Un projet de loi conservateur soulève des inquiétudes sur le droit à l’avortement

La députée Cathay Wagantall a nié rouvrir le débat sur l’avortement, arguant que son projet de loi ne vise que la violence contre les femmes enceintes.
Adrian Wyld La Presse canadienne La députée Cathay Wagantall a nié rouvrir le débat sur l’avortement, arguant que son projet de loi ne vise que la violence contre les femmes enceintes.

La Coalition pour le droit à l’avortement au Canada estime qu’un projet de loi émanant d’une députée conservatrice pourrait constituer un moyen détourné de promouvoir les droits du foetus.

S’il était adopté, le projet de loi C-311 encouragerait les juges à considérer les blessures physiques ou émotionnelles faites à une victime enceinte comme un « facteur aggravant » lors de la détermination de la peine.

Bien que la députée conservatrice Cathay Wagantall, marraine de C-311, s’oppose à l’avortement, elle a déclaré que le projet de loi ne visait que la violence contre les femmes enceintes.

Mais plusieurs groupes opposés à l’avortement soulignent que le texte représenterait un pas en avant, car il reconnaîtrait légalement l’« enfant à naître » dans une affaire de crimes violents, ce qui n’est pas le cas en ce moment. Le président de l’organisation Campaign Life Coalition, Jeff Gunnarson, espère certainement qu’il contribuerait à un argument juridique en faveur de restrictions à l’avortement. Mais il croit tout de même que c’est peu probable — le projet de loi, s’il devait être adopté, n’offrirait qu’une protection limitée à l’enfant à naître.

Le chef conservateur, Pierre Poilievre, a déjà affirmé dans le passé qu’il n’était pas opposé au droit à l’avortement et qu’il ne présenterait pas de projet de loi pour le limiter au Canada. Son porte-parole a confirmé que le chef avait l’intention de voter en faveur du projet de loi.

M. Gunnarson reste toutefois sceptique face à cette prise de position conservatrice. « Je pense toujours qu’il ne voterait pas en faveur, pour la simple raison que cela donnerait l’impression aux médias et aux proavortements qu’il penche en quelque sorte vers une position “pro-vie”. »

« Faire reculer les droits des femmes »

Selon Joyce Arthur, directrice générale de la Coalition pour le droit à l’avortement au Canada, de telles remarques de la part d’organisation anti-avortement sont révélatrices et alarmantes, car le projet de loi pourrait servir de base à l’établissement de restrictions.

Les journalistes ont demandé mardi au lieutenant des conservateurs pour le Québec, Pierre Paul-Hus, si son parti voulait rouvrir le débat sur l’avortement par une manoeuvre détournée. « Pas du tout. […] Ça n’a rien à voir avec l’avortement », a lancé le député, qui n’est pas opposé au droit à l’avortement. « C’est un projet de loi que j’aurais pu moi-même déposer sans aucun problème. »

« C’est [à propos de] la condition de la femme quand elle est enceinte, tout simplement. C’est vraiment de créer un facteur aggravant de s’attaquer à une femme enceinte, […] au même titre que [de s’attaquer à] quelqu’un qui a un handicap. »

La ministre Mélanie Joly a accusé les conservateurs de vouloir « créer une brèche » et de « faire reculer les droits des femmes au pays ». « On l’a vu : ils s’inspirent de ce qui se passe aux États-Unis, ils essaient d’importer ici au Canada certaines des tactiques et des stratégies qui sont mises en place au sud de notre frontière », a-t-elle soutenu en mêlée de presse.

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