a dû renoncer à partir de 2018 à envoyer à la cour certains dossiers de non-conformité des bâtiments qui nécessitaient une expertise plus poussée compte tenu de la difficulté de gagner les causes contre les propriétaires délinquants. « C’est seulement certains types d’anomalies qui faisaient l’objet d’un moratoire, a-t-il dit. Ce sont les poursuites pénales qu’on a suspendues pour être capables de rehausser notre niveau d’expertise et nous assurer que si on poursuit avec une procédure pénale, on va être capables de forcer le retour à la conformité. »
Cette mise sur pause touchait certains dossiers de voies d’évacuation non conformes ou de systèmes d’alarme incendie, a indiqué Chantal Bibeau, directrice adjointe au SIM.
Le SIM dit avoir élaboré une nouvelle stratégie — toujours en cours d’implantation — et utiliser d’autres outils, comme des mises en demeure, pour obliger les propriétaires à rendre leur immeuble conforme.
M. Liebmann n’a cependant pas voulu dire si cette situation avait eu un impact sur le dossier de l’immeuble incendié en mars dernier en raison de l’enquête menée par le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) et celle à venir du Bureau du coroner. Chantal Bibeau s’est limitée à dire que le dossier de l’immeuble de la place D’Youville, qui avait fait l’objet de signalements et qui était géré en collaboration avec la Régie du bâtiment du Québec, était toujours actif.
The Globe and Mail rapportait lundi qu’à la suite de l’incendie du Vieux-Montréal, le SIM aurait discrètement levé le moratoire en place depuis 2018 sur les enquêtes concernant les voies d’évacuation des immeubles. Selon le quotidien, ce moratoire aurait été décrété en raison d’un manque de formation du personnel. Il faisait en sorte que les pompiers n’appliquaient plus les normes de sécurité sur les voies d’évacuation des immeubles sur son territoire.
Des lacunes décelées dès 2009 ?
Selon les révélations du Globe, une inspectrice du SIM aurait décelé dès 2009 des lacunes dans l’immeuble de la place d’Youville qui a été la proie des flammes en mars dernier, causant sept morts et faisant plusieurs blessés. Cette inspectrice aurait recensé des couloirs sans issues et un nombre insuffisant de sorties. Aucun document au dossier ne démontre que les problèmes ont été corrigés, selon le quotidien.
En 2018, l’inspectrice aurait de nouveau tenté de signaler des problèmes concernant l’absence d’une deuxième sortie au troisième étage et un couloir sans issues au deuxième étage, souligne le quotidien. D’abord approuvée, la demande aurait finalement été refusée en 2021 en raison du moratoire. Mardi matin, la mairesse Plante s’était dite préoccupée par ces révélations. « Ça nous a énormément préoccupés. […] Parce que la sécurité, il ne faut pas lésiner avec ça, a-t-elle déclaré. La Ville de Montréal a toujours investi au sein du SIM. On a engagé plein de nouveaux inspecteurs, des préventionnistes. Donc, tous les efforts sont déployés, mais s’il y a à faire plus, évidemment qu’on va le faire, selon les informations que le Service des incendies nous donne. »
Rappelons qu’en avril, Québec a ordonné la tenue d’une enquête publique du coroner sur l’incendie du Vieux-Montréal afin de faire la lumière sur les circonstances de cette tragédie.