Succès mitigé pour le Programme incitatif pour la rétention des travailleurs essentiels

Craignant que les prestations d’aide fédérales ne créent un désincitatif au travail, Québec a augmenté les salaires de ses travailleurs essentiels. Mais Le Devoir a constaté que très peu de ces travailleurs se sont prévalus de la prime salariale québécoise.
Le Programme incitatif pour la rétention des travailleurs essentiels (PIRTE) a été annoncé début avril, pour rivaliser avec la Prestation canadienne d’urgence (PCU) qui offre 2000 $ par mois aux travailleurs ayant perdu leur emploi ou leurs heures de travail à cause de la pandémie. Le gouvernement de François Legault a ainsi promis aux travailleurs moins rémunérés de secteurs jugés essentiels une prime de 100 $ par semaine.
Or, trois semaines après le lancement du PIRTE, seules 110 144 personnes ont placé une demande pour en bénéficier, a appris Le Devoir. Pourtant, lors de l’annonce du programme, Québec espérait offrir cette prime à 600 000 salariés.
Les Québécois peuvent faire une demande au PIRTE depuis le 19 mai. Les premières prestations ont commencé à être versées entre le 27 et le 29 mai. En date du lundi 8 juin, un peu plus de 95 % des 110 144 demandes reçues avaient été approuvées, selon Revenu Québec. Ce qui représentera des versements totalisant 90,5 millions de dollars d’ici au 23 juin. Le gouvernement québécois estimait au départ que son programme coûterait 890 millions pour les seize semaines de prestations. « Le nombre de demandes au PIRTE devrait continuer d’augmenter au cours des prochains mois puisque les travailleurs ont jusqu’au 15 novembre pour présenter une demande », note cependant le porte-parole de Revenu Québec, Martin Croteau.
C’est le nombre de travailleurs essentiels que Québec espérait encourager à demeurer au travail en leur versant une prime de 100 $ par semaine.
Le premier ministre François Legault avait critiqué l’instauration de la PCU fédérale au printemps, car il craignait qu’elle ait un effet pervers en dissuadant certains Québécois de travailler alors qu’ils pouvaient toucher une somme quasi équivalente à leur salaireen restant à la maison. Une préoccupation qu’avaient d’ailleurs partagée les premiers ministres d’autres provinces.
Le PIRTE québécois devait donc assurer une rémunération équivalente ou supérieure à la PCU. « Le but de la Prestation canadienne d’urgence, c’est d’aider, c’est indéniable. C’est un bon programme, les 2000 $ par mois, mais il a un effet non souhaité qui est que les gens qui sont au salaire minimum, qui travaillent, ils se disent : “Bien, peut-être que je pourrais faire plus d’argent sans travailler.” Alors, on vient corriger cela », expliquait le ministre des Finances québécois, Eric Girard, en présentant le nouveau programme le 3 avril.
Prime imposable
Le PIRTE offre une prime imposable de 100 $ par semaine aux travailleurs essentiels qui gagnent 550 $ ou moins par semaine. Ce qui leur permet de faire passer un salaire qui aurait été tout au plus de 2200 $ par mois à un salaire de 2600 $ par mois. Le programme s’étire sur un maximum de 16 semaines, de façon rétroactive jusqu’au 15 mars — comme la PCU.
Mais bien que les demandes pour le PIRTE soient ouvertes jusqu’à cet automne, cette période de quatre moisest fixe : la prime ne peut être versée que pour des semaines travaillées à bas salaire entre le 15 mars et le 4 juillet.
Les services essentiels couverts touchent une centaine de domaines, allant des commis d’épicerie, de pharmacie ou de dépanneur aux employés de restaurant et de banque alimentaire, en passant par les déménageurs et les éboueurs.
Les travailleurs qui veulent se prévaloir du PIRTE peuvent en faire la demande sur le site de Revenu Québec. Les demandeurs doivent avoir accumulé au moins 5000 $ de revenus de travail, toucher un revenu annuel de moins de 28 600 $ pour l’année 2020, être âgés de plus de 15 ans et travailler à temps partiel ou à temps plein dans les emplois énumérés sur le site du gouvernement.
Ce n’est pas le seul programme que le gouvernement québécois a mis sur pied pour encourager ses travailleurs à prêter main-forte pendant la pandémie de COVID-19 et ainsi contrer les risques posés par la PCU.
Québec a également haussé de 4 $ l’heure le salaire des préposés aux bénéficiaires du secteur privé.