Valérie Plante accuse Québec d’ignorer la crise du logement

« Ce qui me désole, c’est que le logement social soit perçu comme de la charité », a affirmé mercredi la mairesse de Montréal, Valérie Plante.
Valérian Mazataud Le Devoir « Ce qui me désole, c’est que le logement social soit perçu comme de la charité », a affirmé mercredi la mairesse de Montréal, Valérie Plante.

Accusant Québec de faire fi de la crise du logement dans ses décisions budgétaires, la mairesse Valérie Plante a décidé de créer une « équipe tactique » qui se penchera sur des solutions pour compenser le manque d’investissements pour les logements sociaux.

Au lendemain du dépôt du budget du ministre québécois des Finances, Eric Girard, Valérie Plante en avait gros sur le coeur. « Les sommes annoncées hier [mardi] sont nettement insuffisantes », a-t-elle déclaré. Le programme AccèsLogis bénéficiera d’un financement de 191 millions de dollars, mais cette somme sera destinée aux seuls projets en attente de financement. Or, seulement à Montréal, 24 000 ménages sont en attente d’un logement social.

« Ce qui me désole, c’est que le logement social soit perçu comme de la charité, a dit la mairesse. Un budget, c’est une série de choix. Et le gouvernement a fait ses choix. Avec la baisse d’impôts de 9 milliards de dollars, je ne peux pas m’empêcher d’évaluer le nombre de logements que ça donnerait. Ça représente 50 000 logements sociaux. C’est un choix. »

La mairesse a confié que, parfois, elle souhaitait qu’il y ait une période de questions des citoyens à l’Assemblée nationale,comme c’est déjà le cas au conseil municipal et lors des assemblées des conseils d’arrondissement. « J’aimerais ça parce que nous, on les voit ces personnes-là qui sont en détresse. […] C’est du vrai monde, de vrais visages, de vraies histoires. Quand c’est rendu qu’il y a des 5 et demie qui se louent à 2000 $ par mois, ça amène les gens à prendre des décisions difficiles : est-ce que je paie mon loyer ou je remplis mon frigo ? »

La déception de la Ville a incité l’administration Plante à mettre sur pied un groupe de travail, qui s’est réuni dès mercredi matin, afin de trouver des solutions pour accélérer les projets d’habitation. Ce comité réunit Jean-Marc Fournier, p.-d.g. de l’Institut de développement urbain du Québec, Véronique Laflamme, du Front d’action populaire en réaménagement urbain, Edith Cyr, directrice générale de Bâtir son quartier, Massimo Iezzoni, directeur général de la Communauté métropolitaine de Montréal, et Benoit Dorais, responsable de l’habitation au comité exécutif. Valérie Plante devait aussi participer à cette rencontre.

La mairesse a par ailleurs salué la décision du gouvernement du Québec d’éponger le déficit des sociétés de transport, qui ont vu leur achalandage chuter en raison de la pandémie et des changements d’habitudes des travailleurs. « Honnêtement, c’était le strict minimum. […] Les 400 millions vont nous permettre de sauver les meubles », a-t-elle souligné. « On doit toutefois se pencher dès maintenant sur le financement pour l’an prochain et les années suivantes. Nos sociétés de transport ont besoin de prévisibilité au moins pour les cinq prochaines années. »

La faute des villes

À Québec, le premier ministre, François Legault, a rétorqué qu’en habitation, le problème n’était pas le financement, mais bien la capacité des villes à réaliser les projets de logements. « Je dis à Valérie Plante qu’il faut travailler ensemble. […] Quand on passe par l’OMH [Office municipal d’habitation], ça prend quatre ans, construire », a-t-il souligné. « Donc, quand même qu’on ajouterait, puis qu’on ajouterait de l’argent… Il y avait déjà, avant le budget, de l’argent pas dépensé. C’est quand même spécial. Donc, il faut trouver le moyen d’accélérer la délivrance de permis, la recherche de terrains, etc. »

À Ensemble Montréal, on déplore le « désengagement » du Québec en habitation et en transport collectif. « Ce budget reflète ce que nous savions déjà : l’administration Plante a perdu son poids politique pour réussir à combler ses besoins de base », a déclaré le chef de l’opposition, Aref Salem. « Montréal devra faire cavalier seul, assumer pleinement son leadership et apprendre à gérer rigoureusement ses finances pour faire face au ralentissement économique à venir. »



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