Les Forges de Montréal encore dans l’impasse

L’avis d’expulsion contre les Forges de Montréal a finalement été retiré, mais les nouvelles embûches sèment l’inquiétude.
Photo: Annik MH de Carufel Le Devoir L’avis d’expulsion contre les Forges de Montréal a finalement été retiré, mais les nouvelles embûches sèment l’inquiétude.

Les dirigeants des Forges de Montréal croyaient leurs problèmes résolus lorsqu’ils ont appris, en février dernier, que l’organisme ne serait pas expulsé de ses locaux de la rue Riverside par la Ville de Montréal. Cinq mois plus tard, les voilà à nouveau plongés dans une impasse qui, craignent-ils, pourrait compromettre l’avenir de l’organisme.

Les Forges occupent depuis 17 ans une ancienne station de pompage de la Ville située au 227, rue Riverside, à l’ombre de l’autoroute Bonaventure. Formé en France auprès d’un maître forgeron, Mathieu Collette réalise des travaux de forge fidèles aux techniques traditionnelles et offre de la formation aux apprentis forgerons.

La station de pompage a été construite par la Ville en 1887 sur un terrain fédéral et les Forges sont locataires de la Ville. Jusqu’à avril dernier, les dirigeants de l’organisme croyaient que la Ville était propriétaire du bâtiment. Mais ce ne serait pas le cas.

Depuis, c’est la confusion. Qui est réellement propriétaire de l’immeuble ? Le rôle foncier de la Ville indique que l’Administration portuaire de Montréal (APM) est propriétaire du terrain et que la Ville occupe les lieux. Elles sont liées par un bail qui prendra fin en 2021 et au terme duquel l’APM récupérera le terrain.

« Le bâtiment appartient à la Ville de Montréal », soutient Mélanie Nadeau, directrice des communications à l’APM. « C’est seulement le terrain qui est sous la gestion de l’APM jusqu’au 28 février 2021. L’APM loue ce terrain, par bail, à la Ville de Montréal, et ce jusqu’à cette date. »

Et comme si ce n’était pas déjà assez compliqué, deux autres organismes fédéraux entreront en scène. Au 1er mars 2021, Transport Canada reprendra la gestion du terrain et le vendra immédiatement à la Société immobilière du Canada (SIC), précise Mélanie Nadeau. Par la suite, seule la SIC pourra disposer du terrain, dit-elle.

Projet de musée

 

Dans ce labyrinthe juridictionnel, les Forges tentent de trouver un interlocuteur qui leur permettrait d’assurer leurs activités à long terme. Les dirigeants de l’organisme ont entrepris des pourparlers avec les représentants d’APM et de la SIC de ses discussions avec la Ville de Montréal.

L’APM soutient que dans les circonstances, elle ne peut conclure d’entente à long terme, ni avec la Ville ni avec les Forges. De son côté, la SIC a dirigé Le Devoir vers Transports Canada.

« C’est un combat titanesque pour accoucher d’une souris parce que le problème est administratif. On n’arrive jamais à identifier la cause de l’inaction », déplore Pierre Collette, président du conseil d’administration des Forges.

L’organisme souhaite conclure une entente à long terme afin de réaliser son projet de musée qui mettrait en valeur le patrimoine industriel du canal de Lachine et les traditions de la forge.

« Tout le monde dit que c’est un beau projet, mais quand c’est le temps de se commettre, on perd contact avec les gens », indique Mathieu Collette avec une pointe de découragement.

Les Forges de Montréal n’en sont pas à leurs premières difficultés. En 2016, l’organisme avait reçu un avis d’expulsion de la Ville. Celle-ci alléguait que la clause du bail obligeant les Forges à investir un million dans la restauration du bâtiment n’avait pas été respectée.

L’avis d’expulsion a finalement été retiré, mais les nouvelles embûches sèment l’inquiétude. « Ça fait 17 ans qu’on est ici. On s’est toujours autofinancés. On a fait nos preuves comme OBNL », tient à rappeler Pierre Collette.

Les Forges ont reçu plusieurs appuis dont celui de la conseillère de Projet Montréal Anne-Marie Sigouin, de la chef du Parti vert du Canada, Elizabeth May, et du député libéral de la circonscription de Ville-Marie–Le Sud-Ouest–Île-des-Soeurs, Marc Miller.

« Les Forges ont une réputation qui dépasse les frontières du Canada. Je fais de mon mieux comme député pour débloquer le tout, mais ce n’est pas facile », a dit M. Miller au Devoir.

Il soutient cependant qu’il est difficile pour son collègue et ministre fédéral des Transports, Marc Garneau, de s’ingérer dans les décisions de l’APM.

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