Outremont: tensions autour des lieux de culte sur les artères commerciales

Photo: Payton Chung CC

La prochaine assemblée du conseil d’arrondissement qui se tiendra lundi soir à Outremont s’annonce tendue. Les élues seront appelées à se prononcer sur le controversé règlement visant à interdire les lieux de culte sur les artères commerciales.

Le projet vise à empêcher l’ouverture de nouveaux lieux de culte sur les avenues Laurier et Bernard et à les autoriser dans le secteur des rues Hutchison et Van Horne, près de la gare de triage.

Au cours des derniers mois, plusieurs arrondissements ont pris des mesures réglementaires pour limiter l’ouverture de lieux de culte et d’autres sont en réflexion, mais dans Outremont, le projet de règlement exacerbe les tensions déjà existantes. La soirée de consultation de mardi dernier l’a démontré.

Membre de la communauté hassidique, Mayer Feig reproche à l’administration de la mairesse Marie Cinq-Mars de n’avoir réalisé aucune étude sur les impacts présumément négatifs de la présence de lieux de culte sur les rues commerçantes. « C’est inacceptable que l’arrondissement tente de nous confiner dans un ghetto, avance M. Feig. Ils n’ont consulté personne. »

C’est une demande de permis pour un centre communautaire hébergeant un bain juif, appelé « Mikvé », à l’angle des avenues Bernard et Champagneur, qui a incité l’arrondissement à réétudier son règlement.

Pétition

 

Citoyenne d’Outremont, Ginette Chartré a lancé une pétition pour appuyer le projet de règlement. « On dirait qu’il y a juste les religieux qui ont des droits. On est une société laïque ouverte à tous et on est en 2015, mais là, la communauté juive hassidique veut acheter Outremont au rabais, dit-elle. Je suis une citoyenne en colère. »

La situation est délicate pour les commerçants, indique Raymond Cloutier, président de l’Association de l’avenue Bernard et directeur général et artistique du théâtre Outremont. « Certains marchands de la rue Bernard m’ont dit qu’ils ne voulaient pas prendre parti parce que, parmi leur clientèle, les avis divergent. Ils ne veulent pas être identifiés à une position », explique-t-il.

Lors d’une rencontre avec des représentants de la communauté hassidique, M. Cloutier a réclamé que l’entrée principale de la synagogue soit sur l’avenue Champagneur : « On sent qu’il y a des craintes, mais moi, ma position, c’est que ces gens-là sont des citoyens comme les autres. Ils ont leurs désirs et besoins. Il faut composer avec. Ce n’est pas en étant dogmatique qu’on va régler tout ça. »

 

Saisir la ville du dossier

Pour le chef de l’opposition et maire du Plateau-Mont-Royal, Luc Ferrandez, il est temps que la Ville se penche sur ce délicat dossier et mandate l’Office de consultation publique de Montréal pour trouver des moyens afin de mieux outiller les arrondissements. « Il y a un paquet de petites nuisances et de petits désagréments qui peuvent hérisser les voisins. C’est ça qu’il faut gérer, pas le droit des communautés religieuses de s’installer sur le territoire. Il faut gérer des nuisances comme on gérerait n’importe quel type de commerce », explique-t-il.

Selon lui, il ne faut pas uniformiser la réglementation, mais plutôt s’inspirer des meilleures pratiques. Il cite le cas de son arrondissement, qui a privilégié la cohabitation d’une école hassidique avec des ateliers d’artistes.

Si le conseil d’arrondissement approuve le nouveau règlement lundi, les opposants pourraient réclamer un référendum. La communauté hassidique songe même à intenter des procédures judiciaires, a dit Mayer Feig.

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