Des règles différentes sur le cannabis d’une rue à l’autre à Montréal

Les arrondissements de Saint-Léonard, Montréal-Nord, Saint-Laurent, Pierrefonds-Roxboro et Rivière-des-Prairies–Pointe-aux-Trembles entendent interdire la consommation du cannabis dans les espaces publics.
Photo: Martin Bernetti Agence France-Presse Les arrondissements de Saint-Léonard, Montréal-Nord, Saint-Laurent, Pierrefonds-Roxboro et Rivière-des-Prairies–Pointe-aux-Trembles entendent interdire la consommation du cannabis dans les espaces publics.

À compter du 17 octobre prochain, il pourrait être possible à Montréal de fumer du cannabis dans un parc du Plateau-Mont-Royal ou de Verdun, mais pas dans un parc de Saint-Léonard ou de Montréal-Nord. Faute de réglementations plus restrictives à l’échelle de la Ville de Montréal, cinq arrondissements de la métropole détenus par l’opposition ont annoncé mercredi leur intention d’interdire la consommation du cannabis dans l’espace public.

Le cannabis sera légal au Canada dans deux semaines, mais les élus d’Ensemble Montréal dans les arrondissements de Saint-Léonard, Montréal-Nord, Saint-Laurent, Pierrefonds-Roxboro et Rivière-des-Prairies–Pointe-aux-Trembles disent être tenus dans le noir par l’administration de Valérie Plante au sujet de ses intentions. Au cours des derniers mois, de nombreux parents les ont interpellés pour leur exprimer leur inquiétude au sujet du cannabis.

Les arrondissements dirigés par les membres de l’opposition entendent donc interdire la consommation du cannabis dans les espaces publics tels les trottoirs et les parcs, comme c’est déjà le cas pour l’alcool.

Le pouvoir local

 

Les élus locaux sont en droit de décréter leurs propres règlements, fait valoir le maire de Saint-Laurent, Alan De Sousa. « C’est dans nos pouvoirs d’arrondissement. Ça passe par le règlement sur les nuisances. Je suis certain que tous les arrondissements vont être interpellés par leurs citoyens pour imposer de telles restrictions. »

Des dizaines de municipalités québécoises, dont Québec, Saguenay et Saint-Jean-sur-Richelieu, ont déjà annoncé leur intention d’interdire la consommation de cannabis dans les lieux publics. D’autres se penchent sur la question.

M. DeSousa ne croit pas que des différences dans la réglementation d’un arrondissement à l’autre créent de confusion : « Nous avons des règlements locaux non seulement dans les arrondissements, mais aussi dans les villes liées de l’île de Montréal et le SPVM applique ces règlements locaux nonobstant le fait qu’ils diffèrent d’une ville ou d’un arrondissement à l’autre. »

Les amendes varieront de 100 $ à 1000 $ pour une première infraction et pourraient doubler en cas de récidive.

Responsable du développement social et communautaire au comité exécutif, Rosannie Filato soutient que l’administration Plante n’a pas changé sa position à l’égard du cannabis. Elle s’en tiendra donc pour l’instant au cadre établi par le gouvernement Couillard, qui est calqué sur les règles encadrant l’usage du tabac. Ainsi, jusqu’à nouvel ordre, la consommation du cannabis sera autorisée dans les parcs, mais interdite à proximité des aires de jeux pour enfants. Et il ne sera pas possible de fumer à moins de neuf mètres des entrées d’immeubles.

« Montréal a pris cette décision conjointement avec la Direction de la santé publique, le SPVM et notre comité d’experts sur le terrain, a-t-elle expliqué. La Ville de Montréal a une vision de santé publique et de prévention. »

L’élue reconnaît toutefois que des discussions devront avoir lieu avec le nouveau gouvernement de François Legault. La Coalition avenir Québec (CAQ) a d’ailleurs réitéré, mercredi, son engagement électoral de hausser à 21 ans l’âge légal pour acheter du cannabis — il est fixé à 18 ans à l’heure actuelle — et d’interdire sa consommation dans tous les lieux publics partout en province.

L’administration prévoit de tenir une conférence de presse la semaine prochaine pour présenter les détails de son plan.

Où fumer ?

De plus en plus de propriétaires d’immeubles inscrivent dans les baux l’interdiction de fumer dans leurs logements, une règle qui pourrait être étendue au cannabis. Des syndicats de copropriétaires d’appartements proscrivent aussi l’usage du cannabis dans leurs bâtiments.

Où pourront donc fumer les consommateurs de cannabis s’il leur est interdit de le faire dans l’espace privé et dans les lieux publics ?

Alan DeSousa reconnaît que ce problème devra être examiné. « Il y aura des ajustements à faire, mais nous préférons y aller avec une approche restrictive pour donner aux autres ordres de gouvernement le temps de régler ces enjeux. » En campagne électorale, le Parti québécois avait proposé de créer des « cafés cannabis », a-t-il rappelé.

Associée chez Langlois avocats, Me Mylany David s’attend à ce que des ajustements soient apportés à la loi au fil des mois. « On est encore en mode exploratoire. […] À mon avis, la loi 157 [Loi constituant la Société québécoise du cannabis] va être en constante évolution dans les prochains mois, les prochaines années. »

Elle a rappelé que Québec disposait d’une période de douze mois après l’entrée en vigueur de la loi pour adopter des règlements : « On n’a pas encore vu aucun de ces règlements qui pourraient limiter ou élargir certaines applications de la Loi dans certaines circonstances. »

Au sujet des restrictions imposées aux consommateurs de cannabis, elle ajoute ceci : « Consommer du cannabis n’est pas un droit absolu. C’est un privilège de le décriminaliser. »

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