Le train Québec-Toronto aura un promoteur avant qu’on détermine sa vitesse

« Une fois que nous aurons choisi notre partenaire, nous allons déterminer quel sera l’itinéraire, quelle sera la vitesse », a déclaré mercredi en point de presse le ministre des Transports, Omar Alghabra (en photo), en réponse à une question du « Devoir ».
Spencer Colby La Presse canadienne « Une fois que nous aurons choisi notre partenaire, nous allons déterminer quel sera l’itinéraire, quelle sera la vitesse », a déclaré mercredi en point de presse le ministre des Transports, Omar Alghabra (en photo), en réponse à une question du « Devoir ».

Le ministre des Transports du Canada promet d’étudier l’idée d’un train à grande vitesse entre Québec et Toronto, comme le voudraient les militants des partis au pouvoir à Québec et à Ottawa, mais pas avant d’avoir choisi le consortium qui construira son système de train à grande fréquence, l’an prochain.

« Nous évaluerons les options, incluant l’option [d’un train] à grande vitesse. Une fois que nous aurons choisi notre partenaire, nous allons déterminer quel sera l’itinéraire, quelle sera la vitesse », a déclaré le ministre des Transports, Omar Alghabra, en réponse à une question du Devoir mercredi.

Le fédéral souhaite surtout améliorer la fréquence des départs des trains de VIA Rail, qui devraient à terme circuler dans des voies réservées tout au long du corridor Québec-Toronto. Ottawa prend bien soin de ne jamais promettre des véhicules capables d’atteindre des vitesses comparables à ceux qui desservent certaines lignes au Japon, en France, en Italie, en Allemagne, en Chine, en Espagne ou en Corée du Sud, notamment, qui filent à plus de 300 km/h.

Or, le ministre Alghabra a précisé qu’il allait « poser la question » de la vitesse idéale pour le train promis au consortium chargé de le construire. Le laborieux processus de recherche de ce partenaire privé devrait passer à sa troisième phase en août, avec le lancement d’une « demande de propositions » dans laquelle le gouvernement demande à trois consortiums de lui présenter des projets. Le gagnant sera choisi à l’été 2024.

« Au minimum, nous estimons que la vitesse pourra atteindre 200 [km/h], mais pourrions-nous aller plus vite ? C’est la question que je pose », a indiqué le ministre.

Les militants veulent un TGV

Se limiter à un système de train à grande fréquence (TGF) ne plaît pourtant pas aux partis politiques qui forment les gouvernements à Québec et à Ottawa, à en croire les résolutions récemment adoptées par leurs militants respectifs. Ils s’entendent sur une chose : ils préfèrent l’option d’un train à grande vitesse (TGV).

Le congrès de la Coalition avenir Québec tenu le week-end dernier a vu l’adoption d’une résolution proposant qu’on bonifie le tronçon québécois pour gagner en vitesse. « Si le gouvernement fédéral en venait à privilégier le projet de TGF, le Québec pourrait utiliser le financement fédéral pour construire un TGV sur le tronçon Québec-Montréal », demandent ses militants.

Même au sein du Parti libéral de Justin Trudeau, c’est la vitesse qui prime. Ses militants ont entériné plus tôt ce mois-ci une résolution demandant au fédéral de lancer la construction « d’une nouvelle ligne distincte pour trains à haute vitesse à traction électrique […] capable de concurrencer efficacement le transport aérien et terrestre ».

Cette idée est aussi promue, entre autres, par le milieu des affaires de la ville de Québec. Une motion en appui au TGV Québec-Toronto a aussi été adoptée à l’unanimité en février par le conseil municipal de Montréal.

Décision du privé

Le professeur titulaire à HEC Montréal Jacques Roy trouve « un peu étrange » la démarche du fédéral qui consiste à choisir d’abord un partenaire privé avant de lui préciser les caractéristiques du projet.

« Ce que je comprends, c’est qu’ils ne veulent pas trop fixer de limites, de paramètres. Ils veulent laisser au promoteur les choix qui lui semblent appropriés. Ça inclut le trajet, la vitesse des trains, les prix du billet, etc. L’ensemble de l’oeuvre. Il me semble que ça serait plus logique de choisir le promoteur en fonction des projets qui leur sont proposés. »

Selon l’expert, c’est avant tout la qualité des voies ferrées, plus que celle des locomotives ou les wagons, qui limitent la vitesse d’un train. C’est aussi ce qui déterminera le prix du projet. Il est ainsi possible d’envisager un système qui serait en même temps à grande fréquence et à grande vitesse, du moins sur une partie du trajet, là où il serait le plus facile de construire des rails en ligne droite qui ne croisent aucune route.

Quand le choix du consortium qui doit mener à bien le projet de TGF sera arrêté, à l’été 2024, une phase de « codéveloppement » de « quelques années » entre le promoteur privé et le gouvernement suivra, a précisé le chef de la direction par intérim de VIA Train à grande fréquence Inc., Marc-Olivier Ranger, devant un comité sénatorial en avril.

Au moment de lancer le projet, à l’été 2021, le ministre Alghabra avait évoqué un coût allant de 6 à 12 milliards de dollars pour une livraison d’un train à grande fréquence en 2030.

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