Blanchet encensé par les bloquistes, le Parti québécois, un peu moins

Yves-François Blanchet au congrès bloquiste, qui se tient à Drummondville
Capture d’écran CPAC Yves-François Blanchet au congrès bloquiste, qui se tient à Drummondville

Yves-François Blanchet a franchi son tout premier vote de confiance en se méritant l’appui de plus de 97 % des militants bloquistes. Ces derniers ont toutefois été moins unanimes pour choisir un camp parmi les partis indépendantistes de la scène politique québécoise. L’allié du Parti québécois a été salué, mais pas privilégié.

Le chef du Bloc avait refusé de chiffrer le résultat espéré, en vue du vote de confiance du congrès du parti à Drummondville cette fin de semaine. Même une fois sur place, M. Blanchet insistait pour dire qu’il n’était pas nerveux.

Le résultat lui a donné raison. Pas moins de 97,25 % des délégués ont endossé le chef. Visiblement ému, M. Blanchet les a remerciés. « Je suis honoré de vous servir. Ce sont les plus beaux moments de ma vie », leur a-t-il lancé, se trouvant alors chaudement applaudi et encore plus émotif. « Il faut arrêter parce qu’il ne restera rien de ma réputation de goon », leur a-t-il alors demandé à la blague.

Dans les coulisses du Bloc, on avait dit s’attendre à un résultat semblable à ceux de l’ancien chef Gilles Duceppe, qui s’est mérité entre 94,8 % et 96,8 % d’appuis entre 2005 et 2011. Ce que M. Blanchet a finalement quelque peu surpassé.

Il n’a cependant pas tout à fait épaulé les récents votes de confiance de la scène québécoise, où le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon, s’est mérité 98,5 % de soutien en mars et le premier ministre du Québec et chef de la Coalition avenir Québec, François Legault, 98,6 % la semaine dernière.

Yves-François Blanchet a refusé de s’attribuer le résultat du vote. « La démocratie de notre parti est en excellente santé », a-t-il plutôt estimé.

L’ancienne cheffe Martine Ouellet, qui a brièvement dirigé le parti en 2017-2018, est la seule à avoir obtenu un piètre résultat, avec 32 % de soutien dans la foulée de la crise qui avait secoué le Bloc sous sa gouverne.

« Vous avez fait la démonstration que nous avons reconstruit ensemble une machine digne des plus grandes années du mouvement souverainiste et du Bloc québécois », a lancé M. Blanchet aux 350 délégués bloquistes. Militants, députés et stratèges ne cachaient pas leur joie samedi d’être dans une nouvelle ère.

Se rapprocher du PQ, mais pas que

 

Le chef bloquiste avait poursuivi le rapprochement de son parti avec le PQ, en début de journée, dans un discours de 45 minutes visant à convaincre ses troupes de lui accorder leur soutien. Les deux partis souverainistes ont toujours été des partis frères, mais ils avaient quelque peu pris leurs distances, occupés à gérer crises internes et électorales ces dernières années.

« Le Bloc québécois est le guichet unique de tous les souverainistes. Et il va le rester », a assuré M. Blanchet à ses troupes samedi, qui rassemblent des électeurs du PQ, de la CAQ et de Québec solidaire.

« Même si nous sommes des souverainistes de tous les horizons, notre véhicule à Québec, le seul parti qui fait de l’indépendance l’enjeu de son existence même, c’est le Parti québécois », a-t-il cependant aussi tranché. « Pas seulement le Parti québécois. Mais d’abord le Parti québécois, fièrement le Parti québécois et toujours le Parti québécois. »

M. Blanchet a beau avoir voulu s’allier d’abord et avant tout au PQ, ses militants, eux, ont confirmé qu’ils étaient d’un autre avis.

Quelques minutes plus tard, ces derniers ont rejeté en plénière préliminaire une résolution qui aurait stipulé que leur parti « s’engage à supporter le Parti québécois jusqu’à l’accession complète de l’indépendance du Québec ».

Les bloquistes ont plutôt appuyé — en attendant le débat final des résolutions, dimanche — celle qui statuait que leur parti doit « réunir les indépendantistes de toutes allégeances ». Tout en précisant, avec un amendement, que les troupes reconnaissent « les liens historiques et privilégiés » unissant le Bloc et le PQ.

Une seconde résolution, qui sera elle aussi défaite ou adoptée dimanche, appelle le Bloc à se faire le défenseur des positions de la majorité des élus représentés à l’Assemblée nationale, et non pas uniquement celui des positions « du gouvernement en place » à Québec.

Quelques flèches à François Legault

Dans son discours de début de journée, M. Blanchet a recensé les dossiers sur lesquels le Québec et le gouvernement fédéral ne s’entendent pas. Exploitation pétrolière dans l’ouest, protection des forêts et des pêches au Québec, et défense du français.

À ce chapitre, le Bloc a accepté d’appuyer le projet de loi de réforme de la Loi sur les langues officielles, le C-13, après qu’Ottawa se soit entendu avec Québec pour laisser le choix aux entreprises de la province entre la Loi fédérale et la Charte québécoise de la langue française.

« Compromis ou non, on ne confie ni son âme, ni sa culture, ni sa langue au conquérant », a toutefois raillé M. Blanchet, dans une critique à peine voilée de la CAQ — phénomène qui était plus rare ces dernières années.

Le chef bloquiste a plus tard récidivé en invitant la CAQ à tenir son prochain congrès à Ottawa, afin que le parti découvre selon lui ce qu’est le Canada et fasse ainsi une conversion indépendantiste.

Ses attaques les plus dures, M. Blanchet les a cependant réservées à l’endroit du fédéral. « Au fond le problème c’est les tripeux de couronnes d’Angleterre », a-t-il accusé. « Les tripeux de pétrole et de monarchie qui prennent notre argent et qui l’investissent pour contester votre langue et vos valeurs. Des tripeux de pétrole et de monarchie qui utilisent les tribunaux pour annuler les lois du Québec qui sont bonnes pour le Québec. »

Les délégués bloquistes scelleront le sort final de dizaines de résolutions dimanche, portant sur le droit de vote à 16 ans, le rapatriement des pleins pouvoirs au Québec en matière d’immigration temporaire, les « dérives judiciaires de la Cour suprême du Canada lorsqu’elle touche aux compétences exclusives du Québec », la décriminalisation de la possession simple de drogues, ou encore la « discrimination » dans les critères de subvention de chaires de recherche universitaires.

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