Outremont interdit la vente de cannabis sur son territoire

Après avoir considéré l’idée d’imposer des règles plus strictes pour l’implantation d’une succursale de la Société québécoise du cannabis (SQDC), l’arrondissement d’Outremont a finalement décidé d’aller plus loin et d’interdire la vente de cannabis sur l’ensemble de son territoire. Cette décision va pourtant à l’encontre des recommandations du Contentieux de la Ville de Montréal, de la Direction de santé publique (DSP) de Montréal et même du Service de l’urbanisme de l’arrondissement d’Outremont.
Les élus d’Outremont ont approuvé à la majorité lundi soir une modification du règlement de zonage qui prohibera la vente de cannabis sur tout le territoire de l’arrondissement.
L’an dernier, la SQDC avait signifié son intention d’ouvrir une succursale au 1371, avenue Van Horne, la vente de cannabis étant permise dans certains secteurs de l’arrondissement. À l’occasion d’une consultation menée le mois dernier, de nombreux résidents ont réclamé l’interdiction de cette activité à Outremont, inquiets notamment de la présence d’une succursale de la SQDC à proximité d’écoles et de garderies.
Face aux préoccupations citoyennes, l’arrondissement a préféré opter pour une interdiction pure et simple de la vente de cannabis sur son territoire, et ce, même si la SQDC avait confirmé, le 24 janvier dernier, avoir renoncé à implanter une succursale dans l’arrondissement.
Les particularités d’Outremont
En entrevue au Devoir, le maire, Laurent Desbois, a fait valoir qu’Outremont a des particularités qui justifient une interdiction. Selon lui, il n’y a pas de problème d’accessibilité au cannabis à Outremont. « Il existe sept SQDC dans un rayon de 3,5 km à Outremont. En plus, la SQDC offre la livraison en ligne le jour même. Outremont est un des quartiers les mieux desservis par les SQDC au Québec. »
De plus, ajoute l’élu, Outremont compte une forte densité d’établissements scolaires, soit 15 écoles — bientôt 16 — sur un territoire de 4 km2. Peu d’emplacements se prêtent à l’implantation d’un point de vente de cannabis, l’arrondissement n’ayant pas de secteur industriel ni de secteur commercial en retrait des résidences, ajoute M. Desbois. « Compte tenu de notre situation géographique, de l’accessibilité qu’on a et de la densité familiale et des écoles, on arrive à la conclusion qu’il vaut mieux interdire [la vente de cannabis] », souligne-t-il.
Selon les documents fournis par l’arrondissement, ni le Service des affaires juridiques de la Ville de Montréal ni la DSP de Montréal ne recommandaient une interdiction absolue. Même la direction adjointe de l’arrondissement ne recommandait pas d’aller si loin.
Plusieurs villes disent non
Laurent Desbois juge toutefois que les avis soumis par le contentieux et la DSP avaient une portée générale qui ne tenait pas compte des spécificités d’Outremont. Il assure par ailleurs avoir reçu un avis favorable de la directrice de l’arrondissement.
D’autres villes ou arrondissements ont interdit la vente de cannabis, comme les municipalités de Mont-Royal et de Beaconsfield ainsi que l’arrondissement de Saint-Laurent, signale M. Desbois.
Anjou a pour sa part limité l’implantation d’une succursale de la SQDC à un secteur spécifique de son territoire, et Saint-Léonard a interdit la vente de cannabis dans les zones où la vente de détail est autorisée, ce qui s’apparente à une prohibition complète. D’autres arrondissements, comme Lachine et Verdun, ont simplement averti la SQDC qu’ils refuseraient l’ouverture de points de vente et n’ont pas eu à modifier leur réglementation.
Les deux élues de Projet Montréal dans Outremont, Mindy Pollak et Valérie Patreau, ont voté contre l’interdiction de la vente de cannabis. Valérie Patreau a fait valoir que la DSP de Montréal n’était pas favorable à une prohibition de la vente de cannabis à Outremont, notamment parce que la légalisation du cannabis vise une transition des consommateurs vers le marché légal « dans une perspective de protection de la santé et de réduction des méfaits ». « Écouter ce que nous dit la science et la Santé publique me semble une approche raisonnable », a indiqué Mme Patreau.
« En général, l’histoire nous démontre qu’interdire quelque chose totalement n’est pas une bonne chose », a pour sa part commenté Mindy Pollak.