Visite éclair de Justin Trudeau en Ukraine

Le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, a appelé samedi au retrait « immédiat », « complet » et « inconditionnel » des forces armées russes du territoire ukrainien lors d’une visite surprise à Kiev, où il a annoncé conjointement avec le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, une aide militaire supplémentaire à l’Ukraine et de nouvelles sanctions à l’égard de la Russie.

« La Russie a choisi d’envahir l’Ukraine, ils pensaient pouvoir conquérir l’Ukraine en quelques semaines, ils ont échoué de façon lamentable à ce niveau-là », a déclaré Justin Trudeau lors d’un point de presse après s’être adressé au Parlement ukrainien. 

Cette visite — la deuxième de Justin Trudeau depuis le début de la guerre —, a été organisée dans le plus grand secret pour des raisons de sécurité. Elle survient à un moment crucial du conflit, alors qu’une contre-offensive de l’Ukraine semble se dessiner dans le sud-est du pays. La région est également aux prises avec d’importantes inondations depuis la destruction mardi du barrage de Kakhovka, dont s’accusent mutuellement Moscou et Kiev.

« Le Canada est solidaire de l’Ukraine. Je suis à Kyiv pour réitérer cet engagement au président @ZelenskyyUa et au peuple ukrainien, qui continuent de résister à la guerre brutale de la Russie », a écrit le premier ministre sur Twitter.

Matériel, formation, sanctions et justice

Kiev recevra donc 500 millions de dollars en matériel militaire, notamment des munitions pour le système de défense aérienne. Pendant que les combats se poursuivent au front, la Russie multiplie depuis début mai les attaques de drones et de missiles sur la capitale.

L’opération UNIFIER, sous laquelle le Canada a déjà formé « plus de 36 000 militaires et membres du personnel de sécurité ukrainiens » depuis 2015, se poursuivra « jusqu’en 2026 », a annoncé Justin Trudeau. Cela permettra notamment d’entraîner des pilotes d’avion de chasse, une mesure à laquelle songeait déjà le premier ministre lors du sommet du G7 à Hiroshima, en mai.

Par ailleurs, le Canada rejoindra une équipe de pays aidant à maintenir les chars, tout en fournissant des missiles et des munitions supplémentaires. Il s’agit notamment de 288 missiles AIM-7 supplémentaires pour parer aux frappes aériennes russes, et d’une réaffectation des fonds existants pour 10 000 cartouches de munitions de 105 millimètres, a précisé M. Trudeau.

Le premier ministre a expliqué que le Canada essaierait de confisquer l’avion-cargo Antonov 124, immatriculé en Russie, au profit de l’Ukraine, afin qu’il ne puisse pas être utilisé pour soutenir l’effort de guerre de la Russie. Le véhicule est immobilisé à l’aéroport international Pearson de Toronto depuis février 2022, à la suite de la fermeture de l’espace aérien canadien aux avions russes, en réponse à l’invasion de l’Ukraine.

De nouvelles sanctions seront appliquées à l’encontre de 24 personnes et de 17 entités pour leur soutien présumé à l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

Le premier ministre a également annoncé que l’aide existante à l’Ukraine serait utilisée pour soutenir psychologiquement la population qui, après plus d’un an de conflit, est désormais confrontée à une aggravation de la situation humanitaire en raison des inondations qui sévissent depuis la destruction mardi du barrage de Kakhovka. Ces projets de soutien en santé mentale s’adresseront particulièrement aux enfants, aux professeurs, et au personnel médical.

Ottawa a par ailleurs réitéré son « engagement ferme à traduire en justice les responsables de crimes de guerre », et sa « volonté de prendre part au rétablissement et à la reconstruction de l’Ukraine ».

Selon Justin Trudeau, « la paix est nécessaire, mais elle doit être selon les termes des Ukrainiens. »

L’Ukraine veut aider le Canada face aux incendies

Questionné sur l’avancée de la contre-offensive qui semble prendre forme, le président ukrainien est resté évasif, indiquant simplement être en contact avec ses généraux et que tout se passait bien.

Et à qui incombe la destruction du barrage ? C’est « une conséquence directe de la guerre de la Russie », a sobrement répondu Justin Trudeau, sans directement montrer Moscou du doigt.

Les deux dirigeants semblent avoir été plus loquaces lors de leur rencontre. Sur Twitter, Volodymyr Zelensky a partagé une vidéo dans laquelle on voit les deux chefs d’État se faire une accolade, suivie d’une longue poignée de main.

Face à Justin Trudeau, M. Zelensky a remercié Ottawa et le peuple canadien pour leur soutien, et proposé l’aide de l’Ukraine au Canada pour faire face aux 417 feux de forêt actuellement actifs au pays. « Bien sûr, je suis au courant de ces feux de forêt. Nous sommes prêts à aider les Canadiens », a-t-il dit.

Hommage aux soldats

Avant sa rencontre avec le président Zelensky, Justin Trudeau a rendu hommage aux soldats qui ont péri depuis le début de la guerre en déposant une couronne de fleurs au mur commémoratif du monastère Saint-Michel-au-Dôme-d’Or. M. Trudeau a ensuite rencontré des représentants du ministère de la défense et a pu échanger quelques mots avec des soldats entraînés par les forces canadiennes.

C’est la deuxième fois que le chef du gouvernement canadien se déplace dans la capitale ukrainienne depuis le début de la guerre. Il s’y était rendu au mois de mai de l’année dernière, pour annoncer la réouverture de l’ambassade canadienne et offrir son soutien au peuple ukrainien. Il était alors accompagné de la vice-première ministre, Chrystia Freeland, et de la ministre canadienne des Affaires étrangères, Mélanie Joly.

M. Trudeau est accompagné à nouveau cette fois-ci de Mme Freeland, qui a des origines ukrainiennes. La ministre des Affaires étrangères s’est quant à elle rendue à Kiev en visite officielle en février dernier.

Le Canada est un allié de l’Ukraine dans le conflit qui l’oppose à la Russie. Plus de 8 milliards de dollars ont été octroyés par le gouvernement canadien à l’Ukraine pour contribuer à ses efforts pour repousser l’agresseur russe, incluant l’envoi de huit chars de combat Leopard 2 pour appuyer les forces armées ukrainiennes.

À son retour au pays, Justin Trudeau devra faire face à plusieurs sujets chauds, dont les feux de forêt, qui continuent de brûler au Canada, et la démission, vendredi, du rapporteur spécial David Johnston, que M. Trudeau avait chargé d’enquêter sur l’ingérence étrangère.

Avec La Presse canadienne

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