Trudeau promet «un examen détaillé» du refus d’étudiants africains francophones

Le premier ministre Justin Trudeau assure procéder à « un examen détaillé » des répercussions qu’ont les critères des programmes fédéraux sur la composition de l’immigration. Faisant référence au refus massif d’étudiants africains francophones, il a affirmé lors de la période des questions à la Chambre des communes mercredi « que ces rapports sont particulièrement inquiétants ».
Le Devoir révélait récemment que les taux de refus de permis d’études pour les ressortissants des pays du Maghreb et de l’Afrique de l’Ouest ne cessent de grimper. Certains candidats qui répondent à tous les critères sont ainsi empêchés de poursuivre leurs études au Québec.
M. Trudeau répondait mercredi à l’intervention du chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet. Sous le « prétexte » que les agents d’immigration ne croient pas que ces étudiants rentreront chez eux après leurs études, ils sont refusés, a-t-il dit. « C’est un grave procès d’intention. Une forme de discrimination à dénoncer, qui nuit aux échanges et au développement de l’Afrique », a ajouté M. Blanchet, exhortant le gouvernement à intervenir.
« Nous n’allons tolérer aucune discrimination systémique », a rétorqué le premier ministre, rappelant qu’il a reconnu qu’il en existe « dans toutes nos institutions à travers le pays ». L’examen détaillé des répercussions des programmes d’immigration servira à garantir que tous les demandeurs sont traités « de manière équitable », a-t-il avancé.
Le taux de refus pour tous les pays d’origine est en outre beaucoup plus élevé dans la province que dans le reste du Canada, un phénomène qui préoccupe toute la classe politique québécoise. Il est « inacceptable » qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) « nous prive d’étudiants africains francophones correspondants en tout point au profil d’immigrant qu’on souhaite attirer au Québec, notamment pour développer nos régions, soutenir nos cégeps et pallier […] la pénurie de main-d’œuvre », a notamment écrit sur Twitter la députée du Parti québécois Méganne Perry Melançon.
Des problèmes documentés
Le nouveau ministre fédéral de l’Immigration, Sean Fraser, a également promis la semaine dernière de vérifier « personnellement » que les préjugés inconscients des fonctionnaires de son propre ministère ne font pas en sorte de discriminer les Africains francophones souhaitant venir étudier au pays.
Un rapport fédéral publié en octobre révélait que son ministère fait face à des problèmes de racisme à l’intérieur même de sa bureaucratie. Des fonctionnaires utiliseraient des clichés ouvertement racistes dans leurs conversations et des préjugés guideraient les embauches et les promotions.
IRCC échoue par ailleurs toujours à atteindre les cibles fixées pour l’accueil d’immigrants francophones au Québec et hors Québec, a aussi alors rappelé M. Fraser, malgré la pénurie de main-d’œuvre que connaît le pays.
Mardi, un nouveau rapport du commissaire aux langues officielles, Raymond Théberge, en a remis une couche : le Canada aurait dû admettre au moins 75 839 immigrants francophones de plus hors du Québec depuis 2008 pour maintenir le poids démographique du français dans les provinces à majorité anglophone.
Au Québec, les principaux bassins de recrutement des étudiants francophones africains font face à des taux de refus de permis d’études de plus de 80 %. La France arrive souvent en tête de liste des pays d’origine des étudiants étrangers. Depuis 2018, elle partage toutefois la première position avec l’Inde, d’où la majorité des ressortissants choisissent plutôt de poursuivre des études en anglais.