Trudeau a-t-il changé de cap sur le test des valeurs ?

«Le Québec a le droit d’établir un test pour l’obtention du Certificat de sélection, qui est donné par le Québec», a reconnu Justin Trudeau lundi soir, en rappelant simplement les pouvoirs conférés au Québec en vertu de l’Entente Canada-Québec sur l’immigration.
Photo: Adrian Wyld La Presse canadienne «Le Québec a le droit d’établir un test pour l’obtention du Certificat de sélection, qui est donné par le Québec», a reconnu Justin Trudeau lundi soir, en rappelant simplement les pouvoirs conférés au Québec en vertu de l’Entente Canada-Québec sur l’immigration.

Justin Trudeau annonçait, au débat des chefs en français jeudi soir, que Québec pourrait finalement imposer un test de valeurs à ses immigrants. « S’ils veulent appliquer un test lors du certificat de sélection, c’est tout à fait correct et c’est approprié qu’ils le fassent. » Le chef libéral a-t-il ainsi changé de position, par rapport à l’an dernier ?

Le Polygraphe du Devoir s’est penché sur la question. Son verdict ? Pas vraiment.

Un processus en amont

 

Le premier ministre québécois, François Legault, a promis en campagne électorale, l’an dernier, d’imposer un test de valeurs québécoises aux immigrants souhaitant s’installer au Québec. La Coalition avenir Québec voulait remplacer le Certificat de sélection du Québec par un « Certificat d’accompagnement transitoire », qui instaurerait une période de probation de trois ans aux immigrants avant d’obtenir leur résidence permanente. Au terme de ces trois ans, ces derniers auraient eu à réussir un test de connaissance des valeurs.

Le gouvernement libéral de Justin Trudeau s’était rapidement opposé à cette proposition. Le ministre des Affaires intergouvernementales de l’époque, Dominic LeBlanc, avait fait valoir que « de prime abord, nous ne sommes pas favorables à la réintroduction de la résidence permanente conditionnelle ». Car Ottawa refusait de voir les immigrants déjà accueillis au Québec courir le risque d’être en situation de non-droit dans la province s’ils échouaient le test de la CAQ — bien que le gouvernement québécois n’aurait pas eu en réalité le pouvoir de déloger ces immigrants.

Or, il semble que le gouvernement Legault ait modifié sa stratégie pour parvenir à imposer son fameux test unilatéralement.

Le Québec a le droit d’établir un test pour l’obtention du Certificat de sélection, qui est donné par le Québec. Ça n’a rien à voir avec la citoyenneté canadienne.

Plutôt que de soumettre les immigrants à un examen de connaissances en aval, une fois qu’ils sont installés au Québec et qu’ils y résident depuis tout au plus trois ans, la CAQ envisagerait maintenant de le faire en amont. Soit avant même que les immigrants économiques soient acceptés au Québec.

Un mémoire du ministre québécois de l’Immigration, Simon Jolin-Barrette, obtenu par Radio-Canada il y a deux semaines et daté du 17 septembre, suggère désormais d’ajouter le test des valeurs aux critères d’obtention du Certificat de sélection du Québec (CSQ) pour les immigrants économiques qui souhaitent immigrer au Québec. Les immigrants doivent obtenir le CSQ avant de voir leur demande d’immigration étudiée par Ottawa et de pouvoir obtenir par la suite une résidence permanente.

Le test des valeurs deviendrait en outre une « attestation d’apprentissage des valeurs démocratiques et des valeurs québécoises », qui ne serait plus un examen en soit mais plutôt une session d’information pour les candidats déjà en sol québécois ou une évaluation en ligne pour les autres, selon Radio-Canada.

« Le Québec a le droit d’établir un test pour l’obtention du Certificat de sélection, qui est donné par le Québec », a reconnu Justin Trudeau lundi soir, en rappelant simplement les pouvoirs conférés au Québec en vertu de l’Entente Canada-Québec sur l’immigration. « Ça n’a rien à voir avec la citoyenneté canadienne », a rappelé le chef libéral, puisque l’octroi de la citoyenneté est du ressort du fédéral.

Justin Trudeau n’a donc pas reculé quant au droit du gouvernement caquiste d’imposer un test de valeurs aux immigrants de la province. Il a plutôt été contraint de reconnaître que François Legault a le droit d’aller de l’avant s’il procède en contournant la juridiction fédérale en immigration pour arriver à ses fins en ayant recours aux pouvoirs qui sont déjà conférés à Québec par l’entente fédérale-provinciale en la matière.

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