Projet Montréal dénonce un «massacre à la tronçonneuse» au parc Jean-Drapeau

Projet Montréal critique sévèrement l’administration Coderre pour avoir lancé les travaux de réaménagement de 73 millions du parc Jean-Drapeau de l’île Sainte-Hélène sans avoir mené de consultations publiques. Des travaux qui nécessiteront par ailleurs l’abattage d’au moins un millier d’arbres sur cette île du fleuve Saint-Laurent.
La chef de Projet Montréal, Valérie Plante, qualifie l’imposant chantier de deux ans de « massacre à la tronçonneuse » du parc Jean-Drapeau, jugeant que les millions de dollars de fonds publics injectés dans le projet serviront d’abord les intérêts d’un promoteur privé, evenko, qui y organise chaque année des spectacles.
Le projet de « mise en valeur » d’une partie de l’île Sainte-Hélène comprend effectivement l’aménagement d’un « amphithéâtre naturel » à l’endroit où se tiennent les festivals Osheaga et Heavy MTL, tous deux organisés par evenko.
« Ce sera un énorme amphithéâtre de béton. C’est comme si on voulait faire une deuxième place des Festivals, alors que le site aurait mérité un aménagement beaucoup plus léger et faisant davantage place à la nature », fait valoir Mme Plante.
Les travaux, financés par Montréal et le gouvernement du Québec, prévoient en outre la mise en place d’un « village événementiel », d’une nouvelle « promenade riveraine » et d’une « Allée Calder » qui doit relier l’oeuvre de l’artiste à la Biosphère. Ils doivent commencer ce printemps, ce qui signifie que ce secteur ne sera pas accessible durant l’année du 375e anniversaire de Montréal.
Arbres abattus
Un tel chantier sur un site emblématique de Montréal aurait nécessité la tenue de consultations publiques, selon Valérie Plante.
Or, dénonce-t-elle, la Ville n’a jamais procédé à cet exercice démocratique avant de lancer les travaux, qui doivent se terminer en 2019. Le parc Jean-Drapeau prévoit pourtant de mener des consultations dans le cadre de la révision de son plan directeur.
Qui plus est, les divers aménagements à venir seront précédés de l’abattage de plus d’un millier d’arbres, dont plusieurs arbres matures. La Société du parc Jean-Drapeau reconnaît d’ailleurs que 1061 arbres seront abattus, essentiellement dans la partie sud de l’île Sainte-Hélène.
Sa porte-parole, Geneviève Boyer, précise toutefois que « 100 % des arbres coupés seront compensés », soit sur le site des travaux, soit à l’extérieur de celui-ci. Selon un inventaire réalisé pour le compte de l’organisation, 71 % des arbres abattus auraient par ailleurs une « valeur de conservation faible », en raison de leur état de santé, de leur dimension et de leur essence.
Le Devoir a demandé une copie du rapport d’expertise. Le document n’est pas « public », a répondu la Société du parc Jean-Drapeau.
Emmanuel Rondia, du Conseil régional de l’environnement de Montréal, déplore que cette étude ne soit pas publique. Selon lui, les conclusions de l’inventaire sont pour le moins « étonnantes ». Il estime d’ailleurs qu’il aurait été nécessaire de mener une véritable réflexion sur la pertinence de l’abattage, ce qui n’a pas été fait.
Coderre se défend
Interpellé jeudi au cours d’un point de presse, le maire Denis Coderre a défendu le projet de réaménagement, pour lequel la Ville doit débourser 38,4 millions de dollars. Selon lui, il est faux de dire que le projet a été développé pour servir les intérêts d’un promoteur privé.
Le maire a d’ailleurs ouvertement critiqué Projet Montréal, jugeant que sa sortie publique s’inscrivait d’abord dans le cadre d’une stratégie politique en vue des élections à venir en 2017.
M. Coderre a également assuré que son administration est « sensible » aux arbres. « Nous sommes une ville verte », a-t-il dit, soulignant avoir pris plusieurs décisions pour le développement durable, dont l’augmentation du nombre d’arbres sur le territoire.