Vote unanime pour faire de Montréal une «ville sanctuaire»

Une femme sans-papiers, Gloria, a livré un témoignage en conférence de presse, lundi.
Photo: Jacques Nadeau Le Devoir Une femme sans-papiers, Gloria, a livré un témoignage en conférence de presse, lundi.

Le conseil municipal de Montréal a adopté à l’unanimité, lundi, une déclaration visant à faire de Montréal une ville sanctuaire pour les sans-papiers. Le maire Denis Coderre estime maintenant que Québec doit prendre des mesures pour que les immigrants sans statut aient accès à des services de santé et d’éducation.

« C’est un moment historique. J’ai vécu beaucoup de choses en politique, mais voir un conseil, à l’unanimité, faire de Montréal une ville sanctuaire compte tenu du contexte tant à l’échelle mondiale et même sur notre continent, je pense que ça envoie un message très très fort », a commenté le maire à l’issue du vote. « Ce n’est pas un symbole et des mots, il va y avoir des politiques qui vont s’y rattacher », a-t-il promis.

Demande à Québec

La déclaration propose notamment que la Ville assure la protection et l’accessibilité aux services municipaux aux personnes sans statut légal sur son territoire. « Plusieurs des sans-papiers sont des victimes et on doit les aider en conséquence », a dit le maire, qui demande au gouvernement du Québec d’emboîter le pas et d’offrir aux sans-papiers des services en matière de santé et d’éducation, notamment. Il entend également interpeller le gouvernement fédéral pour que la situation des sans-papiers puisse être régularisée.

Un mandat a aussi été donné à la Commission de la sécurité publique pour que soit élaborée, de concert avec le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), une approche afin de s’assurer qu’une personne sans statut légal et vulnérable puisse avoir accès aux services de sécurité publique sans risque d’être dénoncée aux autorités d’immigration ou d’être expulsée.

Le SPVM cessera-t-il de collaborer avec les services d’immigration ? À cet égard, le maire Coderre a dit que la Commission prendrait le temps d’étudier la question : « Ce n’est pas une politique “mur-à-mur”. Mais c’est sûr qu’ils [les policiers] vont être appelés à intervenir en ce sens pour s’assurer que les gens n’aient pas peur d’être dénoncés et déportés ».

Pour des gestes concrets

 

L’ensemble des élus ont donné leur aval à la déclaration, mais la chef de l’opposition, Valérie Plante, croit que des gestes plus concrets devront être faits avant de désigner Montréal comme ville sanctuaire. « Le but de la déclaration est très noble, mais on doit constater aujourd’hui qu’on n’a pas tous les outils nécessaires pour déclarer que la ville est un sanctuaire, a-t-elle expliqué. Il ne faut pas créer un faux sentiment de sécurité. Il ne faudrait pas que des personnes qui sont déjà vulnérables le soient encore davantage parce qu’on n’a pas tous les éléments en place. »

La chef de Projet Montréal a de plus demandé que la commission chargée d’élaborer un cadre d’intervention avec le SPVM tienne ses audiences de consultation en public.

Le cas de Gloria

 

Cette déclaration est bien insuffisante, ont réitéré des groupes de défense des immigrants lundi matin. « Un statut de ville sanctuaire ne devrait permettre aucune collaboration entre le SPVM et les services frontaliers », a rappelé le militant Jaggi Singh.

Les groupes, dont Solidarité sans frontières et le Collectif des femmes sans statut de Montréal, ont présenté les témoignages de sans-papiers qui vivent dans la crainte permanente d’une expulsion. C’est le cas de Gloria, qui a été arrêtée par des policiers alors qu’elle traversait une intersection pendant que le feu était rouge. Après avoir exigé qu’elle décline son identité, les policiers ont communiqué avec les services frontaliers. Cette arrestation l’a bouleversée. « Elle voit la police partout. Elle vit dans la crainte et elle veut juste demeurer ici dans la dignité », a indiqué Romina Hernandez, qui a traduit les propos de Gloria en conférence de presse.

Jaggi Singh estime que la déclaration du maire Coderre est improvisée. « C’est un geste positif, mais c’est loin de ce que les gens demandent », a-t-il dit.

C'est un geste positif, mais c'est loin de ce que les gens demandent

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