Une majorité d’élus demandent la démission de David Johnston

Le rapporteur spécial sur l'ingérence étrangère, David Johnston
Photo: Sean Kilpatrick La Presse canadienne Le rapporteur spécial sur l'ingérence étrangère, David Johnston

Une majorité de parlementaires à la Chambre des communes ont voté mercredi pour demander la démission du rapporteur spécial sur l’ingérence étrangère, David Johnston.

Le partenaire de danse du gouvernement minoritaire de Justin Trudeau, le Nouveau Parti démocratique (NPD), a fait cette fois équipe avec le Bloc québécois et le Parti conservateur du Canada (PCC) pour ce vote. Ces autres partis d’opposition sont à l’origine d’une « situation extrêmement toxique » aux Communes, selon le premier ministre.

À l’issue d’une période de questions teintée d’échanges corsés, 174 élus fédéraux ont voté en faveur de la motion non contraignante du NPD, qui demande non seulement le départ volontaire de M. Johnston, mais aussi une enquête publique confiée à un commissaire choisi par tous les partis. L’indépendant élu sous la bannière libérale Han Dong ainsi que 149 députés libéraux s’y sont opposés.

Le chef du NPD, Jagmeet Singh, a conclu l’an dernier une entente avec les libéraux devant les maintenir au pouvoir jusqu’en 2025. M. Singh écarte toutefois l’idée de rompre son appui au gouvernement et de plonger le pays en campagne électorale, puisque la crise de confiance actuelle touche justement le processus électoral. Le premier ministre et les troupes libérales ont passé la semaine à défendre la réputation de David Johnston.

Climat toxique

« Ce qu’on est en train de voir, c’est, particulièrement, que l’approche qu’a choisie [le chef de l’opposition Pierre] Poilievre — et à un certain niveau [le chef du Bloc, Yves-François] Blanchet — rend la situation extrêmement toxique, et [ce], quelle que soit la personne qu’on choisirait », a laissé tomber le premier ministre mercredi matin devant les journalistes.

Il a aussi laissé entendre que les partis d’opposition ont eu la chance de proposer des candidats au poste de rapporteur spécial. « On avait demandé à M. Poilievre de nous donner des recommandations, suggérer des noms pour le rapporteur spécial, [mais] il n’a même pas partagé un [seul] nom », a critiqué Justin Trudeau.

Choqué, Yves-François Blanchet a répliqué en accusant Justin Trudeau de représenter une « menace à la démocratie » en refusant la tenue d’une enquête qu’il aimerait voir sur une foule de dossiers, comme le don effectué à la Fondation Pierre-Elliott-Trudeau. Il dit qu’on ne lui a pas demandé de soumettre des idées de candidatures au poste de rapporteur.

« Son attitude [au premier ministre], sa prétention, son manque de considération pour les électeurs qui l’ont mis là [comme] pour la majorité des élus de la Chambre des communes, ça a atteint un niveau que même son père n’aurait pas osé atteindre. »

À l’intérieur de la Chambre, les débats sur cette question sont devenus acrimonieux. Le chef conservateur, Pierre Poilievre, a demandé au premier ministre s’il avait « peur » d’une enquête publique « parce qu’il a épuisé la liste de membres de la Fondation Trudeau » pour la diriger.

« Il est en amour avec le son de sa voix », lui a répliqué Justin Trudeau à un certain moment, non sans de multiples interventions du président de la Chambre, Anthony Rota, si exaspéré du chahutage qu’il a menacé les élus de mettre fin à la période de questions sur-le-champ.

Même débat

Justin Trudeau a répété que ses deux principaux opposants politiques à la Chambre des communes ne prennent pas « l’enjeu de l’influence étrangère au sérieux ». Il déplore que ceux-ci ne se prévalent pas de leur droit de lire l’annexe confidentielle du rapport Johnston, déposé la semaine dernière, au coût d’adhérer aux conditions associées à la cote de sécurité « très élevée ».

Jagmeet Singh a quant à lui accepté de se plonger dans l’exercice, ce qu’il entend faire bientôt. Il n’a pas voulu dire s’il considère lui aussi que le climat est devenu « toxique » au parlement fédéral. « Notre approche est une approche responsable, mature et constructive. Je ne peux pas dire la même chose pour tous les autres partis », a-t-il répondu.

Le 23 mai, le rapporteur spécial et ex-gouverneur général du Canada, David Johnston, a conclu dans un rapport de 65 pages qu’une enquête publique sur l’ingérence étrangère n’est pas nécessaire. Il a écorché au passage les reportages des médias, laissant entendre qu’ils sont soit faux, soit exagérés, créant des « malentendus ».

Yves-François Blanchet a dit de nouveau mercredi que le rapporteur spécial nommé par le gouvernement Trudeau, David Johnston, n’est pas crédible ou légitime. Il précise qu’il aurait cru l’ex-gouverneur général nommé par Stephen Harper si celui-ci s’était rangé derrière sa demande d’enquête publique.



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