La course à la chefferie des conservateurs prendra forme cette semaine

Andrew Scheer a démissionné en décembre de son poste de chef du Parti conservateur du Canada. Son remplaçant devrait être choisi le 27 juin.
Photo: Adrian Wyld La Presse canadienne Andrew Scheer a démissionné en décembre de son poste de chef du Parti conservateur du Canada. Son remplaçant devrait être choisi le 27 juin.

La course à la direction du Parti conservateur risque de se mettre en branle cette semaine. La majorité des grosses pointures aspirant à succéder à Andrew Scheer entendent confirmer au cours des prochains jours s’ils se lanceront dans la mêlée, selon ce qu’a appris Le Devoir. Mais quoi que décide Jean Charest, plusieurs conservateurs du Québec estiment que c’est plutôt Pierre Poilievre, actuel député de l’Est ontarien, qui est dans la meilleure posture pour remporter la chefferie.

Selon les informations recueillies par Le Devoir, Jean Charest annoncera ses intentions cette semaine ou la semaine prochaine au plus tard. L’ancien premier ministre québécois a indiqué à certaines de nos sources qu’il entendait prendre sa décision « la première semaine de janvier ». Une autre parle de la mi-janvier, soit d’ici le milieu de la semaine prochaine. Les noms de domaine jeancharest.ca et jeancharest.org ont été réservés depuis le 21 décembre.

L’autre potentiel candidat vedette de la course, l’ancien ministre Peter MacKay, s’apprêterait à annoncer sa décision d’ici vendredi, selon nos sources. Idem pour l’ancien ministre et sénateur québécois Michael Fortier et l’homme d’affaires Vincent Guzzo.

Selon plusieurs conservateurs consultés, les candidatures de Pierre Poilievre et d’Erin O’Toole sont pour ainsi dire assurées, mais on ignore quand elles seront annoncées. « Ce n’est pas une question de si, mais de quand », illustre une source.

Quant à Rona Ambrose, plusieurs sources estiment qu’elle ne se lancera finalement pas. Gérard Deltell est pour sa part encore en réflexion : la rumeur qui circulait lundi voulant qu’il ait déjà renoncé à se porter candidat est inexacte.

Les règles de la course seront confirmées par le Parti conservateur d’ici quelques jours. Si elles seront plus strictes qu’en 2017, comme les informations préliminaires le laissent croire (coût d’entrée de 300 000 $ au lieu de 100 000 $ et obligation d’amasser 1000 signatures plutôt que 300), cela pourrait nuire à M. Deltell, pensent certains.

Trois joueurs au Québec

 

Les conservateurs observent que les candidatures de Jean Charest et de Peter MacKay pourraient se nuire l’une l’autre. Tous deux ont dirigé dans le passé le Parti progressiste-conservateur, qui a fusionné avec l’Alliance canadienne pour former l’actuel Parti conservateur. Les deux hommes sont ce qu’on appelle des « red tories » (des conservateurs rouges), c’est-à-dire des conservateurs appartenant à la mouvance plus progressiste.

Au Québec, beaucoup ne voient pas d’un bon oeil la venue de Jean Charest. Il pourrait séduire les électeurs qui votent libéral sur la scène provinciale et conservateur sur la scène fédérale, mais ceux-là sont moins nombreux que les électeurs conservateurs qui votent plutôt pour la CAQ, ou l’ADQ auparavant. « Comme adéquiste, on a appris à le haïr », indique une de nos sources. Avec Jean Charest comme chef, certains pensent que des sièges conservateurs du Québec seraient menacés parce que remportés grâce à cet électorat caquiste-adéquiste allergique au Parti libéral du Québec auquel est associé l’ex-premier ministre. « S’il se lance, il va falloir qu’il vende beaucoup de cartes de membres. Au Québec, les membres ne votent pas pour lui », ajoute une autre source.

Plusieurs pensent que la course au Québec se jouera entre trois joueurs : Jean Charest, Gérard Deltell et Pierre Poilievre. Ce dernier a pour lui le fait d’être parfaitement bilingue, de vivre en Ontario et d’être originaire d’Alberta, ce qui lui permettrait symboliquement d’incarner la réconciliation nationale. Son épouse étant une réfugiée du Venezuela, il sera protégé, pense-t-on, contre toute critique éventuelle sur les questions migratoires.

M. Poilievre devra toutefois se défendre d’être pro-vie. Il a voté pour trois projets de loi considérés comme des préludes à un resserrement de l’accès à l’avortement. Le groupe pro-vie Campaign Life Coalition a encouragé ses membres à élire M. Poilievre cet automne. Au moins une source québécoise affirme avoir été assurée par M. Poilievre lui-même qu’il n’avait pas de problème avec l’avortement comme tel.

Quant à Michael Fortier, il ferait appel à la filière progressiste du Parti conservateur, comme MM. Charest et MacKay. Selon certains, il appuierait ouvertement l’avortement et le mariage entre personnes de même sexe, tout comme un plan plus agressif de lutte contre les changements climatiques.

M. Fortier décidera cette semaine s’il se lance. Nos sources indiquent qu’il veut s’assurer d’avoir de réelles chances de l’emporter. Pas question pour lui de faire de la figuration. Or, des sources québécoises estiment que le banquier de la haute finance en a peu.

Le sénateur Leo Housakos est particulièrement cinglant à son sujet, rappelant que, bien que ministre bien en vue, il n’avait pas réussi à se faire élire en 2008. « Il était ministre pendant deux ans, et il n’a pas fait avancer la marque du Parti conservateur à Montréal. Ça a été un échec. »

Avec Mylène Crête

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