Un régime de soins dentaires «made in Ottawa» d’ici la fin 2023

Ce sera bientôt au tour des Canadiens de moins de 18 ans, des personnes âgées et de celles vivant avec un handicap de voir leurs frais de dentiste remboursés par Ottawa. Le gouvernement mettra sur pied son tout nouveau régime à compter de la fin de cette année. Un cadre qui pourrait déplaire aux provinces, d’autant plus qu’elles disposent toutes déjà d’une couverture de soins dentaires à degrés variables, mais dont promet de tenir compte Chrystia Freeland.

« Plus aucun Canadien n’aura à choisir entre leur santé dentaire et payer ses factures à la fin du mois », a souligné la vice-première ministre et ministre des Finances, en parlant d’un « élargissement historique » des soins de santé au Canada.

Ottawa rembourse depuis l’an dernier les frais dentaires des enfants de moins de 12 ans dont les parents ne bénéficient pas d’une assurance privée. Ce programme intérimaire se faisait par le biais de prestations envoyées directement aux foyers. Le gouvernement de Justin Trudeau balisera maintenant cette couverture au sein du nouveau Régime canadien de soins dentaires, qui sera administré par une compagnie d’assurances agissant à titre d’administrateur.

Le nouveau régime pourrait couvrir à terme les soins dentaires de neuf millions de Canadiens, selon les prévisions d’Ottawa, dont le revenu familial est en deçà de 90 000 $. Ceux dont le revenu annuel se chiffre à moins de 70 000 $ n’auront pas de quote-part à débourser en sortant du cabinet du dentiste.

Ce régime était attendu, conformément à l’entente de soutien conclue entre le gouvernement libéral et le Nouveau Parti démocratique. L’accord prévoyait que cette couverture soit élargie en 2023, comme confirmé dans le budget, et qu’elle devienne universelle en 2025.

La facture sera cependant plus élevée que prévu au budget de 2022, de 7 milliards de dollars, pour atteindre 13 milliards dès cette année, puis 4,4 milliards par année par la suite. Car la gamme de services offerts et la population ciblée ont été élargies et les prix ont augmenté en raison de l’inflation, ont expliqué les fonctionnaires.

Possible grogne des provinces

Il y a trois ans, lorsque l’idée d’une assurance dentaire fédérale circulait déjà dans les officines politiques, les premiers ministres provinciaux s’étaient tous montrés frileux.

Guillaume Hébert, chercheur à l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques, salue la création d’une « politique sociale relativement ambitieuse ». « Toutefois, comme il s’agit d’une intervention dans le domaine de la santé, on peut s’attendre à ce que la mesure déplaise à Québec, où l’on pourrait y voir une intrusion dans un champ de compétence des provinces », a-t-il relevé.

Au moment où ces lignes étaient écrites, le gouvernement de François Legault n’avait pas formulé de commentaires.

Une source fédérale n’a pas exclu la possibilité que le Québec puisse gérer le régime sur son territoire s’il le souhaite. Mais on estime à Ottawa qu’il est prématuré de l’envisager, en attendant que soient fixés les paramètres du régime fédéral.

Ottawa devra par ailleurs instaurer son assurance dentaire en tenant compte de la couverture partielle déjà offerte par toutes les provinces — que ce soit, selon le cas, pour les enfants, les mineurs ou les familles les plus pauvres.

La ministre Freeland a reconnu que les « besoins et systèmes » diffèrent à l’échelle du Canada, « incluant au Québec ». Elle a assuré que son plan en tiendrait compte, sans donner plus de détails, lesquels suivront.

Le fédéral crée également le Fonds d’accès à la santé buccodentaire, au coût de 250 millions sur trois ans, afin de combler les écarts d’accès à un dentiste en région.

À ces sommes s’ajoutent les 22 milliards promis aux provinces le mois dernier par le biais d’ententes bilatérales en santé. Ce qui fait de cette enveloppe la deuxième en importance du budget Freeland.



À voir en vidéo