Montréal veut moins de «chantiers fantômes» et de cônes orange

Montréal propose d’imposer des délais plus serrés d’installation et de démontage de la signalisation sur les sites de travaux.
Annik MH de Carufel Archives Le Devoir Montréal propose d’imposer des délais plus serrés d’installation et de démontage de la signalisation sur les sites de travaux.

Montréal veut réduire le nombre de « chantiers fantômes » et de cônes orange en ville. Pour y parvenir, elle entend serrer la vis aux entrepreneurs et donneurs d’ouvrage et hausser les amendes à ceux qui laissent leurs chantiers inactifs. À l’issue du Sommet sur les chantiers tenu jeudi, la Ville a indiqué qu’elle souhaitait que des règles plus sévères s’appliquent dès cet été.

La Ville avait invité des partenaires — parmi lesquels des promoteurs immobiliers, des entrepreneurs et des experts — à un sommet afin de trouver des solutions aux nombreux maux que causent les chantiers à Montréal. Afin de lancer les discussions, la Ville avait formulé une série de propositions.

Meilleur encadrement

L’une d'elles vise à imposer un délai maximal de 12 heures aux entrepreneurs et aux donneurs d’ouvrage pour l’installation et le démontage de la signalisation des chantiers afin de libérer plus rapidement la voie publique et les trottoirs entravés. « Si un arrondissement donne un permis de cinq jours, ce n’est pas normal de voir un trottoir bloqué pendant trois semaines », a souligné la mairesse en début de journée.

Certains chantiers doivent parfois être suspendus pour diverses raisons, dont un retard dans la livraison d’équipements, mais la Ville envisage d’octroyer davantage de pouvoirs à l’Escouade mobilité afin que celle-ci puisse, si elle le juge approprié, retirer les permis d’occupation du domaine public après deux avis d’inactivité non justifiés. La valeur des constats d’infraction émis par l’Escouade mobilité pourrait aussi être augmentée, suggère la Ville.

Montréal dispose déjà d’une plateforme appelée AGIR (Assistant à la gestion des interventions dans la rue) qui regroupe tous les permis d’occupation du domaine public sur le territoire. Mais cela ne suffit pas.

La Ville entend donc exiger des gestionnaires de chantiers un plan de maintien de la circulation comme condition pour l’obtention d’un permis sur les artères jugées prioritaires. Ce plan sera analysé par la ville centre, et pas uniquement par les arrondissements, a précisé la mairesse.

Cônes orange orphelins

Finalement, les cônes orange sont omniprésents dans les rues de la métropole, mais ils ne sont pas tous indispensables, estime la Ville. Montréal voudrait donc convenir avec le ministère des Transports et de la Mobilité durable du Québec (MTMD) de solutions pour mieux adapter la signalisation routière au contexte urbain de la métropole.

Non seulement ces cônes orange sont trop nombreux, mais ils sont trop volumineux. La Ville croit que des bollards de plus petite taille pourraient remplacer ces cônes orange dans certains secteurs. De plus, les équipements de signalisation, incluant les cônes orange, pourraient être identifiés à l’aide d’une puce ou d’un code QR afin de retrouver plus facilement leur propriétaire lorsqu’ils sont laissés à l’abandon sur le domaine public.

En 2022, quelque 55 000 permis ont été émis pour l’occupation du domaine public sur le territoire montréalais, dont 42 % pour les chantiers de la Ville, 34 % pour des projets privés et 20 % pour les compagnies d’utilité publique, a précisé Nathalie Martel, directrice du Service des infrastructures du réseau routier de la Ville de Montréal.

Au terme des ateliers et des discussions qui se sont déroulés toute la journée à huis clos, la responsable des infrastructures au comité exécutif, Émilie Thuillier, a indiqué que certaines propositions avaient fait consensus, mais que d’autres devraient être ajustées. À titre d’exemple, les entrepreneurs ont jugé qu’un délai de 24 heures, au lieu de 12, était nécessaire pour préparer un chantier et installer la signalisation.

« Notre intention est d’agir de façon très concrète et de rendre ces balises obligatoires dès cet été », a dit Mme Thuillier. « Un comité de suivi sera mis en place dans les prochaines semaines. »

Son collègue Luc Rabouin, responsable du développement économique au comité exécutif, a soutenu que la Ville serait rigoureuse dans l’application des règles. « On se donne des pouvoirs pour démobiliser des chantiers fantômes dans lesquels il ne se passe rien. On va pouvoir leur enlever leur permis », a-t-il dit. « On a beaucoup travaillé à convaincre, solliciter et à mobiliser. Maintenant, on change d’époque. Ce n’est plus volontaire. On va avoir une règle de signalisation, on va l’appliquer et il va y avoir des conséquences pour ceux qui ne la respectent pas. »

Élu d’Ensemble Montréal et maire de l’arrondissement de Saint-Laurent, Alan DeSousa juge que l’administration de Projet Montréal a trop tardé à agir. Pourtant, elle avait déjà obtenu plusieurs avis, dont ceux de la Chambre de commerce du Montréal Métropolitain (CCMM) et la vérificatrice générale, et aurait pu mettre en place des mesures pour améliorer la coordination et la planification des chantiers bien avant ce sommet, dit-il. « On ne peut pas gérer une ville avec des sommets. Mais on peut gérer une ville en agissant rapidement et quand l’occasion se présente. »

L’élu de l’opposition doute que les cônes orange disparaîtront du jour au lendemain.

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