Jagmeet Singh se rêve au pouvoir après le dépôt du budget

Le chef du quatrième parti aux Communes a fait la liste de tout ce qu’il a « forcé les libéraux à faire » dans le plus récent budget fédéral.
Adrian Wyld La Presse canadienne Le chef du quatrième parti aux Communes a fait la liste de tout ce qu’il a « forcé les libéraux à faire » dans le plus récent budget fédéral.

Après s’être attribué tout le mérite de certaines mesures du budget de 2023, le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Jagmeet Singh, a laissé entendre que son prochain cheval de bataille serait l’interdiction des briseurs de grève.

« Chaque jour sans cette loi est un jour dans lequel les patrons ont plus de pouvoirs que les travailleurs. Plus de pouvoir pour diminuer les salaires ! » a scandé M. Singh devant une poignée de ses partisans et de ses employés réunis à Ottawa mercredi matin.

Tout sourire et sous une pluie d’applaudissements, le chef du quatrième parti aux Communes a fait la liste de tout ce qu’il a « forcé les libéraux à faire » dans le plus récent budget fédéral, déposé mardi par la ministre des Finances, Chrystia Freeland. 

Il revendique en particulier être à l’origine du programme national de soins dentaires, auquel le budget réserve 13 milliards de dollars cette année. Le projet a aussitôt été rejeté par le gouvernement du Québec. Jagmeet Singh fait aussi valoir que c’est lui qui a eu l’idée de doubler le remboursement de la TPS, ce qu’Ottawa fait pour une deuxième année. Il dit être celui qui a pensé à la condition d’assurer de « bons emplois » en échange des subventions à l’industrie verte.

Le NPD prend finalement le mérite pour les 4 milliards de dollars sur sept ans qui seront versés pour le logement autochtone à partir de l’an prochain, même si cela n’est « pas suffisant ». « Le budget d’hier a démontré que quand les néodémocrates ont le pouvoir, ils font des choses pour les gens », a lancé son chef.

Selon l’entente qu’il a conclue avec le Parti libéral du Canada, le NPD s’est engagé à maintenir Justin Trudeau au pouvoir jusqu’en 2025 en échange d’un programme de soins dentaires mis en oeuvre par étapes, ainsi que de 26 autres politiques. Une compilation effectuée par Le Devoir en mars montrait que la plupart des engagements avaient déjà été réalisés, en totalité ou en partie. Après le budget de 2023, il ne reste désormais qu’une poignée de promesses à remplir.

Une entente presque réalisée

En particulier, le gouvernement Trudeau et le NPD se sont entendus pour créer différentes lois dont les textes n’ont pas encore été dévoilés. D’ici la fin de 2023, les libéraux doivent en théorie adopter une loi sur l’assurance-médicaments et une autre sur les normes nationales dans les centres de soins de longue durée. Le dernier budget ne mentionne rien de tel.

Le chef néodémocrate, Jagmeet Singh, s’est toutefois limité mercredi à mentionner la promesse d’interdire aux entreprises sous réglementation fédérale de recourir aux travailleurs de remplacement, ou « briseurs de grève », en cas de débrayage ou de lockout. Le député québécois et chef adjoint du NPD, Alexandre Boulerice, a confirmé que ce dossier était prioritaire pour lui.

« On ne comprend pas pourquoi ce n’est pas déjà déposé. Les consultations sont terminées depuis le 31 janvier. Le gouvernement se traîne les pieds, on n’a pas besoin d’attendre au mois de novembre ou décembre », a indiqué l’élu montréalais. M. Boulerice propose au ministre du Travail Seamus O’Regan de copier le projet de loi qu’il a déposé à ce sujet au Parlement en octobre 2022. Le texte législatif n’a franchi aucune étape depuis.

M. O’Regan a réitéré sa promesse de dévoiler son texte de loi d’ici à la fin de l’année 2023. Le défi, dit-il, est de ne pas perturber les chaînes d’approvisionnement en cas d’arrêt de travail.

Deux heures pour un poulet

« Imaginez ce qu’on peut faire ensemble quand on va diriger. C’est pourquoi je veux devenir premier ministre et mener un gouvernement néodémocrate ! » a lancé M. Singh mercredi, galvanisé par ce qu’il a lu la veille dans le budget libéral.

Devant les 24 autres élus de son caucus, très minoritaires parmi les 338 députés aux Communes, il a dit de son partenaire politique Justin Trudeau qu’il était « déconnecté de la réalité des travailleurs ». À son avis, le Bloc québécois « chiale », et le chef du Parti conservateur du Canada, Pierre Poilievre, « se concentre à couper les services ».

« Certaines personnes doivent travailler deux heures seulement pour s’acheter un poulet, ça n’a aucun sens ! » s’est scandalisé le politicien progressiste. Il a mentionné les profits des grandes épiceries parmi les autres combats qu’il entend mener et qui n’ont rien à voir avec l’entente avec les libéraux, comme une réforme de l’assurance-emploi et l’interdiction du privé en santé.

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